Publié

Marianne Brun retrace le destin de l'athlète somalienne Samia Yusuf Omar

Marianne Brun [bsnpress.com - Louise Anne Bouchard]
Marianne Brun: "Fondre" / Versus-lire et penser / 39 min. / le 23 janvier 2019
L'écrivaine franco-suisse Marianne Brun suit les traces de Samia, qui a représenté la Somalie aux JO de Pékin en 2008. Quatre ans plus tard, la jeune coureuse a disparu en Méditerranée dans le naufrage d'un bateau de migrants.

La franco-suisse Marianne Brun est scénariste et romancière. "Fondre" est son troisième ouvrage de fiction. Il retrace le destin tragique de Samia Yusuf Omar, 17 ans, qui a représenté la Somalie aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008. Excellente en course de fond, la délégation somalienne l'inscrit pourtant au 200 mètres, une épreuve de vitesse pour laquelle elle n'est pas entraînée. Elle arrive bonne dernière et attire à ses dépens tous les médias de l'époque. "Elle a été dépassée par les événements et manipulée par les instances olympiques qui voulaient faire le buzz", explique Marianne Brun.

De retour en Somalie, Samia poursuit l'entraînement. Mais elle se fait insulter par les shebabs, les miliciens islamistes qui tiennent le pays et la menacent de mort. Elle décide alors de tenter sa chance en Ethiopie. Son objectif? Prendre sa revanche lors des Jeux olympiques de Londres en 2012.

Mais en Ethiopie, elle ne trouve pas d'entraîneur, pas plus qu'en Libye. Après des mois d'infortune, elle décide que ce sera l'Europe ou rien! La jeune fille n'arrivera jamais en Italie; elle périra en avril 2012, noyée en Méditerranée, lors du naufrage d'un bateau de migrants.

De la réalité à la fiction

Marianne Brun, qui s'intéresse peu au sport, est ébranlée à la lecture dans "Le Monde" de l'histoire de cette jeune fille, dont le rêve a été fracassé en Méditerranée. Mais elle n'est pas encore romancière....

Deux ans plus tard, Marianne Brun s'établit avec son mari à Zurich. Elle prend des cours d'allemand et c'est là qu'elle rencontre de nombreux Erythréens, Soudanais et Tchadiens. Leur présence l'émeut; la migration a enfin un visage et l'histoire de Samia, qui n'a cessé de la hanter, commence à prendre forme.

Samia Yusuf Omar le 19 août 2008 lors des Jeux olympiques de Pékin en 2008. [Keystone - Anja Niedringhaus]
Samia Yusuf Omar le 19 août 2008 lors des Jeux olympiques de Pékin en 2008. [Keystone - Anja Niedringhaus]

Une nouvelle collection consacrée au sport

Mais l'idée d'en faire une fiction lui vient quand elle apprend que Giuseppe Merrone, patron des éditions BSN à Lausanne, va lancer une collection consacrée au sport baptisée "Uppercut". "Je me suis beaucoup documentée, sur la course, sur la Somalie. Je me suis alors sentie capable d'être dans le corps de Samia et d'en restituer la réalité par des mots".

Marianne Brun cependant n'a pas réussi à faire court, comme l'exige la collection qui prescrit des textes qui n'excèdent pas 80 pages. Le résultat est surprenant, Marianne calque son rythme sur celui de son héroïne, faisant corps avec elle, dans toutes ses métamorphoses.

Le titre, "Fondre", désigne un procédé physique. Samia a été obligée de changer plusieurs fois d'états, et parfois de se confondre avec son environnement, pour pouvoir survivre.

Marianne Brun, scénariste et romancière

Au-delà de sa dimension sportive, le livre évoque de façon inédite et bouleversante le sort des migrants prêts à tout pour assouvir leurs rêves dʹailleurs.

Propos recueillis par Jean-Marie Félix

Adaptation web: Marie-Claude Martin

Marianne Brun, "Fondre", éditions BSN Press, 2018

Publié