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Daniel Curnier: "Il n'y a pas eu d'adaptations de l'école aux grands enjeux du XXIe siècle"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Daniel Curnier, auteur de "Vers une école éco-logique"
L'invité de La Matinale (vidéo) - Daniel Curnier, auteur de "Vers une école éco-logique" / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 10 min. / le 9 juin 2021
Quel rôle l'école doit-elle jouer dans la transition écologique? Invité mercredi dans La Matinale, le docteur en sciences de l'environnement à l'Université de Lausanne Daniel Curnier estime que la prise de conscience de l'école sur la question est "largement insuffisante".

"Il n'y a pas eu de transformations ou d'adaptations du système scolaire aux grands enjeux du XXIe siècle." Dans son ouvrage "Vers une école éco-logique", tiré de ses recherches de 2017, Daniel Curnier s'interroge sur le rôle de l'école dans la transition écologique.

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Il reconnaît que depuis les mobilisations de 2019 (grèves pour le climat et grève des femmes), il y a eu une "prise de conscience" de l'école sur les questions environnementales et égalitaires. "Il y a un certain nombre de petites mesures qui ont été mises en place. C'est très ponctuel", explique-t-il dans La Matinale.

Transition numérique, "sens inverse"

Selon lui, l'enseignement essaie de concilier des éléments "qui ne sont pas forcément conciliables", par exemple le numérique et la durabilité: "C'est quelque chose qui va dans le sens inverse quand on connaît l'empreinte environnementale du numérique. (…) Le numérique est juste un exemple d'une logique plus profonde, plus ancienne, qui remonte aux origines de l'école au XIXe siècle."

Et d'ajouter: "Le projet scolaire est tourné vers la disciplinarisation des masses, la construction d'un Etat-nation et le moyen de fournir le marché du travail en personnes dont les qualifications répondent aux besoins."

Pouvoir de changer la société

Il estime que l'école ne peut pas tout. "Elle ne peut pas changer sans que la société évolue. Mais elle est un moyen relativement puissant de faire changer la société. En même temps, il ne faut pas lui déléguer trop de responsabilités, parce que toute seule, elle ne peut absolument rien faire si les adultes restent dans leur logique."

Il ne faut pas déléguer trop de responsabilités à l'école, parce que toute seule, elle ne peut absolument rien faire si les adultes restent dans leur logique

Daniel Curnier, docteur en sciences de l'environnement à l'Université de Lausanne

S'il n'exclut pas un "risque de dérapages", pour lui, l'école "a un rôle à jouer dans la compréhension du monde. C'est écrit dans les plans d’études. (…) Nous avons des études précises en sciences de l'éducation qui disent qu'évacuer ces questions, qui génèrent des tensions, ce n'est pas un bon moyen de former l'autonomie et l'esprit critique des élèves. (…) S'ils ne le font pas dans le cadre de l'école, où est-ce qu'ils vont le faire?"

Rôle des enseignants

Pour Daniel Curnier, l'enseignante ou l'enseignant peut exposer son avis. "Mais il doit le faire en expliquant qu'il s'agit d'un avis parmi d'autres. Et surtout donner les raisons, les arguments et les expériences qui expliquent cette prise de position."

En attendant la révision du Plan d'études romand, qui évolue "lentement", Daniel Curnier avance des pistes sur lesquelles l'école pourrait avancer comme l'alimentation de ses bâtiments, la mobilité ou encore la création de semaines spéciales pour parler de ces enjeux. "S'il y a une volonté politique, des évolutions peuvent être apportées dès l'an prochain. Et si on est pragmatique dans dix ans."

Propos recueillis par Tania Barril

Adaptation web: Valentin Jordil

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