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Un lien tissé par-delà l'absence raconté par Bruno Pellegrino

L'écrivain suisse Bruno Pellegrino. [Éditions Zoé - Romain Guélat]
Entretien avec Bruno Pellegrino, auteur d'un roman intitulé "Dans la ville provisoire" paru aux éditions Zoé / QWERTZ / 19 min. / le 5 janvier 2021
"Dans la ville provisoire", Bruno Pellegrino donne la parole à un étudiant qui se rend dans une étrange cité pour trier les documents d'une traductrice disparue. Une relation se tisse entre lui et elle, par-delà l'absence.

Bruno Pellegrino, jeune auteur romand au succès retentissant - son roman "Là-bas août est un mois d'automne" paru en 2018 lui avait notamment valu d'être le premier écrivain suisse à recevoir le prix François-Mauriac de l'Académie Française - fait paraître ce 7 janvier un passionnant roman. Un livre bref et mystérieux dont le titre résonne comme une énigme: "Dans la ville provisoire".

Le narrateur du récit, un jeune homme solitaire, se retrouve engagé par une étrange fondation. Il doit partir "sans attendre" travailler dans une ville étrangère, une "ville provisoire" qui semble s'enfoncer chaque jour un peu plus sous les eaux. La tâche qui attend ce jeune étudiant - dont le lecteur ne connaîtra jamais l’identité - s'avérera aussi particulière que passionnante.

Durant toute la durée de son séjour, il va devoir mettre de l'ordre dans les affaires d'une traductrice disparue mystérieusement, dont le travail, bien qu'auréolé de plusieurs prix, reste méconnu du grand public.

"Une proximité impossible, à sens unique"

La couverture du livre "Dans la ville provisoire" de Bruno Pellegrino. [Editions Zoé]
La couverture du livre "Dans la ville provisoire" de Bruno Pellegrino. [Editions Zoé]

Dès son arrivée, le jeune homme se coule consciencieusement dans la vie de l'absente. Il investit sa maison, plonge dans ses écrits, recrée ce qu'il imagine de son quotidien passé. Puis il trie sa correspondance, lit et relit ses textes de travail, boit du thé dans ses tasses, utilise sa cuisine et finit par monter dans la chambre de la vieille femme afin de palper ses habits délaissés...

Au fil du récit, le lecteur a progressivement la sensation d'assister à une rencontre sans présence. Une sorte de lien se tisse entre un jeune étranger et la vieille femme absente. Une relation profonde malgré l'absence se noue et se joue entre l'étudiant et l'objet-sujet de son étude.

"C'est cet étrange lien qui a été le moteur de l'écriture de cette histoire, dévoile Bruno Pellegrino. C'est précisément cela que je voulais explorer. Au fil de mon parcours d'écrivain comme durant mes études, j'ai été amené à m'intéresser régulièrement à des gens disparus, des personnes que je n'ai pas connues mais qui, à force, me sont devenues extrêmement proches. C'est cette proximité-là, une proximité impossible, à sens unique, que j'ai eu envie de mettre en histoire avec ce roman".

A noter que cette idée d'un lien étrange, d'un couple pas comme les autres, était déjà au cœur du roman "Là-bas août est un mois d'automne", que le jeune écrivain morgien avait consacré à la vie du poète vaudois Gustave Roud et au rôle prépondérant de sa sœur Madeleine.

"On aura peut-être reconnu Venise"

Mais les deux protagonistes de ce roman-ci n'en sont pas les seuls personnages. Bruno Pellegrino a aussi voulu faire vivre la "ville provisoire" comme un personnage à part entière. Un personnage magnifique et décati, qui n'est pas sans rappeler la ville préférée de l'écrivain Marcel Proust: Venise. "Je ne la nomme jamais dans le livre, confie Bruno Pellegrino. Mais certains auront peut-être reconnu la Sérénissime. Une ville dans laquelle j'ai eu la chance d'habiter lors d'une résidence d'artiste".

Linn Levy/aq

Bruno Pellegrino, "Dans la ville provisoire", éditions Zoé.

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