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Traçage et contrôles, comment les cantons tentent de gérer la pandémie

Un opérateur téléphonique de la hotline fribourgeoise concernant le coronavirus. [Keystone - Laurent Gillieron]
Certains cantons n’ont pas suffisamment de moyens pour contrôler le respect des quarantaines / Le 12h30 / 3 min. / le 10 juillet 2020
Afin de contrôler la propagation du coronavirus, les cantons ont mis en place des équipes chargées de tracer le Covid-19 sur leur territoire et de gérer les mises en isolement et en quarantaine. Plusieurs régions se préparent d'ailleurs à augmenter ces effectifs, a appris la RTS vendredi.

Plus de 1300 personnes sont actuellement en quarantaine en Suisse romande et près de 220 en isolement en raison du Covid-19. Pour vérifier que ces mesures sont respectées, les cantons ont mis en place des cellules spécialisées, qui se chargent également de remonter les chaînes de transmission.

Les effectifs varient entre les régions: le canton de Vaud dispose de 7 collaborateurs, le Jura de 8, le Valais d'une douzaine et Neuchâtel de 18. Ils sont 20 à Berne et 25 à Fribourg et Genève.

Infirmières, médecins, personnel administratif, étudiants du domaine médical et parfois civilistes, plusieurs types de profils composent ces équipes. Des agents de police sont aussi mobilisés dans certains cas, notamment dans les cantons de Berne et de Neuchâtel. Ce dernier emploie également des membres de la Ligue pulmonaire, tout comme Fribourg.

Suivi téléphonique

Leur travail consiste principalement à appeler les personnes testées positives au coronavirus: "On remonte les 48 dernières heures pour déterminer tous les contacts qu'elles ont eus", explique Sophie Chevrey-Schaller, adjointe du chef de service jurassien de la santé publique.

"On évalue ensuite toutes les personnes qui ont eu un contact à moins de 1,5 mètre pendant plus de 15 minutes cumulées. Celles-ci sont ensuite placées en quarantaine."

La population en isolement est également sondée plus ou moins régulièrement selon les cantons. Dans le Jura, les appels se font tous les deux jours: "On vérifie l'état de santé et on s'assure que les consignes sont bien respectées. On fait la même chose avec les personnes en quarantaine pour leur demander si elles ont développé des symptômes", rapporte Sophie Chevrey-Schaller.

En Valais, les contacts sont moins récurrents: "On le fait trois fois par cas. Au début, au milieu, puis à la fin, lorsqu'il s'agit de lever la quarantaine", indique Delphine Berthod, remplaçante du médecin cantonal.

Réticence et dénonciations

Cette dernière observe une certaine réticence dans le processus de traçage. "Souvent, les gens n'ont pas envie de communiquer la liste des personnes avec qui ils étaient en contact rapproché."

Une méfiance qui s'avère contre-productive, souligne Delphine Berthod: "Ils pensent peut-être protéger les autres, mais en fait c'est le contraire. Sans compter que cela empêche d'interrompre la chaîne de transmission", explique Delphine Berthod.

Lorsque les règles de confinement ne sont pas respectées, les cantons peuvent recourir à la justice. Alors que le Valais et Fribourg indiquent n'avoir dû procéder pour l'heure qu'à des avertissements, le Jura compte deux dénonciations pénales.

Le canton se prépare à solliciter davantage la police: "On pourra l'activer de plus en plus pour qu'elle se rende aux domiciles des personnes pour lesquelles on a des doutes sur le suivi des consignes", rapporte Sophie Chevrey-Schaller.

Renforcement des effectifs

Reste que le contrôle des isolements et des quarantaines représente un travail fastidieux et de longue haleine: "Ni l’Office du médecin cantonal ni les autres offices fédéraux ou cantonaux ne peuvent contrôler si toutes les personnes respectent la quarantaine. C’est la responsabilité personnelle de tout le monde", estiment les services bernois de la santé publique.

Plusieurs cantons prévoient d'ailleurs un renforcement opérationnel. C'est le cas de l'Etat de Vaud qui entend mettre sur pied une nouvelle équipe la semaine prochaine, composée de trois civilistes et d'une quinzaine de policiers.

A Genève, des mobilisations internes supplémentaires sont également prévues, ainsi que l'engagement d'auxiliaires.

En Valais, c'est une dizaine d'infirmières qui se préparent à être formées. Un système de messagerie va aussi être mis en place: "On essaie de s'appuyer sur d'autres solutions comme des SMS pour nous aider dans ces démarches", précise Delphine Berthod.

Collaboration intercantonale?

Même si les cantons contactés assurent que la situation est sous contrôle, l'inquiétude reste présente.

Laurent Kurth, conseiller d'Etat neuchâtelois en charge de la Santé, évoque l'idée d'une collaboration intercantonale: "Si un canton est débordé et un autre pas, on pourrait imaginer un transfert de ressources. Ce sont en tout cas des discussions que j'entends mener avec mes collègues romands ces prochaines semaines."

>> Lire aussi : Les mesures de quarantaine continuent de poser problème aux cantons

Mathieu Henderson et Marc Menichini

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