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Une interdiction totale de la publicité pour le tabac serait nuisible, selon ses opposants

Des cigarettes. [Keystone - Stefan Meyer]
Une interdiction totale de la publicité pour le tabac serait nuisible, dénoncent ses opposants / Le 12h30 / 1 min. / le 6 janvier 2022
L'initiative sur le tabac, soumise au peuple le 13 février, engendrerait dans les faits une "interdiction totale" de la publicité. Un comité bourgeois a dénoncé jeudi une atteinte aux libertés et une menace pour l'économie. Le comité d'initiative estime lui que le contre-projet indirect proposé n'aura pas les effets escomptés.

Déposée en 2019, l'initiative veut interdire toute publicité pour le tabac qui atteint les enfants et les jeunes. Pour une alliance bourgeoise, le texte est trop restrictif.

Les lieux et les médias réservés aux adultes sont peu nombreux, a souligné Philipp Kutter (Centre/ZH) lors d'une conférence de presse à Berne. Dans la pratique, cela reviendrait à une interdiction totale. "C'est une atteinte disproportionnée aux libertés économique et d'information garanties par la Constitution."

La liberté de choix des consommateurs serait grandement restreinte, a complété Damien Cottier (PLR/NE). "La publicité leur permet de choisir leur produit, notamment des produits innovants, comme le tabac chauffé dont la nocivité semble moindre." Elle les informe sur les produits, leurs caractéristiques, leur nocivité, a ajouté Mike Egger (UDC/SG). Elle constitue une aide à la décision.

"Une vision infantilisante des consommateurs"

Non-fumeurs, les deux députés ne tiennent pas pour autant à imposer leur mode de vie aux autres. Si le tabac est un produit nocif, il est aussi légal. "Chaque citoyen adulte est libre de choisir de fumer ou pas", a pointé le Neuchâtelois.

L'initiative porte une vision infantilisante des consommateurs et des consommatrices, ont-ils dénoncé. "Elle suggère que l'État est indispensable pour ramener les gens à la raison", a précisé le St-Gallois. "La responsabilité individuelle n'a tout simplement pas de place. Or, chacun est responsable de sa santé et des produits qu'il consomme."

La mesure créerait un dangereux précédent, a-t-il poursuivi. D'autres publicités pourraient être interdites, comme celles pour le fromage, les chips, les confiseries ou autres produits accusés d'être trop gras ou trop sucrés.

Mesure inefficace dénoncée

Damien Cottier a encore estimé une telle politique nuisible à l'économie. La publicité est une source de revenus non négligeable pour les médias, les milieux culturels et les petits commerces. "Directement ou indirectement, nous parlons de plus de 11'000 emplois, qui génèrent une valeur ajoutée de plus de 6 milliards de francs par an."

Pas question de les mettre en danger pour une mesure inefficace. L'Italie, la France ou encore l'Autriche disposent de législations plus strictes, a rappelé le président de l'Union neuchâteloise des arts et métiers. Or, les taux de fumeurs y sont similaires, voire légèrement supérieurs à celui de la Suisse.

Selon ce comité, le contre-projet indirect concocté par le Parlement est plus approprié. Il interdit la vente de tabac aux mineurs et la publicité sur les affiches, dans les cinémas, sur les terrains de sport, dans les transports et les bâtiments publics. Le parrainage d'événements internationaux et de manifestations destinées aux jeunes est également interdit.

ats/boi

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Contre-projet "inutile" pour les initiants

Pour le comité d'initiative, en revanche, de nombreuses mesures du contre-projet indirect, comme l'interdiction de la publicité sur les affiches et dans les cinémas, sont déjà largement mises en oeuvre au niveau cantonal. Celui-ci serait donc en grande partie inutile.

D'autant que la révision de loi autorise toujours la publicité dans les journaux gratuits, sur Internet, et donc sur les réseaux sociaux, ainsi que dans les festivals, poursuit-il. Autant de médias, de plateformes et d'espaces accessibles aux jeunes.

Eviter le tabagisme précoce

La publicité continuera donc à les atteindre. Or, la majorité des fumeurs ont tiré leurs premières cigarettes avant 18 ans, rappellent les organisations de santé, les associations de jeunesse et les fédérations sportives à l'origine du texte. Et le tabagisme précoce augmente la probabilité d'une dépendance à long terme, de la maladie et de la mort.

Le comité d'initiative appelle donc à ne pas placer les intérêts de l'industrie du tabac et des publicitaires au-dessus du bien-être des enfants et des adolescents. Une limitation de la publicité peut réduire de manière significative la consommation de tabac, comme l'ont démontré les expériences dans les autres pays.