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Karin Keller-Sutter: "Nous n'avons pas de plafond" pour l'accueil des réfugiés d'Ukraine

Interview de Karin Keller-Sutter
Interview de Karin Keller-Sutter / Mise au point / 10 min. / le 10 avril 2022
Alors que la guerre en Ukraine pose des défis importants à la Suisse, notamment en matière d'accueil des réfugiés, la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter, en première ligne sur ce dossier, a reçu l'émission Mise au Point chez elle pour un entretien. Elle y affirme que la Suisse n'imposera "pas de plafond" maximal pour les déplacés d'Ukraine.

En Suisse, près de 25'000 statuts de protection S ont déjà été délivrés à des réfugiés ukrainiens. Si elle reconnaît que la vague migratoire causée par la guerre représente un défi considérable pour la Confédération, Karin Keller-Sutter a également indiqué qu'il n'y a pas de plafond maximal prévu pour les déplacés d'Ukraine, lors d'un entretien dimanche dans l'émission Mise au Point de la RTS.

"Je vois mal comment la Suisse pourrait refuser des femmes et des enfants à ses frontières. Il faut se préparer, et je crois que tout le monde est prêt", a déclaré la conseillère fédérale en charge du Département fédéral de justice et police (DFJP), qui souligne néanmoins qu'il s'agit d'une "tâche très complexe", notamment à cause du fédéralisme. "Mais si chacun prend vraiment sa responsabilité et s'efforce de faire de son mieux, je crois qu'on arrivera à maîtriser la situation", a-t-elle ajouté.

Pour cela, les cantons doivent travailler ensemble et éviter de se critiquer publiquement, estime Karin Keller-Sutter: "Ça ne fait pas bonne impression et ça n'intéresse pas la population, qui attend de nous que nous fassions notre travail en toute sérénité. C'est ce que j'essaie de faire. Pendant la crise Covid, il y a eu des reproches mutuels et je ne voudrais pas que ça arrive ici."

Enquête à mener rapidement

Cette semaine, plusieurs membres du Conseil fédéral se sont exprimés dans la presse sur l'Ukraine, à titre individuel, en livrant parfois des analyses contradictoires, notamment sur la notion de "crimes de guerre". Karin Keller-Sutter y a fait mention en évoquant les massacres commis dans la ville de Boutcha, pour lesquels elles s'est dite horrifiée.

La Saint-Galloise estime qu'une enquête internationale doit être menée rapidement sur la situation en Ukraine. Et la Suisse peut aussi avoir son rôle à jouer, notamment auprès des réfugiés. "Les personnes qui s'adressent aux centres d'asile de la Confédération pour obtenir le statut S ont la possibilité, s'ils ont été témoins de crimes de guerre, de faire un témoignage, de remplir un formulaire", a expliqué la conseillère fédérale. Cela pourra ainsi permettre de récolter des preuves pour d'éventuelles investigations internationales.

Un engagement qui dépasse la politique

Karin Keller-Sutter est particulièrement engagée dans le dossier ukrainien. "C'est une conviction profonde de vraiment vouloir soutenir ce peuple. 80% des réfugiés sont des femmes qui quittent leur pays parce qu'elles veulent protéger leurs enfants. Je crois que c'est notre tâche de leur donner la protection nécessaire", a-t-elle déclaré.

Il y a 4,6 millions de réfugiés ukrainiens qui ont quitté leur pays en cinq semaines. C'est une ampleur historique.

Karin Keller-Sutter, conseillère fédérale en charge du Département de justice et police

La proximité du conflit est aussi relevée par l'élue PLR, alors que des critiques sur les différences de traitement entre les réfugiés ukrainiens et ceux d'autres nationalités se font de plus en plus entendre. "L'Ukraine, c'est la porte d'à côté. Entre Saint-Gall et Kiev, il y a peut-être 20 heures de voiture", a argumenté la ministre. Ça ne veut pas dire que les autres crises ne sont pas aussi graves, mais là, il y a 4,6 millions de réfugiés ukrainiens qui ont quitté leur pays en cinq semaines. C'est incroyable. C'est une ampleur historique."

>> Lire : Les différences de traitement entre les réfugiés ukrainiens et les autres interrogent

La Saint-Galloise se défend toutefois de tout projet électoral calculé dans la gestion de ce dossier, à une année des élections fédérales. "J'ai toujours été quelqu'un qui suit ses convictions. Parfois, il y a des décisions du Conseil fédéral ou du Parlement qu'il faut respecter. Mais j'ai quand même une orientation dans la tête, j'ai un système de valeurs que je suis et je le fais, que ça plaise ou pas."

Propos recueillis par Nathalie Ducommun

Adaptation web: Isabel Ares

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