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"Industrie" ou "forme d'humanité"? UDC et PLR débattent de l'asile

Le conseiller d'Etat genevois Pierre Maudet (PLR) et le conseiller national Roger Köppel (UDC-ZH). [Keystone - Martial Trezzini/Peter Schneider]
Le conseiller d'Etat genevois Pierre Maudet (PLR) et le conseiller national Roger Köppel (UDC-ZH). - [Keystone - Martial Trezzini/Peter Schneider]
"Accélérer les procédures, c'est une forme d'humanité", telle a été la réponse du conseiller d'Etat genevois Pierre Maudet face à l'UDC zurichois Roger Köppel qui a dit redouter la création d'une "industrie de l'asile" mardi sur La Première.

Dans un débat spécial, organisé un mois avant la votation de la loi sur l'asile le 5 juin, les deux politiciens ont confronté leurs vues sur la réforme portée par la conseillère fédérale à la tête du Département de Justice et Police, Simonetta Sommaruga.

L'objectif, défendu par la Confédération, est de faire passer la durée maximale des procédures simples à 140 jours et de réduire les coûts.

>> Lire : Les Suisses votent sur des procédures d'asile accélérées

Des procédures plus rapides

"Cette réforme va augmenter l'attractivité de la Suisse", a déclaré d'emblée le conseiller national zurichois Roger Köppel, opposé à la réforme. Et d'ajouter: "Je ne connais pas d'avocat qui fasse accélérer une procédure".

Cette réforme va augmenter l'attractivité de la Suisse

Roger Köppel, conseiller national (UDC/ZH)

"Si j'étais un électeur UDC, je m'empresserais de voter oui", a répondu le PLR Pierre Maudet chargé de la politique de sécurité à Genève. Et de pointer du doigt le parti dont l'argument principal était, pendant des années, de critiquer la lenteur des procédures en matière d'asile.

Les renvois en question

"Le système de renvoi ne fonctionne pas, et nous ne sommes pas pour l'accélération des entrées", a aussitôt dénoncé Roger Köppel. Reprochant à la réforme de reposer "sur des chiffres du passé", il a rappelé que les centres prévus par la Confédération comptaient 24'000 places alors que l'an passé, on était à 40'000 nouveaux requérants". Et de s'inquiéter des expropriations qu'autorisera la nouvelle loi.

Craignant que la réforme ne crée "une culture de bienvenue", en proposant des centres d'accueil centralisés et une aide juridique, l'UDC continue à prôner le retour aux contrôles systématiques aux frontières. "Nous sommes pour augmenter l'aide aux réfugiés dans des régions de crise et le renvoi des gens vers l'Italie ou là où ils doivent s'enregistrer en vertu de l'accord de Dublin", a encore rappelé Roger Köppel.

Gérer les flux

Qu'un UDC, traditionnellement opposé à tout accord européen, se retranche derrière un tel texte, n'a pas manqué d'amuser le PLR Pierre Maudet. "Vous avez des idées arrêtées dans les années 1980", a-t-il taclé. "Aujourd'hui, l'asile n'est plus un stock de personnes, il s'agit maintenant d'un flux".

Aujourd'hui, l'asile n'est plus un stock de personnes

Pierre Maudet, conseiller d'Etat genevois

Or, "si on accélère les procédures, de l'entrée au renvoi, on est plus à même de gérer les flux et d'absorber plus de monde", a défendu le Genevois face à un Roger Köppel qui clamait que la réforme ne prévoyait rien contre les abus.

Eviter les abus

"Comment lutter contre les abus? En identifiant ceux qui abusent et en travaillant pour l'intégration", a fait valoir Pierre Maudet. Et selon lui, aller plus vite dans les procédures évite aussi de créer des situations complexes.

"Quand une procédure prend trop de temps, les gens s'installent, fondent une famille, et cela complique les renvois. Si on va plus vite, on facilite les choses", a-t-il souligné, fort de l'expérience de plusieurs cas récents de renvois difficiles à Genève.

Juliette Galeazzi avec Eric Butticaz

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La moitié des requérants déboutés dans la nature?

Dans le cadre du débat, Roger Köppel a affirmé que 51% des réfugiés déboutés accueillis dans le centre test de procédure d'asile de Zurich avaient disparu dans la nature.

Après vérification, la RTS peut confirmer cette proportion et même préciser que le chiffre exact des personnes qui ont quitté le centre et dont le départ n'a pas été contrôlé est de de 53%.

Mais tous ne sont pas devenus clandestins en Suisse. Selon certains chiffres disponibles, il s'avère que l'Etat ne sait pas où se trouvent 71% des personnes qui ont fait l'objet d'une procédure nationale refusée.

4% ont été retrouvés en Suisse. Une partie d'entre eux ont quitté le territoire, l'autre partie fait l'objet d'une exécution de renvoi.

Parmi les 25% restants, certains ont déposé une demande dans un autre pays européen, ce qui signifie qu'ils ont quitté la Suisse.

>> Ecouter l'enquête de Muriel Ballaman dans l'émission Forum: