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Jacques Audiard flingue le western avec "Les Frères Sisters"

L'affiche du film "Les frères Sisters" de Jacques Audiard. [DR]
Cinéma: Jacques Audiard flingue le western / Vertigo / 5 min. / le 18 septembre 2018
Cette fable sur la fraternité dans les décors de la conquête de l'Ouest est le premier film tourné en anglais par le réalisateur du "Prophète". Un faux western qui se révèle très personnel.

"Les Frères Sisters", Lion d'argent de la dernière Mostra, c'est l’histoire de deux frères, tueurs à gages, payés pour récupérer une mystérieuse formule concoctée par un chimiste. Tourné en anglais, il affiche un des plus beaux castings de la rentrée: Joaquin Phoenix, Jake Gyllenhaal et John C. Reily. Ce dernier, devenu co-producteur du film, est d'ailleurs à l'origine du projet puisque c'est lui qui a proposé à Jacques Audiard d'adapter le roman de Patrick DeWitt, dont l’action se situe en 1851, dans l’Oregon.

Une fable plus qu'un western

Malgré les chapeaux, les saloons, les chevaux, les fusillades et les décors, "Les Frères Sisters" n'est pas un vrai western. Jacques Audiard ne s'est pas du tout senti tributaire du genre et s’en éloigne pour signer une fable magnifique et mélancolique sur la fraternité. "Je n'ai jamais nourri la passion du western dit classique, j'ai commencé à m'y intéresser quand il est devenu mon contemporain à la fin des années 60 et 70 avec des films comme "Soldat bleu" ou "Little Big Man". Pour moi, "Les Frères Sisters" relève plus du film d'époque que du western", explique Jacques Audiard.

La brosse à dents, symbole de civilisation

Deux frères donc. Charlie et Elie. L’un souhaite une existence normale, faisant tout le voyage avec une relique, une écharpe offerte par une institutrice dont il est amoureux. L’autre est né pour tuer, toujours écrasé par le fantôme d’un père brutal.

>>> A regarder, quelques extraits du film de Jacques Audiard:

Un second duo, composé d'un chimiste et d'un détective, rejoint les tueurs à gages. Tout ce beau monde se mue en chercheurs d’or, rêvant de richesse mais surtout, d’une autre vie. L’occasion pour Jacques Audiard de filmer une société en pleine transformation où les cowboys commencent même à se brosser les dents.

La parité, c'est 1 égal 1

Au fil de leur épopée, le vieux Far West glisse ainsi de la sauvagerie vers la civilisation et du masculin vers le féminin, même s'il n'y a quasiment pas de femmes dans ce conte philosophique.

A ce sujet justement, on se souvient de l'intervention musclée de Jacques Audiard, lors de la dernière Mostra, contre l'inégalité homme-femme. Au micro de la RTS, le cinéaste revient sur ce coup d'éclat: "Je me suis senti comme le chevalier blanc d'une cause qui ne serait pas la mienne. Je n'ai pas cette générosité-là, je ne suis pas un grand philanthrope mais j'étais las d'entendre toujours les mêmes arguments pour justifier le statu quo. C'est une affaire politique, d'égalité et de justice. Arrêtons de réfléchir sur le sexe des films, cela n'a pas de sens, étudions plutôt les rouages de ce système et penchons-nous sur les chiffres. Vingt contre un, ce n'est pas la parité. La parité, c'est 1 égal 1."

Propos recueillis par Rafael Wolf/mcm

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