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Vingt ans plus tard, les Suisses ne regrettent pas le non à l'EEE

20 ans après le refus de l'Espace économique européen (EEE).
20 ans après le refus de l'Espace économique européen (EEE).
Vingt ans après avoir refusé l'adhésion à l'Espace économique européen (EEE), les Suisses plébiscitent la voie bilatérale, révèle un sondage SSR publié vendredi. Plus étonnant, les Romands sont plus nombreux que les Alémaniques à penser que le non du 6 décembre 1992 était la bonne décision pour la Suisse.

Le 6 décembre 1992, le peuple suisse refusait l'adhésion à l'Espace économique européen (EEE) au terme d'une campagne passionnée. Vingt ans plus tard, la SSR a commandé un sondage auprès de l'institut gfs.bern pour connaître le point de vue des Suisses sur le dossier européen, toujours d'actualité.

Un non à l'UE majoritaire

Alors qu'à l'époque le non l'avait emporté d'extrême justesse, 54% des sondés considèrent aujourd'hui que le refus d'adhérer à l'EEE était une bonne décision pour la Suisse. A l'inverse, seulement 23% des personnes interrogées jugent rétrospectivement que la décision était mauvaise. Les indécis forment 14%, tandis que 9% ne se prononcent pas.

Etonnamment, les Romands - qui avaient soutenu l'adhésion en 1992 - sont plus nombreux à estimer que la majorité a eu raison de dire non: 62% d'entre eux soutiennent le choix du souverain, contre 52% des Alémaniques et 58% des italophones.

Favorables à l'adhésion en 1992, les électeurs du PLR (52%, +14%) et du PDC (51%, +4%) ont changé d'avis et pensent désormais que les Suisses ont eu raison de s'opposer à une entrée dans l'EEE. Même tendance chez les sympathisants socialistes (41%, +10%), même si l'euroscepticisme n'est pas encore majoritaire.

La campagne sur l'EEE avait déchaîné les passions en Suisse en 1992. [Str]

Accords bilatéraux plébiscités

La voie bilatérale, qui caractérise la politique européenne de la Suisse depuis plus de 10 ans, est soutenue par une nette majorité des Suisses, selon le sondage. Ainsi, 62% des sondés estiment que l'adoption des accords bilatéraux était une bonne chose pour le pays, alors que 17% pensent le contraire.

Par rapport aux résultats de la première votation sur le sujet le 21 mai 2000, ce soutien s'érode quelque peu chez les partisans de tous les grands partis helvétiques, en particulier chez les socialistes (76%, -17%). Une seule exception: les électeurs de l'UDC, qui sont désormais 40% à penser que la voie bilatérale bénéficie à la Suisse (+16%).

Au niveau des régions linguistiques, Suisses alémaniques et Suisses romands estiment que le oui aux accords bilatéraux était une bonne décision. Les Tessinois, en revanche, sont beaucoup plus divisés: 43% d'entre eux se disent aujourd'hui satisfaits du résultat de la votation de 2000, tandis que 33% le regrettent.

Didier Burkhalter estime qu'une adhésion de la Suisse à l'EEE n'est pas une option réaliste. [Peter Schneider]

La libre circulation des personnes divise

Selon le sondage SSR, 60% des Suisses soutiennent la libre circulation des personnes avec l'Union européenne (UE), acceptée deux fois dans les urnes. Toutefois, une large majorité des sondés (82%) pense qu'il faut améliorer les mesures d'accompagnement pour prévenir le dumping salarial.

Pour prospérer, l'économie suisse a besoin de la main-d'oeuvre venue de l'UE, jugent 70% des personnes interrogées. Revers de la médaille, l'afflux de travailleurs étrangers est en partie responsable de la hausse des loyers et des prix de l'immobilier, selon 62% des sondés.

Sans surprise, les électeurs de l'UDC restent fermement opposés à la libre circulation des personnes (72%). L'opinion opposée est partagée par la majorité des sympathisants de chacun des autres grands partis (80% pour le PS, 75% pour le PLR, 73% pour les Verts et 64% pour le PDC).

Les opinions se rejoignent toutefois sur l'activation de la clause de sauvegarde, décidée en avril dernier par le gouvernement. Cette mesure, qui permet la réintroduction temporaire de contingents de personnes venues de l'Europe de l'Est, est défendue par une grande majorité de la population (74%).

Didier Kottelat

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La voie bilatérale, seule solution d'avenir

En ce qui concerne l'avenir de la politique européenne de la Suisse, l'option la plus populaire, et de loin, est la poursuite de la voie bilatérale. Pas moins de 63% des sondés plébiscitent de continuer dans cette direction.

Alors que le président du PDC Christophe Darbellay s'est prononcé mercredi en faveur d'un nouveau vote sur l'adhésion de la Suisse à l'EEE, cette voie semble sans issue. Seuls 11% la privilégient, selon le sondage SSR.

10% des sondés désirent quant à eux abandonner la voie bilatérale, tandis que 6% se disent en faveur d'une adhésion de la Suisse à l'Union européenne (UE).

L'adhésion à l'EEE pas réaliste, selon le Conseil fédéral

L'adhésion à l'EEE n'est pas une voie très réaliste, a indiqué Didier Burkhalter vendredi à Berne, peu avant la publication du sondage SSR. Le ministres des affaires étrangères a vanté les mérites de la poursuite de la voie bilatérale, alors que celle-ci est actuellement bloquée par Bruxelles.

Notant une grande fébrilité en Suisse dans le domaine européen, le conseiller fédéral a tenu à souligner les inconvénients d'une adhésion à l'Espace économique européen (EEE): elle impliquerait une reprise de l'acquis communautaire intense et complète dans toute une série de domaines, sans donner la possibilité de codécision.

Cette reprise automatique du droit européen divise d'ailleurs fortement l'opinion. Selon le sondage SSR, 43% des Suisses y sont favorables, tandis que 41% y sont opposés.

Sur ce thème, on retrouve par ailleurs les mêmes lignes de fracture que lors de la votation de 1992: polarisation entre l'UDC et les autres grands partis, opposition entre villes et campagne, entre les régions linguistiques, entre les classes d'âge et entre les personnes selon leur niveau d'éducation.

Le sondage gfs.bern pour SRG SSR

Le sondage gfs.bern a été réalisé par téléphone entre le 16 et le 23 novembre, auprès d'un échantillon de 1206 personnes (702 personnes en Suisse alémanique, 304 en Suisse romande et 200 en Suisse italienne).

La marge d'erreur s'élève à +/- 2,9%.