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La Damassine obtient enfin son AOC

La Damassine est obtenue à partir de prunes rouges.
La Damassine est obtenue à partir de prunes rouges.
Plus rien ne s'oppose à ce que la Damassine reçoive son AOC. Lors d'une délibération publique vendredi, le Tribunal fédéral a levé le dernier obstacle à l'inscription de cette eau-de-vie de prunes jurassienne au registre fédéral des Appellations d'origine contrôlée.

Par 3 voix contre 2, les juges de Mon Repos ont donné tort à un
producteur du Landeron (NE). Celui-ci contestait l'AOC accordée à
la Damassine en 2007 par l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG)
aux seuls producteurs du canton du Jura.



Saisi du litige, le Tribunal administratif fédéral avait confirmé
la décision de l'office, jugeant que cette eau-de-vie a développé
des caractéristiques intimement liées au terroir jurassien. Hostile
à cette décision, le producteur avait alors fait recours au TF. Il
estimait que la Damassine est un nom de fruit et qu'en tant que tel
il appartient à tout le monde.

Débat engagé

De son propre aveu, la délibération publique a été provoquée par
la juge jurassienne Florence Aubry Girardin. Le juge rapporteur, le
Valaisan Peter Karlen, proposait à l'origine d'accepter le recours
d'un agriculteur bernois possédant un verger dans le canton de
Neuchâtel. Ce dernier contestait notamment l'aire géographique de
l'Appellation d'origine contrôlée Damassine au seul canton du
Jura.



Le sang de Florence Aubry Girardin n'a fait qu'un tour. Durant la
délibération, le juge Karlen a proposé de renvoyer le dossier à
l'Office fédéral de l'agriculture, pour qu'il examine "plus en
détail" la question géographique, arguant que l'on trouve aussi des
damassiniers dans les cantons de Berne et de Neuchâtel. Il était
appuyé par le Bernois Thomas Merckli, qui estimait qu'"on ne peut
pas monopoliser une dénomination et empêcher les autres de s'en
prévaloir".



La question, ce n'est pas seulement de savoir où poussent les
arbres, mais celle d'un savoir-faire humain lié à un terroir, ont
rétorqué Florence Aubry Girardin et le Valaisan Yves Donzallaz,
relevant au passage "des sensibilités régionales différentes" sur
ce point. Les deux Romands se sont livrés à une véritable défense
et illustration des Appellations d'origines protégées.

Un savoir-faire unique

Le débat ne s'est toutefois pas réduit à un affrontement entre
Alémaniques et Romands. Car c'est l'Argovien Robert Müller, qui
présidait la séance, qui a fait pencher la balance en faveur de
l'AOC. Même s'il y a des damassiniers ailleurs qu'au Jura, il
n'existe aucune preuve d'un savoir-faire similaire à celui de ce
canton, ni d'une production commerciale établie, a-t-il fait
valoir.



Ce n'est pas parce que certains font de l'eau-de-vie avec leurs
abricots qu'ils exigent l'appellation Abricotine, réservée aux
producteurs valaisans, a relevé le juge Müller. "Cette procédure
des Appellations d'origine protégée est assez compliquée, il faut
bien une fois que cela ait une fin", a-t-il conclu.



ats/bkel

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Le sourire des uns, la grimace des autres

Les représentants de l'Association interprofessionnelle de la Damassine (AID) arboraient un large sourire, vendredi au Tribunal fédéral. Ils sortaient de la délibération publique qui a vu les juges de Mon Repos octroyer l'AOC à l'eau-de-vie jurassienne.

"C'est un soulagement", a indiqué à l'ATS le président de l'AID Michel Juillard. Pour celui qui préside par ailleurs le Parlement jurassien, "c'est d'abord la reconnaissance d'un combat juste." Et une promesse d'avenir pour les vergers et l'agriculture du canton. Et de se réjouir des "possibilités de développement touristique" qu'offre l'obtention de l'AOC.

La plupart des producteurs de "ce produit typiquement jurassien" respectent déjà le cahier des charges de l'Appellation d'origine contrôlée (AOC), explique Michel Juillard, depuis qu'elle a été octroyée par l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) en 2007. Ces producteurs peuvent commercialiser leur Damassine avec le label AOC, selon lui. La prochaine étape sera de faire appliquer le cahier des charges par tous les acteurs sans exception.

Pour le recourant débouté, à l'inverse, c'est l'incompréhension. Jean-Pierre Mürset, patron de la société Grillette, qui possède un verger au Landeron (NE), s'est dit "sidéré" par la décision des juges. Ce jugement est une perte pour la culture de la Damassine, a-t-il déclaré.

Du côté de l'OFAG, la juriste Isabelle Pasche se refuse à tout commentaire. "Nous attendons la décision écrite", a-t-elle lâché. La délégation arborait une mine réjouie, a constaté l'ATS.