L'huile réalisée en 1607 a été découverte en 2014 dans le grenier d'une vieille famille de Toulouse qui compte parmi ses aïeux un officier de l'armée napoléonienne. A-t-elle été apportée par un officier d'une expédition napoléonienne ou est-elle arrivée par d'autres voies? Le mystère reste total.
Lors d'un déménagement, le propriétaire tombe sur le tableau représentant une scène biblique en clair-obscur dans laquelle Judith incarne la résistance du peuple hébreu. Il s'agit d'une explosion de violence, bien dans le style du Caravage: le général assyrien lève les yeux vers la jeune femme juive en train de lui trancher le cou, en présence d'une servante ridée et affectée d'un goitre.
L'existence d'une telle toile est par ailleurs parfaitement documentée dans une série d'échanges épistolaires impliquant des princes et collectionneurs d'art il y a quatre siècles, selon l'AFP.
Un vrai Caravage?
Si la plupart des experts, notamment Keith Christiansen, directeur du département des tableaux européens au Metropolitan Museum of Art de New York, y voient la main du grand maître du clair-obscur, d'autres émettent des doutes, considérant qu'il s'agit d'une copie de l'artiste flamand Louis Finson (1580-1617) qui a peint plusieurs toiles dans le style caravagesque.
Aujourd'hui, estimer un tableau de Caravage n'est pas facile. Le marché des tableaux anciens n'est pas le marché de l'art contemporain. On va démarrer à 30 millions. On commence bas pour espérer monter.
La toile pourrait atteindre entre 120 et 150 millions d'euros, soit la vente de l'année en France.
Une folle histoire
Après sa découverte, la toile au réalisme violent est très vite déposée à Paris chez Eric Turquin, principal expert français des maîtres anciens. "Toutes les analyses techniques nous mènent vers un tableau peint à Naples entre 1605 et 1610. Ca réduit considérablement le spectre. Car à Naples (à cette époque) il n'y avait pas d'autres grands peintres", explique Eric Turquin.
"Et surtout les plus grands spécialistes de Caravage ont soutenu l'attribution. L'exécution, les coups de pinceau qui font 80 cm d'un coup, tout le monde ne sait pas faire ça", poursuit-il.
L'attribution de toiles à Michelangelo Merisi, dit le Caravage (1571-1610), est toujours difficile: il ne signait pas ses oeuvres et a souvent été copié.
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Oublié pendant trois siècles, le peintre italien à la vie tumultueuse voit son génie de nouveau reconnu à partir des années 50.
Le tableau est présenté au grand public jusqu'à dimanche avant la vente aux enchères du 27 juin à Toulouse.
afp/mcc
Judith et Holopherne, bis repetita
Michelangelo Merisi, dit le Caravage (1571-1610), a produit parfois deux toiles sur un même thème. Une autre "Judith et Holopherne" de 1598, très différente de la peinture toulousaine, existe au Palais Barberini à Rome. Elle montre Judith sous les traits d'une très belle femme, déterminée, vêtue de vêtements clairs.
La toile de 1607 a une inspiration plus sombre, moins classique: Judith est en deuil et détourne le regard en portant l'épée sur Holopherne. Cela est cohérent avec l'inspiration du Caravage, à un moment où lui-même était en fuite, recherché pour meurtre.