Le Tessin a connu un boom touristique impressionnant pendant la pandémie. En 2021, le nombre de nuitées dans les hôtels du canton a connu une hausse de plus de 50% par rapport à l'année précédente. Avec près de trois millions de nuitées, les niveaux pré-Covid ont été largement dépassés.
Cette explosion du nombre de nuitées s'explique surtout par un afflux de touristes suisses. Habitués des lieux, les hôtes alémaniques ont été rejoints par une nouvelle clientèle - beaucoup de Romands et des jeunes - empêchée de se rendre à l'étranger en raison des restrictions sanitaires.
Mais depuis la réouverture quasi complète des frontières ce printemps, le nombre de nuitées repart à la baisse. Pour cet été, la chute devrait être de 25% par rapport à 2021, selon les projections de l'institut BAK Economics. Le tourisme tessinois est en pleine mutation et les acteurs réfléchissent à de nouvelles offres.
Dans le Val Verzasca, le revers de la médaille
A Ascona, fleuron du tourisme tessinois au bord du lac Majeur, les hôtels n'affichent plus complets. Des commerçants regrettent le boom de l'an passé, à l'instar d'Elisena Candeloro. Cette gérante de bar estime que le secteur doit se réinventer: "Il faut proposer quelque chose de nouveau, sinon les gens s'ennuient. Si on offre plus d'événements pour les jeunes, les touristes suisses vont sûrement revenir."
Dans le Val Verzasca, le boom touristique a débuté avant le Covid. Mais pendant la pandémie, cet endroit, surnommé "les Maldives du Tessin", a été véritablement pris d'assaut. Ce succès provoque aussi des nuisances, notamment en termes de trafic le long des petites routes sinueuses de la vallée.
Pour les autorités communales, la situation est devenue intolérable. Elles ont interpellé le canton pour freiner le flot de voitures. La piste d'une vignette est, par exemple, évoquée. Plus généralement, le syndic Ivo Bordoli déplore un tourisme de passage "qui ne laisse rien". "Nous aurions besoin de touristes qui consomment dans les restaurants ou qui passent quelques nuits ici", relève-t-il.
La détox numérique, nouvelle offre de niche
Pour diversifier son secteur touristique, le Tessin se profile aussi avec de nouvelles offres de niche comme la détox numérique. Dans le Val Bavona, dans l'ouest du canton, on remonte 500 ans en arrière: un paysage de granit, des hameaux typiques, pas d'électricité. Devenue un gigantesque musée à ciel ouvert, cette vallée alpine attire des touristes à la recherche d'un monde perdu.
Cette stratégie ne fait pas l'unanimité parmi les habitants du Val Bavona. Ecrivain et restaurateur à Foroglio, Martino Giovanettina plaide pour un développement de l'offre touristique. "Quand on plonge dans le passé, c'est aussi dangereux", estime-t-il. "Ce danger de la muséification, à long terme, ça signifie la mort de la montagne."
Entre choyer les habitués, fidéliser les touristes venus grâce à la pandémie et cibler de nouveaux clients, le Tessin cherche le bon accord.