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Pierluigi Collina: "Les arbitres doivent apprendre à vivre avec la pression"

Pierluigi Collina a officié comme arbitre professionnel entre 1988 et 2005. [Keystone - Axel David]
Pierluigi Collina a officié comme arbitre professionnel entre 1988 et 2005. - [Keystone - Axel David]
Grande figure de l'arbitrage mondial durant une décennie, Pierluigi Collina a dirigé les plus grands joueurs dans les plus grandes compétitions. Responsable en chef de l'arbitrage à l'UEFA depuis 2010, l'ex-directeur de jeu italien a accordé un entretien à RTSsport.ch en marge de l'Euro 2016. Il y évoque sa mission, l'évolution du jeu et la pression qui pèse sur les épaules des "hommes en noir".

RTSsport.ch: Parlez-nous de votre rôle durant l'Euro 2016.

PIERLUIGI COLLINA: Durant toute la compétition, je vis avec les arbitres. Ma tâche est de les préparer, de les soutenir, de choisir qui va arbitrer tel ou tel match. Je regarde leurs performances soit à la télévision soit en direct au stade. Je leur donne un feed-back afin de leur permettre de préparer au mieux le prochain match. Voilà ce que je fais, mais pas seulement durant l'Euro. C'est mon rôle durant toutes les compétitions organisées par l'UEFA.

RTSsport.ch: Votre expérience en tant qu'ancien arbitre constitue-t-elle un plus dans votre fonction?

PIERLUIGI COLLINA: Je pense qu'être spécialiste dans un domaine est quelque chose dont on a besoin. Il est important de savoir de quoi on parle pour être écouté par ses interlocuteurs.

"Le travail de l'arbitre est très difficile aujourd'hui"

RTSsport.ch: Les arbitres subissent une pression de plus en plus importante. Comment pouvez-vous les aider à la gérer?

PIERLUIGI COLLINA: La pression fait partie du travail des arbitres. Ils doivent vivre avec. Leur responsabilité par rapport aux décisions qu'ils prennent lors d'un match est très grande et ils le savent avant. La seule manière pour eux d'accomplir correctement leur mission est de se préparer à cette pression en amont. Si un arbitre sait qu'il est bien préparé à ça et a confiance en lui, cela sera plus facile pour lui de gérer ce travail très difficile qu'est celui d'arbitre de football aujourd'hui.

RTSsport.ch: L'UEFA a adopté la "goal line technology" lors de l'Euro 2016. A quand l'arbitrage vidéo dans son ensemble?

PIERLUIGI COLLINA: L'arbitrage vidéo, par le biais de la "goal line technology" a été introduit depuis 2012 dans certaines compétitions. C'est quelque chose qui aide beaucoup le corps arbitral et lui permet de se concentrer sur d'autres situations qui peuvent encore se produire souvent durant un match. Nous pensons que la "goal line technology" et l'ajout d'un arbitre supplémentaire sont bénéfiques pour avoir un meilleur contrôle de ce qui se passe sur le terrain. La vidéo? L'International Board a décidé en mars dernier de l'expérimenter. Durant les deux années à venir, l'utilisation de la vidéo sera testée dans quelques compétitions pour certains cas précis (réd: buts, cartons rouges, penalties, identification de joueurs). Ces expérimentations feront, bien sûr, l'objet d'un feed-back pour nous permettre de savoir si le système fonctionne ou non. Une fois que ce feed-back aura été rendu, nous pourrons voir quelle sera la prochaine étape. A l'heure actuelle, nous sommes à la phase pré-expérimentale.

"Le jeu a changé. Il va plus vite"

RTSsport.ch: Et qu'en est-il de l'instauration d'exclusions temporaires?

PIERLUIGI COLLINA: C'est une idée que nous avons eue à l'UEFA il y a environ deux ans. Nous l'avions utilisée, et nous l'utilisons encore, dans certaines compétitions dites "de développement". C'est certainement quelque chose qui pourrait être utile pour combattre certains comportements sur le terrain. On voit ce type d'exclusions dans d'autres sports comme le hockey sur glace ou le rugby. Encore une fois, c'est quelque chose qui doit être testé et qui, selon le résultat, peut être poussé plus loin.

RTSsport.ch: Vous avez mis un terme à votre carrière d'arbitre en 2005. Comment jugez-vous l'évolution du jeu ces dix dernières années?

PIERLUIGI COLLINA: Le jeu va plus vite, il est plus intense, tout est plus rapide et ce n'est pas facile pour l'arbitre. Le jeu a changé. Il ne s'est écoulé que dix ans, mais le jeu a changé. Les arbitres doivent travailler plus qu'avant.

"L'erreur est humaine"

RTSsport.ch: D'où l'instauration d'arbitres supplémentaires.

PIERLUIGI COLLINA: Il y a une volonté de contrôler ce qui se passe sur le terrain. Il est normal que cinq ou six arbitres aient un meilleur contrôle que trois ou quatre.

RTSsport.ch: L'erreur est humaine. Ajouter, un 6e, un 7e ou 8e arbitre n'y changera rien.

PIERLUIGI COLLINA: Oui bien sûr, l'erreur est humaine. Sur le terrain, il y a beaucoup d'humains qui peuvent faire des erreurs. Et les arbitres en font partie, au même titre que les joueurs ou les entraîneurs.

Paris, Axel David - @axel_david7

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