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Lucien Favre, le Suisse qui enchante l'Allemagne

Lucien Favre "Er ist einer wie Guardiola!"
Les éloges pleuvent sur Lucien Favre en Allemagne. Etre comparé à l'entraîneur du FC Barcelone paraît cependant outrancier à ce Romand perçu comme un homme plein de tact et de modestie. Mais pour ce qui est de "murmurer", il sait aussi élever le ton... (fac simile du 25 août 2011/BILD.de!"
Lucien Favre jouit d'un statut particulier en Allemagne. Son sourire et son accent charment le grand public. Sa modestie et sa clairvoyance convainquent les spécialistes. Ses compétences en matières technique et humaine lui valent l'estime de ses dirigeants et de ses joueurs.

Il ne se laisse pas démonter pour autant, sachant les aléas du métier d'entraîneur comme tous les collègues de sa caste. Pourtant, comme dans tous les clubs où il a mis ses pieds, Lucien Favre travaille comme s'il devait y rester toute sa vie.

Lucien Favre n'a cessé de progresser dans sa vie d'homme et dans sa carrière de sportif. A 54 ans (il les fête le 2 novembre), il n'a assurément pas fini d'apprendre. Ni d'étonner. Quand il avait 19 ans, ses interlocuteurs sentaient déjà chez ce jeune talent du Lausanne-Sports cet amour du beau jeu et ils devinaient en lui le futur entraîneur.

Plus qu'une passion, une vocation

Que ce fût comme joueur sur le terrain ou comme professionnel dans la gestion de sa carrière, il était en avance sur son temps, comme il l'est aujourd'hui en matière d'entraînement et de gestion d'une équipe. Il est éducateur dans l'âme. Il repère et forme les talents et bonifie même les joueurs les plus expérimentés.

A 28 ans, après la terrible agression de Gabet Chapusiat, Lucien Favre est revenu au top niveau au Servette FC (1987/88) [SFC]

Même en matière de communication, ses progrès sont flagrants. Lorsque, en 1985, à 28 ans, il était victime de l'agression de Gabet Chapuisat lors d'un Vevey - Servette, il était le premier footballeur à porter un fait sportif devant les tribunaux civils.

Il avait raison sur le fond, mais dans les formes, l'opinion publique - les médias surtout - ne comprenaient pas. Sa carrière était finie, son genou en compote ne laissait plus d'espoir. Mais son professionnalisme, là encore fit la différence.

Favre reviendra à force d'abnégation. De 30 à 34 ans, il distillait à nouveau ses idées claires et ses passes précises au Servette FC. Kalle Rummenigge, l'actuel président du Bayern Munich, en profitait notamment (meilleur buteur suisse 1988/89).

Il faillit aussi découvrir à Genève un gamin de 14 ans, Jari Litmanen (qui y venait régulièrement en vacances chez des parents). Mais les dirigeants servettiens estimaient que ce n'était pas son rôle de découvrir des talents (trois ans plus tard, Xamax laissait aussi échapper ce no 10 de classe)...

Le métier appris sur le bout des doigts

A Yverdon, des bas fonds de la deuxième division jusqu'au surprenant 5e rang dans l'élite, en passant par Servette (une Coupe de Suisse) et le FC Zurich (une Coupe et 2 Championnats), jusqu'au Hertha Berlin (en course pour le titre jusqu'à la dernière journée en 2009, limogé la saison d'après) et aujourd'hui à Borussia Mönchengladbach, il a connu des heures difficiles, dont, à chaque fois, il est sorti grandi.

Ce qui est certain, c'est qu'il a appris son métier sur le bout des doigts. Il connaît les rouages d'un club mieux que personne. Suivez-le à travers les couloirs, bâtiments, départements et sur les installations du club. Lucien Favre appelle chacun par son prénom et connaît sa fonction quelle qu'elle soit.

Autre comparaison que le Suisse n'a pas cherché: celle avec Hennes Weisweiler. Les années 70 (5 titres, 2 Coupes JUEFA) portaient dsa griffe au Borussia des Netzer, Vogts et Bonhof

Le football, chez le citoyen de St-Barthélemy, est plus qu'une passion, une vocation. Il avait débuté avec les plus petits, les juniors C (M14) d'Echallens ("comme assistant de l'entraîneur," tient-il à préciser, faisant, ainsi, également l'éloge de l'entraîneur 

Johnny Bordin

, qui lui avait permis cette entrée en matière).

L'homme qui murmure à l'oreille des footballeurs

Lucien Favre n'est pas un intellectuel, mais un perfectionniste. Il n'est pas un apôtre de la morale, simplement un grand technicien et tacticien, mais toujours à visage humain. Ce qui distingue Lucien Favre est qu'il est capable de faire passer son message a priori compliqué par son langage clair, précis, simple.

"L'homme qui murmure à l'oreille des footballeurs", avait titré un quotidien berlinois en 2008, faisant allusion à Robert Redford, dans le film "L'homme qui murmurait à l'oreille de chevaux".

Le quotidien BILD, le plus fort tirage d'Europe occidentale (près de 4 millions d'exemplaires par jour), va jusqu'à trouver des similitudes entre Pep Guardiola, le mentor du FC Barcelone, et l'entraîneur suisse. Point commun, en tous cas, la modestie qui caractérise leur propre jugement sur le travail qu'ils accomplissent.

Un comme Guardiola?

«Ma qualité est le résultat de l'addition de la qualité de mes joueurs.» Cette phrase, BILD l'avait relevée dans la bouche de Lucien Favre, voici trois ans au Hertha Berlin. Une journée avant la fin du championnat de Bundesliga, les Berlinois caressaient encore l'espoir d'être sacrés champions.

"N'allez pas trop vite en besogne. Je n'aurais pas l'outrecuidance de me comparer à Guardiola", dit Lucien Favre [Keystone]

Le BILD relève que Guardiola a prononcé la phrase, quasi au mot près, après la conquête de la Ligue des Champions 2011 avec le Barça.

L'amour du détail, leur perfectionnisme, le respect porté aux joueurs, bref une même philosophie du jeu semble bel et bien unir ces deux-là (voir aussi le fac simile de l'article du BILD en tête d'article).

Le «SPIEGEL» titrait après le sauvetage de Gladbach en mai, sur le mode de la locution latine de Jules César «veni, vidi, vici»: «Er kam, sah - und rettete!» Il est venu, a vu - et a sauvé! Dans le texte:

«Borussia Mönchengladbach s'est trouvé un héros! Le Suisse a su transformer l'équipe tout en douceur, sans faire de bruit. Voici un entraîneur, qui ne se mêle pas des affaires d'autrui. Ce n'est pas un beau parleur, ni quelqu'un qui parle fort. C'est par son travail méticuleux et ses finesses tactiques qu'il fait la différence

Netzer, et d'autres, l'adorent

Les anciens cracks du club, ceux qui ont enlevé 5 fois le championnat dans les années 70 et remporté deux fois la Coupe de l'UEFA, tels Günter Netzer (le grand stratège), Rainer Bonhof (actuel vice-président du club), Berti Vogts (sélectionneur de l'Azerbaïdjan), Jupp Heynckes (meilleur buteur du club, aujourd'hui entraîneur de Bayern Munich), ou encore Uli Stielike et Allan Simonsen (le Danois devenu 'Ballon d'Or'), tous piliers de l'équipe d'Allemagne des années 70, apprécient à leur juste valeur.

Statistiquement, Lucien Favre fait même mieux que le célèbre Hennes Weisweiler relève-t-on (EXPRESS, Cologne).  Le capitaine belge Filip Daems souligne la «joie de jouer retrouvée» et Marco Reus, éoiule qui se lève, précise que le football prôné par Lucien Favre n'a, contrairement à toutes nos évocations, rien de compliqué: «Il nous a réappris à jouer simplement, a parfois moins réfléchir pour jouer sur notre instinct

Même apprécié au Venezuela

Le petit gaucher Juan Arango explique ailleurs comment Lucien Favre l'a transformé: «Von der launischen Diva zum Spass-Fussballer», de la vedette capricieuse au footballeur plaisir.

Juan Arango, capitaine de l'équipe nationale du Venezuela, a subi une véritable métamorphose. Il l'explique, le 6 septembre dernier, dans BILD [Bild.de]

«Le club ne me voulait plus. J'avais probablement, c'est vrai, des allures de star. Favre n'a pas besoin de beaucoup de mots pour se faire comprendre. Moi, en tous cas, je crois que j'ai compris

Si le Venezuela et son capitaine Arango, normalement 10e et dernière nation de football d'Amérique du sud, se sont qualifiés pour les demi-finales de la Copa America cette année, il y a est aussi pour quelque-chose.

Dans un autre article, le même quotidien de Francfort estime que Favre sert d'exemple pour faire la démonstration de la différence entre un entraîneur «passable» et une sommité.

TSRsport.ch/Edouard Stutz

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