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"Amateurisme" de la Confédération dénoncé dans l'affaire de l'espion suisse présumé

Le Palais fédéral, à Berne. [Keystone - Peter Klaunzer]
Des voix s'élèvent pour demander une enquête sur l'espion suisse arrêté en Allemagne / Le Journal du matin / 4 min. / le 12 mai 2017
Plusieurs erreurs ont été commises par le Service de renseignement de la Confédération, le Ministère public de la Confédération et le Conseil fédéral dans l'affaire de l'espion suisse présumé, révèle une enquête de la RTS.

Il est difficile de faire pire pour une opération d'espionnage, estiment plusieurs sources sécuritaires et politiques qui se sont confiées à la RTS et qui dénoncent "l'amateurisme" des services de la Confédération dans cette affaire.

Il semblerait que trois erreurs ont été commises tour à tour par le Service de renseignement de la Confédération (SRC), le Ministère public de la Confédération (MPC) et le Conseil fédéral lui-même. Ces fautes contreviennent à la raison d'Etat, soit ne jamais laisser de traces et ne jamais reconnaître son implication.

Or, depuis deux semaines, les révélations se succèdent sur ce qui est devenu "l’affaire Daniel M.", du nom de cet ancien policier zurichois mandaté par le SRC. Celui-ci avait comme mission d’espionner le fisc allemand qui a acheté des CD de données bancaires volées en Suisse.

"Ne jamais traiter directement avec un espion"

La première erreur appartient au SRC, qui n’aurait jamais dû traiter en direct avec Daniel M., indique un ancien espion. Celui-ci précise que ce type de transactions passe généralement à travers plusieurs intermédiaires, tels que des avocats d’affaires.

Mais dans le cas de Daniel M., l'espion présumé a pu donner jusqu’aux prénoms de ses répondants au sein du SRC, y compris le directeur adjoint du service.

Détails d'une mission secrète livrés à l'Allemagne

Daniel M. a été piégé et arrêté par le Ministère public de la Confédération dans une autre affaire. Pour sa défense, il a livré tous les détails de sa mission secrète. Puis, un autre prévenu allemand impliqué dans cette même affaire a demandé d'avoir accès à une copie du procès-verbal de l'audition de Daniel M. Le MPC a accédé à sa demande. Et c'est ensuite cet homme qui a livré le dossier à la justice allemande.

Dans cette affaire, le Ministère public se mure dans le silence, sauf sur un point: il fait savoir qu’il n’avait légalement pas la possibilité de caviarder le dossier pénal de Daniel M. quand il a été exigé par le prévenu allemand.

Ueli Maurer était au courant de l'affaire

Interrogés la semaine dernière par la RTS, les services du conseiller fédéral Ueli Maurer, aujourd'hui en charge des Finances fédérales, ont confirmé que lorsqu'il était à la tête du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS), le conseiller fédéral avait connaissance du cas.

>> Lire aussi : Ueli Maurer avait connaissance du cas de l'espion suisse en Allemagne

Les commissions de gestion du Parlement et l’autorité de surveillance du MPC ont promis d’enquêter sur cette affaire qui remonte à 2011.

Pour rappel, la Suisse et l'Allemagne viennent de signer un pacte de non-agression pour cesser de s’espionner entre pays voisins et amis.

>> Lire aussi : La Suisse et l'Allemagne ont promis de ne plus s'espionner

>> L'analyse de Christian Aghroum, conseiller en cybersécurité :

Christian Aghroum. [YouTube - BPI]
L'invité de la rédaction - Christian Aghroum, conseiller en cybersécurité / Le Journal du matin / 22 min. / le 12 mai 2017

Ludovic Rocchi/hend

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