Tadej Pogacar historique, Marc Hirschi exemplaire et Silvan Dillier combatif
DILLIER OUVRE LA ROUTE La course s'est élancée tôt dimanche matin dans des conditions radicalement différentes de la veille. Un grand soleil berçait le canton de Zurich, rendant cette course finale des Mondiaux particulièrement agréable malgré les 274 km et 4'500m de dénivelé au programme. De quoi inciter Silvan Dillier à prendre un peu d'avance, comme l'avait annoncé Stefan Küng la veille, ce qui a aussi permis à ses coéquipiers de ne pas avoir à rouler derrière.
L'Argovien de 34 ans est rapidement parti en échappée avec cinq camarades, dont l'Allemand Simon Geschke, qui s'est offert à 38 ans un tour d'honneur, lui qui a disputé à Zurich l'une des dernières épreuves d'une carrière qui l'a notamment vu remporter une étape du Tour de France en 2015. Le groupe a compté 5'35 d'avance au premier passage sur la ligne, que l'Helvète a franchie en tête.
DES ABANDONS DE RENOM Les premières heures de course ont fait quelques dégâts d'importance. Une chute impliquant le Portugais Joao Almeida (qui est reparti avant d'abandonner), l'Espagnol Pello Bilbao et le Français Julian Alaphilippe après 56 km a envoyé l'ancien double champion du monde à l'hôpital, visiblement touché à l'épaule, forçant les Bleus à modifier leur stratégie. Un second incident quelques minutes plus tard a cette fois-ci condamné l'Espagnol Mikel Landa, tandis que le Danois Mattias Skjelmose a également quitté la course suite à des problèmes de dos.
L'AUDACE DE POGACAR Le grain de folie de Tadej Pogacar a encore frappé à Zurich. Capable de tout, le Slovène de 26 ans savait qu'il serait surveillé comme le lait sur le feu dans les 50 derniers kilomètres. Il a donc décidé de prendre ses concurrents à revers à 101 km de l'arrivée en plaçant l'une de ses fameuses attaques tranchantes dont il a le secret.
Il lui a fallu 10 km pour revenir sur le groupe de 15 coureurs qui composait l'échappée, les fuyards initiaux ayant été rejoints par une dizaine d'athlètes, parmi lesquels le Slovène Jan Tratnik, qui a servi de relais pour ramener son leader sur la tête. Ces 17 hommes ont eu une avance d'une minute sur le peloton, avant que celui-ci ne reprenne tout le monde à l'exception de Tadej Pogacar et Pavel Sivakov. Silvan Dillier aura ainsi passé 200 km en tête de course.
"POGI" HISTORIQUE Pavel Sivakov inévitablement lâché, personne n'est finalement parvenu à rattraper Tadej Pogacar. Le Slovène de 26 ans a résisté aux attaques de Toms Skujins et Ben Healy, longtemps intercalés entre "Pogi" et les autres favoris, pour conserver une avance oscillant de 40 secondes à 1'20 sur tous ses poursuivants durant les 100 km qu'aura duré son délirant raid solitaire. Une performance tout simplement exceptionnelle.
J'ai fait une attaque stupide. Je ne sais pas à quoi j’ai pensé quand j’ai attaqué
"C'est incroyable. Je n’arrive pas à croire ce qu’il vient de se passer. Il y avait une échappée dangereuse et j’ai fait une attaque stupide. Je ne sais pas à quoi j’ai pensé quand j’ai attaqué. Heureusement, Jan Tratnik était présent avec moi. Sans lui, je n'aurais jamais réussi à aller au bout", a expliqué le lauréat qui peine visiblement lui-même à comprendre ce qui lui passe parfois par la tête. Chacun est libre d'apprécier ou non Tadej Pogacar, coureur clivant s'il en est. Il n'en reste pas moins que remporter un titre mondial après une échappée solitaire (ou presque) de 100 km est un exploit sensationnel et unique qui restera gravé dans l'histoire du cyclisme.
HIRSCHI A REPONDU PRESENT Marc Hirschi a finalement terminé à la 6e place après avoir absolument tout tenté dans le final. Le Bernois de 26 ans a attaqué dans la dernière montée de la Züribergstrasse, condamnant le duo Ben Healy et Toms Skujins. Il a ensuite continué ses efforts jusqu'au bout, jouant la médaille jusqu'à la ligne. S'il n'a rien pu faire contre l'offensive de l'Australien Ben O'Connor (2e), le coureur helvétique a sprinté pour le bronze, qui est revenu à Mathieu van der Poel. Il n'y avait simplement rien à faire face aux cadors du peloton.
Je savais que ce serait difficile au sprint avec Mathieu van der Poel
"Je me sentais très bien dans le dernier tour. Je savais que ce serait difficile au sprint avec Mathieu van der Poel, c’est pour cela que j’ai essayé d’attaquer. Je suis content de ma performance. Je prends cette 6e place", a expliqué le Bernois, qui ne peut strictement rien se reprocher sur cette course.
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De Zurich, Bastien Trottet