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Donna Summer, l'histoire brûlante d'une Disco Queen

La chanteuse Donna Summer pose à Hollywood en 2003 pour la sortie de son livre. [AFP - Giulio Marcocchi]
Scanner - Donna Summer / Scanner / 56 min. / le 2 août 2019
Il y a 40 ans, la reine du disco Donna Summer planait au sommet des charts avec son tube "Hot Stuff". Décédée en 2012, la chanteuse sera à l’honneur du film "Spinning Gold", actuellement en tournage à Montréal. L’occasion de revenir sur la carrière rythmée de l’une des pionnières du disco.

"Spinning Gold" est un biopic sur le producteur Neil Bogart. Il a lancé les carrières de nombreux artistes comme Curtis Mayfield, Village People, Gladys Knight et Donna Summer. Des Etats-Unis à l'Europe, de la soul des années 60 aux synthétiseurs de Giorgio Moroder, retour sur la carrière de Donna Summer.

Des tubes brûlants

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: 3 double-albums en tête des charts – du jamais vu – et 130 millions d’albums vendus dans le monde en une dizaine d’années. Jusqu'en 1994, Donna Summer sort en moyenne un album par an. Pourtant, si on ne connaît pas bien le genre, il faut se creuser la tête pour citer les tubes de Donna Summer. En effet, au royaume du disco les divas sont nombreuses. "I will survive"? Non, Gloria Gaynor. "Upside down"? Non plus, Diana Ross!

Il faut chercher Donna Summer sur des territoires bien plus aguicheurs: ses chansons à succès sont des boules de feu et de sueur intitulées "Hot Stuff", "Love to love you baby" ou encore "I Feel Love", des morceaux qui renvoient Lady Gaga et Madonna au frigo.

Les débuts et le départ pour l’Europe

Comme de nombreuses divas de la soul, du blues et du disco, Andrea Gaines - de son vrai nom - fait ses premiers pas dans la musique à l’église, où elle chante du gospel. En 1966, elle quitte son Boston natal pour New York, où elle chante ici et là dans de petites productions. Deux ans plus tard, à l’âge de 20 ans, elle plaque les Etats-Unis et s’installe en Europe.

La future Donna Summer auditionne pour "Hair", une comédie musicale à la fois rock sur le point de sortir à Broadway. Elle est retenue pour la version allemande qui se joue à Vienne en Autriche. La même année, en 1968, Nina Simone interprète "Ain’t Got No- I Got life" tiré de "Hair".

Premier disque

Après l’aventure viennoise, Donna Summer s’installe avec son nouveau mari à Munich. C’est dans cette ville qu’elle enregistre son premier disque solo en 1971, "Sally Go 'Round The Roses". La chanson, sortie à l'origine au début des années 60, est une reprise du girl-group originaire du Bronx The Jaynetts.

La rencontre avec Giorgio Moroder

Cette reprise des Jaynetts passe totalement inaperçue, mais la vie de Donna Summer va changer grâce à un Anglais, Pete Bellotte, et à un Italien d’origine allemande, Giorgio Moroder. Les deux producteurs et la chanteuse vont bientôt affoler les dancefloors.

Leur première collaboration sort en 1974 avec le morceau "The Hostage", une histoire de kidnapping encore bien éloignée des gémissements de "Love To Love You Baby".

Réchauffement planétaire avec "Love To Love You Baby"

Le trio Summer/Bellote et Moroder fait un nouveau carton plein l’année suivante avec un single probablement responsable des débuts du réchauffement planétaire. "Love To Love You Baby" sort en 1975, d’abord en version standard, soit 3 minutes 24. Moroder a ensuite l’idée de sortir sur toute la face d’un 33 tours une version longue du morceau avec des kilomètres d’inspirations et d’expirations suggestives. Donna Summer dit s'être inspirée de Marilyn Monroe pour chanter de manière équivoque. Pendant l’enregistrement, elle est allongée par terre dans un studio plongé dans le noir.

Pour l’inspiration (et les expirations), elle pense à son petit copain Peter. "Love To Love You Baby" a tout de suite du succès dans les clubs gays, où on préfère les DJs aux groupes. Plus tard, le morceau s’installe dans le mainstream et la bande originale du film Saturday Night Fever. Avant “Love To Love You Baby”, Summer est davantage perçue comme une chanteuse pop-folk, mais là, elle devient la reine du disco. Donna Summer aura pourtant beaucoup de mal à s’écouter dans "Love To Love You Baby", notamment à cause de son éducation chrétienne.

>> A regarder: "La Fièvre du Samedi Soir" sort sur les écrans romands en 1977

1977, année synthétique

Alors que les punks n’ont pas encore dit leur dernier mot, le tournant de l’histoire du disco se fait en 1977. La révolution tient en un morceau: "I Feel Love". Cette année, Moroder écrit une merveille. Mais lorsqu’elle l’entend pour la première fois, Donna Summer n'aime pas le morceau. Elle trouve la chanson trop "pop corn": "Franchement Giorgio, qu’est-ce que c’est que ce morceau ?" lui dit-elle à l’époque.

Ce tube disco change pourtant la donne. "I Feel Love" se débarrasse totalement de l’acoustique: place à la musique du futur, la musique 100% synthétique. C’est la graine de l’électro et de la techno.

Le disco se propage

Hypnotique, "I Feel Love" influence dès le début des années 80 toute une scène musicale, de New York à Manchester. A la fin des années 70, Bernard Sumner et sa bande broient du noir et font dans le post punk glacé avec Joy Division. A la mort du chanteur Ian Curtis, le groupe continue sous un nouveau nom, New Order. Changement de cap! Les Anglais découvrent le disco dans les clubs de Manhattan et s’en inspirent pour écrire une nouvelle vague électro enjouée.

Donna et la communauté gay

Au milieu des années 80, la chanteuse est au bord du gouffre. Être une diva n’est pas un job garanti à vie, et il faut s’accrocher aux branches.

Après un tel succès, je ne savais plus quoi faire. J’ai commencé à prendre des médicaments.

Donna Summer

C’est à ce moment que la chanteuse part en vrille. Elle tient des propos choquants envers la communauté gay et le sida. Mal joué quand on sait que les gays représentent l’écrasante majorité de son public.

Plus tard, Donna Summer dira que ces déclarations complètement à côté de la plaque ont été inventées par les tabloïds anglais. La vérité est encore très floue, toujours est-il que c’est le déclin. Pour tenter de s’en sortir, elle se tourne vers la religion. Son dernier hit s’appelle “She Works Hard for the Money”, chanson féministe et surtout 100% autobiographique.

Le disco de nos jours

Aujourd’hui, le disco est pris au sérieux. Ce n’était pas le cas il y a quarante ans, à sa naissance. Le commun des mortels ne voulait pas en entendre parler: trop féminin, trop gay, trop noir. Cependant, en 2019 le disco se fait plus discret. Le renouveau apparaît à travers des artistes comme Kiddy Smile ou Beth Ditto. Comme le punk, le disco est plus qu’un genre musical: une attitude.

Sujet radio: Chrystelle André/Adaptation web: ms

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