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Louis Vanhaverbeke, le danseur qui se rit des clôtures

Louis Vanhaverbeke dans "Mikado Remix". [pavillon-adc.ch - Leontien Allemeersch]
Séquence 2 / Vertigo / 3 min. / le 9 octobre 2020
Il faut aller voir "Mikado Remix" à l'ADC de Genève jusqu'à dimanche. Ce spectacle unique en forme de ballet pour objets, machines, bicyclette, rap, grillages et moule à gaufre est porté par le danseur belge Louis Vanhaverbeke.

On passe tous les jours devant. Vous saviez leur nom? Pas moi: les clôtures Heras. Késako? Ces barrières métalliques d'une hauteur de deux mètres se plantent sur des plots en béton ou en plastique d'une vingtaine de kilos. On les trouve autour des chantiers, des festivals, des fans zones de foot, etc. En général, elles sont recouvertes de bâches pour qu'on ne puisse pas voir ce qui se passe derrière.

Heras, c'est le fabricant, leader de ce marché particulier. Et son slogan, le voici: "La conviction qu'une existence sans souci est conditionnée par la présence d'un environnement de vie et de travail sécurisé". C'est beau. C'est aussi troublant. Louis Vanhaverbeke a ainsi noté que pour cette entreprise qui fabrique de la muraille au kilomètres, "liberté et sécurité" sont liées.

Fort de ce constat, le danseur, performeur, rappeur, bricoleur belge s'enferme entre quatre grillages couverts de bâches et se fait filmer par des caméras tout en balançant un rap bien chaloupé avec des paroles sur sa situation de prisonnier volontaire. Voici le début de "Mikado Remix", sa dernière création visible à l'ADC de Genève.

Un petit bijou

Un spectacle carcéral? C'est mal connaître cet oiseau venu de Gant. Il s'échappe rapidement de sa cage et va transformer au fil de son nouveau spectacle ces quatre clôtures et leurs plots respectifs en une formidable installation à fouetter l'imaginaire et déclencher dans le public une forme d'émerveillement. "Mikado Remix" est un ballet d'objets, de machineries, de rouages, de bicyclette, de moule à gaufre (hé oui, il est Belge…) et de musiques à l'aide de caisses en plastiques qui sont autant de boîtes à malice.

Et pendant qu'il bouge et arrange son installation, Louis Vanhaverbeke, tel un marathonien du verbe et du groove ne cesse pratiquement jamais de rapper, en anglais ou en flamand, surveillant du coin de l'œil (et de l'oreille) les lancements des diverses boucles sonores dissimulées dans ses caissettes multicolores en plastique.

Il y a quelques années de ça, Louis Vanhaverbeke avait proposé un autre spectacle, "Multiverse", dans lequel il recréait notre système solaire avec des tourne-disques en rotation. Détail, il portait aussi des patins à roulettes. Conclusion: cet artiste aime les entraves pour mieux s'en libérer. Et dans son exploration actuelle du Dehors et du Dedans, il a toutes les libertés et les partage avec générosité et gourmandise. Un petit conseil: en sortant de la salle, n'oubliez pas de prendre un cahier de salle. On y trouve des dessins et les paroles de ses raps. Ça aussi, c'est un petit bijou.

Thierry Sartoretti/ld

"Mikado Remix", Salle de l'ADC, Genève, jusqu'au 11 octobre.

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