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Simonetta Sommaruga: "Bien sûr, on a des doutes sur nos décisions face au Covid-19"

Simonetta Sommaruga dresse le bilan de son année présidentielle
Simonetta Sommaruga dresse le bilan de son année présidentielle / L'actu en vidéo / 6 min. / le 15 décembre 2020
C'est une année très spéciale marquée par la pandémie qui s'achève pour la présidente de la Confédération Simonetta Sommaruga. La conseillère fédérale a reçu la RTS dans son département pour faire le bilan de son règne, à deux semaines de passer le témoin à Guy Parmelin.

Le 1er janvier 2020, l'allocution de Nouvel An de Simonetta Sommaruga, tournée dans la boulangerie de son quartier, n'était pas passée inaperçue. "Une bonne année, c'est une année où rien de grave ne nous arrive, à nous et à nos proches. Une bonne année, c'est quand nous sommes heureux et quand nous avons la santé", disait la présidente de la Confédération. Qui aurait pu penser que, un an plus tard, ces mots banals allaient sonner si fortement? Qui aurait pu penser qu'un virus venu de Chine allait bouleverser le quotidien de toute la population? Un virus qui a déjà coûté la vie à plus de 5600 personnes en Suisse et qui continue de faire des ravages.

"J'ai l'impression que c'est très très loin", réagit Simonetta Sommaruga lorsqu'on lui demande de visionner à nouveau cette séquence. "Au final, cette allocution avait beaucoup plus à voir avec cette année que ce que je pensais au moment de l'enregistrer", poursuit la présidente de la Confédération. "C'est peut-être seulement lorsqu'elle est en danger qu'on réalise à quel point la santé est importante", relève-t-elle.

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Un an plus tard, Simonetta Sommaruga réagit à son allocution du Nouvel An / L'actu en vidéo / 1 min. / le 15 décembre 2020

"La population avait besoin de sa présidente en Suisse

L'année présidentielle de Simonetta Sommaruga a été marquée du sceau de la pandémie. La conseillère fédérale avait effectué près de 30 voyages à l'étranger lors de sa première présidence en 2015. Cette année, par la force des choses, elle n'a quitté le pays qu'à quatre reprises, dont deux fois en janvier, avant même que le premier cas de coronavirus ne soit enregistré en Suisse. Mais la cheffe du Département fédéral des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) fait contre mauvaise fortune bon coeur: "Je crois que, cette année, la population avait besoin que sa présidente soit en Suisse. D'ailleurs, j'aime mieux ça que serrer beaucoup de mains (à l'étranger)", affirme-t-elle.

Simonetta Sommaruga rappelle toutefois son voyage en Ukraine en juillet, théâtre du dernier conflit armé sur sol européen. "C'était important d'être là. La Suisse fait un travail humanitaire très important dans ce pays", souligne-t-elle. La Bernoise indique en outre avoir pu mener par vidéoconférence de nombreux entretiens bilatéraux avec des chefs d'Etat ou de gouvernement, parmi lesquels la chancelière allemande Angela Merkel, le Premier ministre français Jean Castex ou la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. "Mais rien ne remplace le contact direct", reconnaît la ministre socialiste.

Le Conseil fédéral a choisi "la voie médiane"

C'est donc sur le front intérieur que s'est concentrée l'action de la présidente. Le 16 mars, le Conseil fédéral ordonne le semi-confinement pour tous les Suisses afin de lutter contre la hausse du nombre de cas de Covid-19. Ce jour-là, flanquée de trois autres conseillers fédéraux, c'est à Simonetta Sommaruga que revient la charge d'annoncer la nouvelle. "C'était des moments très difficiles, très lourds, pour tout le Conseil fédéral. On sentait cette responsabilité. Il y avait la pression sur le gouvernement pour prendre des décisions, parce que chaque jour compte dans une pandémie, mais en même temps on réalisait ce que ça voulait dire pour la vie quotidienne des Suissesses et des Suisses", se remémore-t-elle.

A-t-elle douté des décisions prises par le Conseil fédéral? "Bien sûr, reconnaît Simonetta Sommaruga, parce qu'il fallait toujours penser aux conséquences de ces décisions pour la santé des gens et pour l'emploi, mais aussi aux conséquences sociales, notamment pour les enfants et la jeunesse". "Pour moi, en tant que présidente de la Confédération, il était important de choisir une voie médiane, de ne pas aller vers les extrêmes et de tout faire pour le bien de notre pays", note-t-elle. Et la conseillère fédérale de mettre l'accent sur la nécessité de convaincre la population du bien-fondé des choix du gouvernement.

Une deuxième vague plus compliquée à gérer

A l'image de la population, le Conseil fédéral est lui aussi divisé quant à la réponse à apporter face à la pandémie, que ce soit pendant la première vague au printemps, au moment de la réouverture, durant l'été ou lors de la deuxième vague cet automne. "Il y a ceux qui veulent aller plus loin, plus vite, et ceux qui veulent aller moins loin, plus lentement. Je trouve que c'est bien. C'est important qu'il y ait différents avis au gouvernement. Mais à la fin, il faut prendre une décision ensemble", relève Simonetta Sommaruga, qui estime que son expérience a été essentielle pour diriger le Conseil fédéral et parvenir à un consensus qui convienne à chacun.

Au printemps, la gestion de la crise en Suisse a été soutenue par une majorité de la population et saluée à l'international. Cet automne, la situation est plus chaotique et les autorités ont perdu le contrôle des infections. Simonetta Sommaruga admet que les choses sont plus compliquées pour le Conseil fédéral. "Cette pandémie dure depuis des mois. Les gens commencent à être fatigués, à en avoir marre de cette crise, et c'est compréhensible. De l'autre côté, les cantons ont revendiqué leurs compétences", souligne-t-elle. "Mais au moment où ça redevient très tendu, le Conseil fédéral doit reprendre la main", comme il l'a fait la semaine dernière, plaide-t-elle.

Crise climatique et accord-cadre au second plan

Le Covid-19 a évidemment éclipsé tous les autres gros dossiers de sa présidence. Début 2020 à Davos, Simonetta Sommaruga avait ainsi appelé la communauté internationale à oeuvrer face à un "monde en feu". "La crise climatique est toujours là. Rien n'a été résolu", reconnaît aujourd'hui la conseillère fédérale. "L'année prochaine, je pourrai me concentrer davantage sur les grands thèmes que sont le climat, les énergies renouvelables, la biodiversité, les transports", se réjouit-elle. La cheffe du DETEC devra probablement défendre devant le peuple la loi sur le CO2 adoptée cet automne par le Parlement, après près de trois ans de débats.

Parmi les autres grandes questions passées au second plan en raison du coronavirus figure celle de l'accord-cadre avec l'Union européenne, toujours pas réglée. La présidente de la Confédération se défend de passer la patate chaude à son successeur. "Sur la question européenne, le Conseil fédéral a beaucoup travaillé cette année. On a pu débloquer la situation. On a clarifié notre position et fait une proposition à l'Union européenne. Maintenant, la patate est plutôt à Bruxelles", rétorque-t-elle.

"Que ferez-vous à Noël, Mme la présidente?"

Interrogée sur la période des Fêtes, Simonetta Sommaruga assure qu'elle va rester en contact avec ses collègues jusqu'à la fin de l'année. "Que ce soit Noël ou les vacances, le Conseil fédéral doit tenir ses responsabilités."

En outre, elle va limiter au maximum ses contacts en raison de la situation sanitaire préoccupante. "Je vais fêter en famille resserrée, à deux. Puis je vais peut-être voir mon petit-fils, et peut-être aussi ma mère. C'est dommage et ça me fait mal au coeur. Mais je vais faire de la bonne cuisine pour ceux avec qui je peux partager un repas."

Mathieu Henderson et Didier Kottelat

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Des parlementaires commentent le bilan de Simonetta Sommaruga

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Des parlementaires commentent le bilan de Simonetta Sommaruga à la présidence / L'actu en vidéo / 3 min. / le 10 décembre 2020