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La Révolution française vécue par une famille de vampires

Antoine De Baecque [stock.fr - Julien Falsimagne]
Antoine de Baecque : "Les talons rouges" / Caractères / 60 min. / le 29 octobre 2017
Avec "Les Talons rouges", Antoine de Baecque mêle deux de ses passions: le cinéma de genre et son érudition historique. Son plaisir? Avoir été jusqu'au bout des logiques du sang, rouge ou bleu.

Juin 1789, l'Ancien Monde bascule. Les Villemort forment une longue lignée d'aristocrates, fiers de leur sang bleu qu'ils doivent, pour préserver leurs privilèges, nourrir du sang des autres. Car les Villemort sont des vampires.

Deux d'entre eux pourtant sont prêts à renoncer à leur rang pour se fondre dans la communauté des égaux. William, l'oncle qui revient d'Amérique avec le goût de la liberté, et Louis, son neveu, beau et fougueux jeune homme épris de Marie de Méricourt, au point de lui donner la vie éternelle.

Composite de personnages

Autour de ces deux héros imaginaires - et leur famille nombreuse - circulent de vrais personnages historiques et d'autres, pseudo-historiques mais inspirés de gens ayant existé.

Ces personnages hybrides sont comme des chimères. Les inventer est une jouissance d'écrivain. Mais la trame du livre est très documentée.

Antoine de Baecque, auteur de "Talons Rouges"

Amour du roman gothique

"Les Talons rouges" (Ed.Stock), premier roman d'Antoine de Baecque, par ailleurs auteur d'une multitude d'essais, études et monographies, mêle avec malice l'Histoire et le fantastique, la littérature et le cinéma, le gothique et l'humour.

Historien, spécialiste de la culture des Lumières, critique de cinéma et ancien rédacteur en chef des "Cahiers du cinéma", Antoine de Baecque est un grand bavard, un grand curieux et un grand lecteur. "Particulièrement de la littérature de la fin du XVIIIe siècle et début du XIXe", précise-t-il à la RTS.

J'aime beaucoup le roman gothique parce c'est le genre le plus éloigné possible de la capture réaliste.

Antoine de Baecque, historien et critique de cinéma

Le vampirisme, qui pousse la logique du sang, le bleu, le rouge ou l'impur jusqu'au bout, lui permet d'aller plus loin dans son approche de la Révolution. Un sujet dont il est spécialiste, en particulier la question du corps et du cadavre sous la Terreur. "Comme historien, je me sentais un peu bridé, j'ai voulu expérimenter un cran au-dessus", rajoute-t-il.

D'abord un scénario

Et le cran au-dessus, hormis la littérature gothique, c'est le cinéma. "Le vampire est réapparu avec le cinéma. L'image qui me vient immédiatement à l'esprit, c'est Max Schreck dans "Nosferatu" de Murnau. Et pas du tout "Le Traité de base du vampirisme" du bénédictin Augustin Calmet", dit-il en riant.

Max Schreck incarne Nosferatu, alias le conte Orlock, dans le film de Friedrich Murnau. [© Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr]
Max Schreck incarne Nosferatu, alias le conte Orlock, dans le film de Friedrich Murnau. [© Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr]

A l'origine, "Talons rouges" devait être le scénario d'un film de Nicolas Klotz. Le projet n'a pas pu se faire. La matière cinéma s'est alors transformée en matière littéraire.

L'explication du titre

Reste une question: qui sont les "Talons rouges" du titre? "Dans l'Ancien Régime, les nobles les plus réfractaires à la nouveauté avaient teint les talons de leurs chaussures en rouge, mais seulement leurs talons, car le rouge aux pieds était le privilège du roi. C'était à la fois un geste de reconnaissance et de défiance."

Propos recueillis par Marlène Métrailler / Adaptation web: Marie-Claude Martin

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