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Cancer: risque égal en naissant près d'une centrale

Les chercheurs de l'Université de Berne se sont penchés sur les cas de cancers diagnostiqués chez tous les enfants nés en Suisse entre 1985 et 2009, soit plus d'1,3 million. [Tatyana Zenkovich]
Les chercheurs de l'Université de Berne se sont penchés sur les cas de cancers diagnostiqués chez tous les enfants nés en Suisse entre 1985 et 2009, soit plus d'1,3 million. - [Tatyana Zenkovich]
Les enfants nés ou domiciliés près des centrales nucléaires en Suisse n'ont pas plus de risque de développer un cancer, selon des chercheurs bernois. Ces résultats contredisent une étude allemande de 2007 qui démontrait un risque de leucémie deux fois plus grand.

Les scientifiques ne peuvent toutefois pas exclure un lien. L'étude bernoise a été publiée mardi dans la revue scientifique britannique "International Journal of Epidemiology".

Menée entre septembre 2008 et décembre 2010, elle a été commandée par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) et la Ligue suisse contre le cancer en raison des craintes suscitées par les résultats allemands.

Les chercheurs de l'Institut de médecine sociale et préventive (ISPM) de l'Université de Berne se sont penchés sur les cas de cancers diagnostiqués chez tous les enfants nés en Suisse entre 1985 et 2009, soit plus d'1,3 million. Ils ont comparé le risque auprès des enfants nés ou habitant dans un périmètres de 15 km autour des centrales nucléaires et chez ceux qui ont vu le jour ou sont domiciliés plus loin.

Leucémies

Pour l'ensemble des 4090 cancers recensés chez les moins de quinze ans, le risque pour les jeunes résidant dans une zone de 0-5 km (50 cas) est 3% plus grand par rapport à ceux qui vivent loin des centrales (3685). Avec 133 cas, il est 8% moins élevé pour les enfants établis dans un rayon de 5-10 km et 14% plus haut (222 cas) dans un rayon de 10-15 km, lit-on dans l'étude.

Les chercheurs se sont particulièrement intéressés aux enfants de moins de cinq ans, plus sensibles aux radiations que les adultes. Sur 573 leucémies (type de cancer le plus fréquent à cet âge), huit cas ont été détectés chez les enfants nés dans un rayon de 5 km, soit un risque 20% plus élevé par rapport aux enfants qui ont vu le jour loin des centrales (522).

Différences dues au hasard

Dans un périmètre de 5 à 10 km, le risque de leucémie (12 cas) est en revanche 40% plus bas par rapport aux enfants nés à plus de 15 km. Dans un rayon de 10 à 15 km (31 cas), les chercheurs ont noté une faible augmentation du risque de 10%. L'étude ne montre pas de lien entre le risque de cancer et la proximité d'une centrale nucléaire.

Les différences entre les risques constatés dans les différentes régions sont si minimes qu'elles sont probablement dues au hasard, a estimé Matthias Egger, directeur de l'ISPM, devant les médias à Berne. Ces résultats ne prouvent toutefois pas que les centrales n'augmentent pas le risque de leucémie, a-t-il souligné. En raison du faible nombre de cas de cancer, l'incertitude statistique est relativement importante, a-t-il admis.

Seul 1% de la population suisse vit dans un rayon de 5 km autour des centrales et 10% à moins de 15 km. Comme dans d'autres pays Ces résultats sont proches de ceux constatés aux Etats-Unis, en Suède et en Angleterre, notamment, a relevé Claudia Kuehni, cheffe du registre suisse du cancer de l'enfant à l'ISPM.

Contrairement à l'étude allemande, les chercheurs bernois ont comparé le nombre de cas près des centrales à l'ensemble des enfants en Suisse. Ils ont aussi pris en considération le lieu de résidence à la naissance en plus du domicile au moment de la maladie. Et ils ont tenu compte de facteurs comme les lignes à haute tension.

Par contre, ils n'ont pas recensé les femmes enceintes ayant passé leur grossesse à proximité des centrales. Ce type de données est impossible à obtenir en Suisse, a expliqué Claudia Kuehni.

ats/olhor

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Office fédéral de la santé soulagé

L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) se dit soulagé des résultats de l'étude qu'il a commandée. Mais il va continuer à surveiller la radioactivité. Chef de la division radioprotection de l'OFSP, Werner Zeller estime que l'étude apporte "un certain soulagement". "Nous disposons désormais de chiffres précis sur le nombre d'enfants malades", a-t-il dit.

L'OFSP va toutefois rester attentif à la radioactivité, notamment aux abords des centrales. L'étude a coûté 820'000 francs, payés par la ligue suisse contre le cancer et par l'OFSP. Deux exploitants de centrales, Axpo et FMB, ont participé à hauteur de 100'000 francs chacun au financement de l'OFSP. Le Conseil fédéral avait accepté de commander cette étude à condition que les organisations intéressées participent aussi à ses coûts, a rappelé Werner Zeller.

L'autre solution aurait été de faire payer l'entier des frais aux contribuables, a-t-il justifié. L'Université de Berne n'a pas touché d'argent des exploitants des centrales. Et ces derniers ont pris connaissance des résultats en même temps que le public.