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"Ca fait vraiment bizarre de dire que je dois adopter mon propre enfant"

Laeticia et Cindy Lavanchy, avec leurs deux enfants Rosalie et Zachary. [RTS - Mathieu Henderson]
Laeticia et Cindy Lavanchy, avec leurs deux enfants Rosalie et Zachary. / L'actu en vidéo / 4 min. / le 13 mars 2020
Le Parlement débattra du mariage pour tous lors de la session d'été qui débute mardi. Directement concernées, Cindy et Laeticia Lavanchy ont dû lutter pour fonder une famille. Procréation médicalement assistée pour l'une, adoption pour l'autre, les deux jeunes femmes livrent leur témoignage lundi dans La Matinale.

Cindy et Laeticia, 34 et 35 ans, habitent à Agiez, au-dessus d'Orbe (VD). Après s'être partenariées, les deux femmes ont décidé de fonder une famille. La loi ne leur permettant pas de recourir au don de sperme en Suisse (lire encadré), elles ont eu recours à la procréation médicalement assistée (PMA) dans une clinique à Barcelone. "On a envisagé de demander à un proche, ce qui nous aurait permis de connaître l'identité du donneur, mais finalement on s'est dit que c'était délicat", expliquent-elles.

Laeticia, qui a porté leurs deux enfants, garde un souvenir stressant des procédures de la PMA. "Parfois, on me disait qu'il fallait venir (à Barcelone) le lendemain matin. Et si on ne le fait pas, on prend le risque de ne plus être dans le bon cycle. Donc j'essayais de trouver un vol de dernière minute, parfois même en classe affaires parce qu'il n'y avait plus de billets en classe économique", explique Laeticia.

J'ai dû faire deux aller-retour sur un jour pour un simple examen gynécologique et une prise de sangLaeticia Lavanchy

Pour leur premier enfant, Zachary, deux ans et demi, le parcours s'est déroulé relativement simplement avec seulement deux voyages en Espagne. Cela s'est toutefois avéré plus compliqué pour la petite dernière, Rosalie, 6 mois: "On a dû faire trois tentatives pour que cela fonctionne", explique la jeune femme de 35 ans.

Cinq voyages ont été nécessaires: "J'ai même dû faire deux aller-retour sur un jour pour un simple examen gynécologique et une prise de sang", rapporte-t-elle. "J'avais l'impression d'être une femme d'affaires qui part prendre l'avion à 6h du matin à Genève et qui revenait à 18h."

18 mois pour adopter son propre enfant

Dans les couples homosexuels, les deux parents ne sont pas reconnus automatiquement à la naissance des enfants. Cindy a dû attendre 18 mois pour adopter Zachary. Quant à Rosalie, les procédures pour l'adopter ne pourront être entamées que lorsque la petite fille aura une année. "Ayant été présente avant le projet de conception et ayant participé activement à toutes les étapes, ça fait bizarre de dire que je dois adopter mon propre enfant", regrette Cindy.

J'ai été présente dès le départ, or nous ne sommes pas égales et c'est quelque chose qui me dérange

Cindy Lavanchy

"Je dois un peu attendre mon tour alors que je me sens très investie depuis le départ, autant que Laeticia. Nous ne sommes pas égales à ce niveau-là et c'est quelque chose qui me dérange."

Laeticia acquiesce: "On l'a vu avec Zachary. Il y a eu tout un flou juridique durant les 18 premiers mois de sa vie. Il n'avait aucune protection. J'aurais pu partir avec lui et laisser Cindy. Et, à l'inverse, elle aurait pu me laisser seule avec lui. C'est quelque chose qui a fait peur à toute la famille."

Plus de 17'000 francs pour fonder une famille

Au total, les deux conceptions ont coûté plus de 15'000 francs, inséminations et déplacements compris. Quant aux procédures d'adoption, elles s'élèvent à environ 1000 francs chacune.

Cindy souligne également l'impact professionnel: "Quand on s'est dit qu'on ferait un deuxième, Laeticia a décidé de ne pas reprendre le travail car il faut être disponible pour aller chez la gynécologue tous les deux jours et être disponible à la dernière minute pour sauter dans l'avion."

>> Le reportage de Camille Degott :

Camille Degott, journaliste de la RTS, avec Cindy et et Laeticia Lavanchy. [RTS - Mathieu Henderson]RTS - Mathieu Henderson
Le mariage pour tous et toutes sera débattu au Parlement mardi 17 mars prochain / La Matinale / 3 min. / le 13 mars 2020

Mathieu Henderson

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Le mariage pour toutes et tous au menu des parlementaires

Le mariage pour tous sera débattu mardi prochain au Conseil national. L'un des points centraux concerne la procréation médicalement assistée (PMA) accordée aux couples homosexuels, à laquelle s'opposent l'UDC et le PDC.

De son côté, le Conseil fédéral joue la carte de la prudence. Il préfère faire passer le mariage pour tous avant la PMA, et ce pour gagner contre un probable référendum opposé à l'union civile des couples homosexuels.

Mais plusieurs partis, à gauche comme à droite, rejettent cette stratégie. Ils plaident pour un projet plus global, comprenant la PMA. Un avis partagé par le PS, les Verts, les Vert'libéraux et le PLR.