Samira Sedira [lerouergue.com]

Samira Sedira : "Majda en août"

Paris-Le Var : retour à la case départ.

Après trois ans de silence, les parents de Majda récupèrent leur fille "à bout de souffle".

Majda a 45 ans, elle n’en fait même pas 30. « Elle ressemble à un cheval miniature ». Majda est hors du temps, hors du monde, hors de sa vie, "toute branchée sur sa misère".

Ce mois d’août-là, Fouzia et Ahmed récupèrent leur fille unique à l’hôpital psychiatrique Guérin. Prostrée dans la chambre bleue. Délirante. Fêlée. Une ombre. Même plus l’ombre d’elle-même!

Et pourtant. Fouzia et Ahmed ont infiniment aimé leur fille, avant de la "désaimer". Malgré eux.

Ahmed n’en peut rien. Il n’avait pas demandé à être nourri de "nectar et d’ambroisie" par la délicate épicière du bled. Catherine Bleuet s’était entichée de lui au premier regard; il n’avait que sept ans. Elle l’avait gâté jusqu’à sa mort - subite - six ans plus tard. Singulier, Ahmed le restera à jamais. Toute sa vie, étranger aux codes de la virilité.

Majda n’en peut rien. Elle n’a pas voulu être fille unique, l’aînée de six frères. Elle n’avait même pas remarqué l’ «explosion de sa féminité», l’année de ses 13 ans. Le début d’un calvaire…

Puis, un instant, suffira. Pour que l’irréparable soit commis. L’indicible. Aussitôt coulé sous une chape de silence. Un instant suffit pour saccager une famille. Pour saccager une vie. A en perdre la raison... "On peut très bien respirer et être morte".

Après "L’odeur des planches", avec une même urgence, de la même écriture serrée, Samira Sedira poursuit une peinture délicate et sensible des maghrébins de France. De cette France parallèle.

Par Marlène Métrailler
Lectures : Barbara Tobola
A lire : Samira Sedira : "Majda en août", Editions Le Rouergue

Une nouvelle diffusion de l'émission du jeudi 24mars 2016
Samira Sedira : "Majda en août"