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Les boulettes de gomme de Montilier

Mal aux dents? Prenez un chewing-gum!
Mal aux dents? Prenez un chewing-gum!
Une centaine de boulettes de gomme composées de brai de bouleau ont été mises au jour sur la fouille du village néolithique de Montilier, près de Morat. La fonction de ces résidus, qui portent l'empreinte de dents humaines, a suscité nombre de spéculations.

Le brai ou bitume de bouleau, appelé aussi bétuline, ressemble, à l'état liquide, à du goudron d'un noir brillant; une fois durci, son aspect devient brun foncé. On l'obtient avec de l'écorce de bouleau, selon un procédé appelé "pyrolyse".

Au cours de la préhistoire, cette matière a principalement été utilisée comme colle universelle, pour l'emmanchement des outils en silex, en os et en pierre, ou pour la réparation de vases brisés. La bétuline a également servi au calfatage des bateaux, à l'imprégnation du bois et des cordelettes, ainsi qu'à la décoration des céramiques. Il s'agit de la première production de matière plastique naturelle.

Selon une hypothèse originale, les gommes de bétuline mâchées pourraient avoir connu un usage thérapeutique: de nos jours, la médecine naturelle a d'ailleurs encore recours aux essences de bouleau. De fait, le brai de bouleau a des propriétés anti-inflammatoires; les infusions de feuilles de cet arbre aident, dit-on, à lutter contre la fatigue du printemps, les douleurs menstruelles, les maladies touchant les voies urinaires ou encore la chute des cheveux.

Alors: remède pour soulager les maux de gorge et les douleurs dentaires, ou chewing-gums crachés par lassitude, lorsqu'ils avaient perdu de leur saveur?

Daniel Dall'Agnolo, archéologue diplômé de l'Université de Berne et responsable de la médiation culturelle du Laténium

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Pyrolyse

La pyrolyse, appelée aussi distillation sèche, est un processus chimique qui permet de désagréger un composé organique, par la chaleur, en l'absence d'oxygène. Il y a trois siècles, on recourrait à ce procédé pour obtenir du coke à partir de la houille. La production de bétuline dans des fours à poix et des pots doubles est documentée par les auteurs grecs et romains. Elle a toutefois laissé peu de traces archéologiques.

Fours à poix préhistoriques

Sur le site des Courbes-Rayes à Cortaillod (Neuchâtel), à l'occasion des fouilles sur le tracé de l'autoroute A5, les archéologues ont dégagé en 1997 un four creusé dans le sol à l'âge du Bronze final (env. 1000 av. J.-C.). Il s'agit vraisemblablement d'un four à poix, selon un type de structure en pot double attesté au haut Moyen Âge.
Deux pots superposés, séparés par une passoire en argile, ont été placés dans une fosse de 75 cm de profondeur et d'un diamètre d'environ 50 cm. L'élément supérieur recevait les écorces de bouleau, le pot inférieur permettait la récolte du goudron coulant à travers la passoire. Un couvercle en argile scellait le four à la surface. La chaleur provient de la braise disposée au-dessus du couvercle en terre cuite. Les analyses du charbon préservé dans le remplissage au-dessus de la plaque d'argile font état de charbons de chêne, une essence autorisant une combustion lente. Le rendement de ce procédé est d'environ 5%: un kilo d'écorce produit environ 50 ml de bétuline.