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Un autre résidu du chlorothalonil jugé indésirable dans l'eau potable

Chlorothalonil: interdit mais plus que jamais problématique pour les distributeurs d'eau potable. [Depositphotos - HappyLenses]
Chlorothalonil: interdit mais plus que jamais problématique pour les distributeurs d'eau potable / On en parle / 12 min. / le 4 février 2020
Depuis l’interdiction du chlorothalonil par la Confédération en décembre, tous les produits de dégradation de ce fongicide sont indésirables dans l’eau potable. Or, la concentration de deux d'entre eux dépasse souvent la norme dans les eaux souterraines du Plateau, a appris la RTS.

Utilisé dans l’agriculture suisse depuis les années 1970, le fongicide chlorothalonil est interdit sur le territoire helvétique depuis le 1er janvier 2020, car il est reconnu comme potentiellement cancérigène.

L'émission On en parle a appris que l'un des fabricants, Syngenta, a déposé le 27 janvier un recours au Tribunal administratif fédéral contre l’interdiction du chlorothalonil. Un deuxième recours a été enregistré, par un autre plaignant dont l'émission de la RTS n'a pas obtenu le nom.

Malgré ce bannissement, certains résidus de ce pesticide, les "métabolites" du chlorothalonil, posent plus que jamais problème dans l’eau potable, comme c'est le cas de l'acide sulfonique. Depuis août 2019, ce produit de dégradation du chlorothalonil ne doit plus dépasser la valeur maximale de 0,1 microgramme par litre, ce qui a forcé de nombreuses communes à prendre des mesures - abandonner des ressources en eau ou mélanger l’eau incriminée avec une autre source - pour faire baisser la concentration d’acide sulfonique. Les cas sont nombreux dans les cantons de Vaud, Fribourg, Berne, Argovie, Soleure, Schaffhouse et Zurich.

>> Lire : Du chlorothalonil dans l'eau du robinet de plusieurs communes vaudoises

Dans les eaux souterraines

Mais un deuxième résidu, le R471 811, vient lui aussi de changer de classification toxicologique, comme l’ont découvert les enquêteurs d’On en parle. Ce métabolite est désormais "pertinent", donc indésirable et soumis à la limite maximale de 0,1 microgramme par litre dans l’eau potable.

Or, ce résidu est présent dans les eaux souterraines à des concentrations de trois à cinq fois supérieures à celle de l’acide sulfonique, selon une étude de l’Institut fédéral suisse des sciences et technologies de l’eau (EAWAG). (A noter que les eaux souterraines n’approvisionnent pas forcément les réseaux d'eau potable.)

L’EAWAG a trouvé ces deux métabolites du chlorothalonil dans tous ses échantillons (31), tous issus des régions agricoles de Suisse, là où l’usage des pesticides est le plus répandu. Dans 20 cas sur 31, les valeurs de référence sont dépassées, parfois massivement.

"Non conformité" dans de nombreuses communes

En conséquence, de plus en plus de communes du Plateau suisse vont se retrouver avec une eau "non conforme", donc formellement non potable, et vont devoir trouver des solutions qui coûtent parfois très cher.

L'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) a envoyé une lettre le 30 janvier à tous les chimistes cantonaux, à la société suisse de l’industrie, du gaz et des eaux (SSIGE) et à l’association suisse des fontainiers, pour les enjoindre à chercher ce nouveau résidu dans leur eau et à prendre des mesures de correction en cas de dépassement de la limite. Cela peut signifier de se raccorder à un autre réseau, ce qui représente un investissement financier important.

Le canton de Soleure vient par exemple d’exprimer publiquement son inquiétude quant à la situation sur son territoire: plus de la moitié des Soleurois boivent une eau qui est désormais non conforme, où la valeur limite en matière de résidus de chlorothalonil est dépassée. Le gouvernement a publié une carte: 160'000 personnes sont concernées pour ce seul canton.

Sujet radio: Isabelle Fiaux et Bastien von Wyss

Adaptation web: Katharina Kubicek

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