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Avec "La vie est à nous", Hadrien Klent réinvente la présidence française

La couverture de "La vie est à nous" d'Hadrien Klent. [Ed. Le Tripode]
Entretien avec Hadrien Klent, auteur de "La vie est à nous", aux éditions Le Tripode. / QWERTZ / 29 min. / le 19 juin 2023
Un prix Nobel d’économie est élu à la présidence de la France. Son programme de quinze heures de travail hebdomadaire, mis en pratique, est une révolution sociétale. Avec "La vie est à nous", Hadrien Klent nous plonge dans une utopie à laquelle on a très envie de croire.

Interrogeant le droit à la paresse pour toutes et tous dans son précédent roman, Hadrien Klent reprend ses personnages à l’heure des bilans. Après trois ans de mandat, le président Emilien Long et son équipe se retrouvent confrontés à bien des obstacles.

Les nostalgiques du temps d’avant, les anti-décroissants, les lobbyistes de tout poil, les grands propriétaires surtaxés ou les agriculteurs contraints de passer au bio s’opposent à ce prix Nobel de mathématique aux idées farfelues qui veut en plus, à présent, passer d’une présidence quasi monarchique à une présidence à six têtes. Une réforme structurelle des institutions et du pouvoir. Il y a là de quoi se faire traiter de Suisse!

Des enjeux solidaires

"La vie est à nous" est un roman complet où se mêlent la philosophie, les sciences sociales, l’économie, l’écologie. La suite de "Paresse pour tous" en est son miroir. Dans le roman précédent, Hadrien Klent questionnait les enjeux de la conquête du pouvoir. Dans le second opus, il place ses personnages face à l’exercice de ce même pouvoir en s’interrogeant sur les droits et les devoirs de nos sociétés contemporaines.

J’essaie d’écrire des romans qui sont à la fois très documentés, tout en restant utopiques. Évidemment, j’essaie d’imaginer un monde très différent de notre monde réel, mais en même temps, j’essaie de l’ancrer dans quelque chose de très factuel avec à la fois des données théoriques et des enjeux pratiques.

Hadrien Klent

Il suffit de trois ans de présidence pour que toutes les lignes bougent. En libérant les citoyennes et les citoyens des enjeux capitalistes, en ne travaillant que quinze heures par semaine (il est toutefois possible de travailler plus dans des domaines d’utilité publique ou des associations), on a le temps de se poser des questions plus profondes et d’examiner des enjeux importants pour nos démocraties. Des termes indispensables se font jour comme la solidarité, l’écologie et le bonheur.

Le bonheur comme valeur

Hadrien Klent évoque cette variable d’un indice de bonheur inscrit dans la Constitution de 1793. Au Bhoutan, la notion de Bonheur National Brut, élaborée en 1972, évince celle de Produit National Brut. Car l’indice de croissance doit être revisité à l’aune de nouveaux enjeux. Quel poids donner à la consommation, à la question des biens communs, à la privatisation d’Internet? Quelle est la part du bonheur humain, végétal ou animal?

Actuellement, il y a une volonté farouche de faire évoluer le système, d’intégrer dans les calculs de croissance une série de variables négatives. Mais il y a beaucoup d’oppositions, tant dans le roman que dans le réel, quand il est question de changer de système.

Evoquer le déni général, c’était pour moi l’occasion de montrer qu’on n’est pas dans un monde de bisounours où il suffit qu’Émilien Long dise: "on va faire comme-ci", pour que tout le monde le suive.

Hadrien Klent

Des décisions si radicales ne sont possibles aujourd’hui que dans la fiction. "Ce que j’essaie de montrer, c’est qu’il faut justement affronter ces enjeux plutôt que de continuer à mettre la tête dans le sable", explique l’auteur. Et de donner en exemple l’utilisation de pesticides qui font augmenter le PIB, alors que si on prend en compte ce qu’on abîme en termes de biodiversité et de santé, le calcul se biaise.

L’optimisme dans le champ politique

En proposant ce roman sur un monde meilleur, où le bonheur sort de l’intimité pour devenir un enjeu politique sans tomber toutefois dans une dictature du bonheur, Hadrien Klent offre l’optimisme de la fable, et la croyance forte que les choses peuvent changer. Car sans optimisme rien n’évolue jamais. L'auteur nous propose de reconstruire le monde en se basant sur un joli postulat: et si la vie était enfin à nous?

Catherine Fattebert/mh

Hadrien Klent, "La vie est à nous", éd. Le Tripode.

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