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"Tout le monde aime Jeanne" dévoile une Blanche Gardin toute en subtilité

Laurent Lafitte et Blanche Gardin dans "Tout le monde aime Jeanne" de Céline Devaux. [DR]
Laurent Lafitte et Blanche Gardin dans "Tout le monde aime Jeanne" de Céline Devaux. - [DR]
"Tout le monde aime Jeanne" est le premier long métrage de Céline Devaux. La réalisatrice réunit Blanche Gardin et Laurent Lafitte dans une dramédie originale. Dépression, douce folie et éco-anxiété sont au coeur de ce film drôle et touchant à voir actuellement au cinéma.

Tout le monde a toujours aimé Jeanne. Jeanne est une femme très ingénieuse, qui met son cerveau au service de la dépollution des océans. Elle contribue à sauver la planète. Elle est géniale. Mais son projet écologique est en réalité un fiasco, tout comme l'est sa vie. Cette réalité, sous la surface, sa petite voix intérieure ironique à souhait ne manque pas de le lui rappeler régulièrement. Aujourd'hui, Jeanne se déteste. Surendettée, elle doit se rendre à Lisbonne et mettre en vente l'appartement de sa mère disparue un an auparavant. À l'aéroport elle tombe sur Jean, un ancien camarade de lycée fantasque et quelque peu envahissant.

"Tout le monde aime Jeanne", très bien accueilli par la critique, est le premier long métrage de la réalisatrice française Céline Devaux. Le point de départ de son film, c'est cette petite voix intérieure qui nous guide toutes et tous: "Dans ma vie personnelle, c'est quelque chose qui m'a toujours beaucoup préoccupé [...], et dans le travail, pour écrire, je prends des notes constamment. C'est comme si j'étais dans un système de prises de notes intérieures. C'est la matière de mes films", explique la réalisatrice à la RTS.

La surprise derrière la voix intérieure

Dans le film, la petite voix intérieure est dessinée par Céline Devaux elle-même puisque la réalisatrice a une formation d'illustratrice et d'animation. Et, chose surprenante, c'est aussi elle qui incarne cette petite voix, qui la porte. Pourtant, initialement, cette voix intérieure, comme le personnage de Jeanne, avait été écrite pour Blanche Gardin. "En voyant le pré-montage du film, j'ai vu le personnage que Blanche Gardin avait développé qui était d'une finesse et d'une subtilité incroyable. Je me suis dit: 'si c'est sa voix, on va perdre cette espèce de magie'", indique Céline Devaux. Pour avoir une voix témoin, la réalisatrice s'enregistre et décide de garder cela.

>> A écouter: l'interview de Céline Devaux :

La réalisatrice française Céline Devaux. [AFP - Joel Saget]AFP - Joel Saget
Lʹinvitée: Céline Devaux "Tout le monde aime Jeanne" / Vertigo / 23 min. / le 8 septembre 2022

Au casting du film, Blanche Gardin (Jeanne) est entourée par un trio masculin: Laurent Lafitte (Jean), Maxence Tual (son frère Simon) et Nuno Lopes (Vitor, son ex). Le film se déroule à Lisbonne, dans l'appartement que souhaite vendre Jeanne. C'est une histoire de famille, une histoire d'amour et de liens qui se tissent. "Je voulais raconter cette espèce de voyage intérieur qu'on ressent au quotidien dans la vie: on a honte, on a peur... il y a plein de choses minuscules qui nous arrivent tout le temps, et en fait je trouve cela très épique", souligne la cinéaste.

Une comédie sur la mélancolie et l'éco-anxiété

Jeanne est une sorte de sainte contemporaine. Elle essaie de sauver la planète, travaille dans l'écologie, tente de dépolluer les océans des matières plastiques. A cet égard, le film traite aussi de l'éco-anxiété. "Lorsqu'on parle de l'état de notre planète, notre niveau d'information est inversement proportionnel à notre capacité à agir. C'est très dur de se dire que ce n'est pas grave. [...] Le cinéma et l'art en général sont une manière de dépasser ce sentiment d'impuissance, explique Céline Devaux. Il y a ce truc sublime qui fait que lorsqu'on ouvre un livre, qu'on regarde un tableau, qu'on voit un film ou qu'on entend une musique, à un moment, on est un peu soulagé de quelque chose. C'est aussi l'immense beauté de l'art je crois."

Avec "Tout le monde aime Jeanne", je voulais raconter une histoire qui parle de sujets assez graves, et je voulais que ce soit très drôle. Parce que dans la vie, souvent, dans les situations les plus graves ou tristes, il peut nous arriver d'avoir un fou-rire.

Céline Devaux, réalisatrice

Au coeur de "Tout le monde aime Jeanne", il y a aussi la folie, incarnée par Jean, mais aussi la dépression et le mal-être avec la mère de Jeanne (incarnée par Marthe Keller) dont on apprend qu'elle s'est suicidée.

La famille, les liens qui se tissent ou non, la peur, la mélancolie, les angoisses et la folie sont autant d'éléments qui habitent le long métrage de Céline Devaux, mais pas seulement. "J'avais envie de faire un film en me disant: il faut qu'on arrive à trouver des moyens de vivre sans paniquer constamment. C'est un peu le voyage que fait le personnage de Blanche Gardin dans le film. A un moment, elle se rend compte que c'est cool d'être vivant. [...] Cela paraît basique, mais c'est énorme de trouver ça aujourd'hui. Je trouve que c'est difficile de s'en rappeler et je voulais que ce soit ça le message du film", conclut la réalisatrice.

Propos recueillis par Anne Laure Gannac

Adaptation web: Lara Donnet

"Tout le monde aime Jeanne" de Céline Devaux avec Blanche Gardin et Laurent Lafitte, à voir actuellement dans les salles romandes.

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