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L'art verrier se joue de la mondialisation au mudac de Lausanne

François Daireaux, "Blow Bangles", 2012. [mudac.ch - Guy Rebmeister]
Arts visuels: en verre et avec tous! / Vertigo / 6 min. / le 10 novembre 2017
L'artiste français François Daireaux a ramené d'Inde des bracelets en verre qu'il a fait fondre dans des moules d'anciennes verreries lorraines. Une expo de ces "empreintes" de verre sont présentées à Lausanne, au mudac.

Dans la grande salle blanche du mudac, posés sur un socle légèrement surélevé par rapport au sol, des dizaines de vases de formes et de tailles différentes, de toutes les couleurs, moirés, vibrants. A y regarder de plus près, ces "empreintes" ressemblent davantage à des sculptures qu’à des objets fonctionnels.

A l’origine, l’artiste s’est rendu de nombreuses fois à Firozabad, une ville ouvrière au nord de l’Inde, dont l’activité principale est, depuis plusieurs siècles, la production verrière et en particulier la production de bracelets de verre, ces fameux bangles dont se parent les femmes indiennes.

Chaque jour, des millions de bracelets sont produits dans les centaines de verreries disséminées dans toute la ville. 600’000 habitants à Firozabad, et pratiquement tous travaillent dans ces verrières aux cadences de travail d'enfer.

Pendant plus de deux ans François Daireaux a filmé, photographié et fait l'inventaire d'une partie de leur production qu'il a ensuite "délocalisée" en France.

Mondialisation et globalisation de la production de masse

François Daireaux présente l'exposition "Blow Firozabad Bangles" au mudac de Lausanne. [mudac - François Daireaux]

L’artiste a récolté une collection de 404 toras – bouquets de bangles entremêlés – qu’il a emmené en Lorraine, à Meisenthal, au Centre international d’art verrier. Ces toras ont été été soufflées dans des moules sauvegardés par le CIAV après les fermetures successives de nombreuses verreries lorraines. De là est née l’installation "Blow Firozabad Bangles" composée de 404 “empreintes” de verre soufflées à la bouche par les artisans verriers de Meisenthal.

François Daireaux a donc transformé des verres indiens en vases lorrains. La boucle est bouclée, en croisant ces cultures qui semblent étrangères en apparence, mais qui sont à la fois liées par la tradition du travail verrier et par la crise de la production locale.

Une production qui occasionne, du côté français, la fermeture des manufactures liée à la délocalisation et des conditions de travail inhumaines de l’artisanat verrier de masse indien.

L'artiste français offre plus qu’un commentaire sur les effets de la globalisation.

Florence Grivel/mcc

"Blow Firozabad Bangles" de François Daireaux au mudac, Lausanne, jusqu’au 11 février 2018.

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