Publié

Opportunisme ou élan pour le climat? Des élus changent de cap sur la taxe CO2

L'introduction d'une taxe CO2 sur les carburants rallie de plus en plus au centre droit.
L'introduction d'une taxe CO2 sur les carburants rallie de plus en plus au centre droit. / 19h30 / 1 min. / le 9 août 2019
Les marches pour le climat influencent-elles les élus? Plusieurs parlementaires du PDC et du PLR ont récemment changé de position sur certaines questions environnementales, dévoile une analyse de la RTS.

Des milliers de jeunes ont une nouvelle fois défilé vendredi à Lausanne pour manifester leurs inquiétudes face au réchauffement climatique et appeler à réduire les émissions de CO2. La vague écologique inspirent-elles nos élus?

>> Lire aussi : Plus de 2500 manifestants à Lausanne contre le réchauffement climatique

Une septantaine de parlementaires qui se représentent aux élections fédérales d'octobre ont rempli cet été le questionnaire de la plateforme d'aide au vote Smartvote. La RTS a analysé leurs réponses au sujet de l'environnement afin de découvrir ceux qui changent d'avis, et ceux qui campent sur leurs positions.

"Faut-il étendre la taxe sur le CO2 aux carburants?" Cette question de Smartvote fait directement écho aux revendications des manifestants.

Considérée par la Confédération comme l'un des principaux instruments pour réduire les émissions de CO2, cette taxe est jusqu'à présent limitée au mazout et au gaz naturel. Mais, aujourd'hui, une version étendue à l'essence et au diesel pourrait séduire le Parlement.

Sur les 73 élus qui ont répondu à cette question en 2015 et 2019, un peu plus d'un sur deux s'opposait encore à la taxe il y a quatre ans. Cet été, le vent a tourné. Parmi ces mêmes parlementaires, plus de six sortants sur dix affirment la soutenir.

Basculement au centre-droit

Qui a changé de camp sur cette question? Les réponses des élus de gauche et des Vert'libéraux, qui soutenaient déjà cette mesure en 2015, restent unanimement en faveur d'une taxe CO2 sur les carburants.

A l'UDC aussi, les sortants campent sur leur position: ils rejettent tous la mesure.

C'est dans les partis du centre-droit qu'un basculement se dessine. Onze des 21 sortants du PDC et du PLR qui ont répondu aux questionnaires ont changé leur fusil d'épaule. Résultat, le rapport de force semble s'inverser. La taxe CO2 est dorénavant largement soutenue par ces élus (14 pour, 7 contre), alors qu'ils la rejetaient massivement en 2015 (4 pour, 17 contre).

"Tout ce qu'on fait est de l'opportunisme politique à ce tarif-là"

Parmi les 11 élus PDC et PLR qui ont modifié leur position figurent notamment les Romands Olivier Français (PLR/VD) et Philippe Nantermod (PLR/VS), mais également le président de l'Union suisse des paysans Markus Ritter (PDC/SG).

Philippe Nantermod reconnaît l'impact de la pression populaire sur la question climatique. "On est obligé d'y répondre, c'est une préoccupation très importante pour la population", explique le Valaisan au 19h30 de la RTS.

Toutefois, la nouvelle posture de certains élus bourgeois est souvent qualifiée d'opportunisme politique par leurs adversaires. "C'est vrai, tout ce qu'on fait est de l'opportunisme politique à ce tarif-là", répond le libéral-radical. "On doit aussi admettre que les temps changent, que les opinions changent, que les attentes changent. On doit donner des réponses, tout en restant sur une ligne de valeurs qui sont les nôtres".

Philippe Nantermod reconnaît toutefois la difficulté de concilier ses valeurs libérales avec certaines mesures pour le climat. "Ce n'est jamais de gaieté de coeur que je soutiens une nouvelle taxe", poursuit-il. "Parfois, il faut aussi avaler des couleuvres quand on fait de la politique. L'adoption de taxe pour atteindre des objectifs en fait partie, mais ce n'est en tout cas pas par conviction que je vais proposer qu'on augmente les taxes."

"On espère qu'ils tiendront leurs promesses"

Les changements de position des élus du centre-droit réjouissent les militants de la grève du climat. "Toute action en faveur du climat est à prendre en compte et à saluer", déclare Johann Recordon, du Collectif vaudois de la grève pour le climat.

Néanmoins, le jeune homme dit attendre davantage qu'une taxe CO2, notamment "des changements systémiques pour qu'on puisse changer de mode de transport et se débarrasser des énergies fossiles, sans mettre le poids uniquement sur le consommateur".

"On espère qu'une fois les élections passées, ils tiendront leurs promesses et que ce sujet restera au devant de leurs préoccupations", ajoute Johann Recordon.

Moins ouverts sur d'autres propositions

Le soutien à la taxe CO2 sur les carburants ne transforme pas pour autant les parlementaires PLR et PDC en militants écologistes. La majorité d'entre eux n'a pas changé d'avis sur d'autres propositions, qui relèvent surtout de la protection de l'environnement à l'échelle locale.

Hormis quelques exceptions, ils rejettent toujours l'idée d'accorder les paiements directs qu'aux exploitations agricoles bio ou de renforcer les règles pour les entreprises suisses en matière de respect des normes environnementales à l'étranger.

Valentin Tombez avec Linda Bourget

Publié