Les dernières sorties de modèles ne laissent pas planer de doutes, la douceur reviendra sur le Nord-ouest du Continent américain pendant la journée de mercredi mais une nouvelle vague d’air froid devrait s’installer en fin de semaine. La baisse ne sera pas aussi spectaculaire qu’en janvier 2018 - ou des conditions similaires avaient prévalu - , mais il pourra faire jusqu’à -28°C, voire -30°C dans les Laurentides, qui se trouvent à une latitude assez proche de celle de la Suisse.
Ces vagues d’air froid sont assez fréquentes sur le Nord du Continent américain mais elles ne traversent que rarement l’Atlantique pour s’installer sur l’Europe. Les courant d’Ouest ont en effet tendance à onduler sur les deux hémisphères, formant un enchaînement de creux dépressionnaires et de hautes pressions. Or, ces ondes gardent un caractère stationnaire et restent relativement indépendantes les unes par rapport aux autres.
Voici (à gauche) un relevé de la circulation des courants sur l’hémisphère Nord ce lundi 14 janvier : un couloir dépressionnaire se trouve actuellement entre le Nord-ouest du Continent américain et le Groenland, un deuxième sur la Scandinavie, un troisième entre sur le Nord-ouest de la Russie et le Nord du Pacifique. Comme le montre la prévision pour le 20 janvier (à droite), cette circulation ne devrait pas beaucoup changer ces prochains jours : l’air froid qui se trouve actuellement sur le Nord-ouest du Continent Nord-américain devrait se confiner à son couloir dépressionnaire.
L’expression « devrait » n’est pas innocente : il n’est en effet pas impossible que des poches d’air froid s’échappent du couloir Nord-américain et passent vers l’Europe dans une dizaine de jours (de récentes sorties de modèles le suggèrent). La baisse des températures n’aura cependant pas la même ampleur que de l’autre côté de l’Atlantique…
Quelles interactions entre les vagues de froid américaines et l’Europe ?
Si le passage d’une vague d’air froid de part et d’autre de l’Atlantique est assez rare, il y a de nombreuses interactions :
Les évènements de l’hiver 2018-2019 montrent par exemple que la vague extrême qui a sévit sur le Nord-ouest du Continent américain a contribué à la formation d’un puissant jet-stream sur l’Atlantique, ce qui s’est traduit par un temps d’Ouest particulièrement doux en Europe pendant les premières semaines de 2018. De fait, des records de températures ont été battus en Suisse pendant le mois de janvier.
La persistance de vague de froid sur le continent américain peut par ailleurs être à l’origine de situations bloquantes, soit par la persistance des hautes pressions sur le Vieux Continent, soit par la dominante de courants d’Ouest.
Froids européens surtout dictés par les courants d’Est à Nord-est
Les vagues d’air froid qui s’abattent sur l’Europe entre décembre et février dépendent essentiellement de la force des courants d’Ouest sur l’Atlantique, de la position (et de la vigueur) des hautes pressions qui se forment en hiver sur la Scandinavie ou sur la Russie ou encore du comportement du vortex polaire.
Lorsque les courants d’Ouest perdent de leur vigueur, les hautes pressions ont en effet tendance à se renforcer sur la Russie ou la Scandinavie, ce qui permet aux courants d’Est à Nord-est de s’installer sur la région des Alpes et d’y amener de l’air continental froid à l’image des événements de février 1956, qui a été le mois le plus froid en Suisse depuis le début des mesures.
De récentes études ont par ailleurs montré que les vagues d’air froid européennes dépendaient également du vortex polaire. Ce fort courant d’altitude qui se forme au-dessus du Pôle Nord en hiver peut parfois perdre se disloquer, favorisant à terme l’établissement de courants d’Est/Nord-est, porteurs d’air froid. Le phénomène a par exemple joué un rôle déterminant en février 2012, lequel a été particulièrement glacial en Suisse.
Philippe Jeanneret avec le concours de Lionel Fontannaz de Météosuisse