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"Pragmatisme et consensus", des votations très suisses, selon la presse

La presse romande consacre ses unes aux nombreux objets de votations, fédérales, cantonales et communales de dimanche.
La revue de presse – Par Valérie Droux / La revue de presse / 7 min. / le 20 mai 2019
Le "oui" des Suisses dimanche au projet fiscal témoigne de la tradition helvétique du pragmatisme et du consensus, estime la presse romande de ce lundi. Reste que l'AVS doit être réformée, alors que des menaces planent sur la fiscalité.

"En démocratie, non + non peut faire oui", image La Liberté, qui souligne, à l'instar de nombreux autres journaux, qu'il a fallu un deuxième scrutin pour faire accepter par 66,4% des voix la réforme fiscale des entreprises, liée cette fois-ci à l'assurance-vieillesse et survivants (RFFA).

"En liant ces deux dossiers majeurs, une poignée de sénateurs créatifs sont parvenus à les sortir de l'ornière", ajoute La Liberté, qui voit dans cette solution "un génie très helvétique". Le quotidien fribourgeois estime même que ce projet "sauve une législature marquée à droite et dénuée jusque-là de résultats d'envergure".

"L'option gagnante aura bien été d'ajouter un volet AVS, un compromis très helvétique, qui a permis de fédérer les socialistes, le PLR et le PDC dans un bloc uni", relève L'Agefi. "La volonté de préserver le premier pilier a fait passer la pilule fiscale auprès d'une large partie de la population", surenchérit Le Nouvelliste.

Pas le choix

Mais si les Suisses ont donné une "réponse raisonnable", c'est qu'ils n'avaient pas le choix, commente Le Quotidien Jurassien. "Dire 'non' (...) à la réforme de l'impôt sur les entreprises (...) revenait à exposer le pays à de nuisibles incertitudes".

Même si elle est de moindre ampleur que le projet RIE III, rejeté par le peuple en 2017, "cette réforme va aussi amener de la clarté et de la sécurité juridique pour les entreprises suisses et internationales", juge L'Agefi.

"C'est désormais fait", écrit Le Temps. "La Suisse est rentrée dans le rang", abonde Le Nouvelliste. Avec ce résultat, les citoyens "ont confirmé une vision apaisée de la Suisse, où la volonté farouche d'indépendance tient souvent à la posture, tant le pays réel est imbriqué dans la gouvernance internationale", note Le Temps, qui voit "une Suisse à l'aise dans son interdépendance".

Réforme de l'AVS incontournable

Il s'agit tout de même d'un cadeau de "4,5 milliards de francs de bénéfices, qui ont été rendus au patronat", s'étonne Le Courrier, qui souligne que "les travailleurs, eux, n'y ont rien gagné". Si la droite "peut se frotter les mains", ce "mariage contre nature, sans même parler de l'éminent principe de l'unité de matière" n'est pas vraiment une victoire pour la gauche, poursuit le quotidien genevois.

Et maintenant au Parlement et aux cantons d'agir, appellent les journaux. "Les deux milliards de francs injectés dans l'AVS en guise de compensation sociale (...) ne sont qu'un emplâtre sur le premier pilier", explique La Liberté. "La Confédération prévoit un déficit cumulé de 170 milliards de francs d'ici 2045, si aucune réforme n'est entreprise", rappelle L'Agefi.

"Des réformes structurelles sont incontournables" dans l'AVS, martèle le Quotidien jurassien, qui appelle le législatif fédéral à ne pas utiliser seulement l'équation "hausse de l'âge de la retraite ou diminution des rentes".

ats/pym

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La presse alémanique

La presse alémanique se réjouit qu'en dépit de la polarisation du Parlement fédéral, des réformes aux problèmes les plus urgents sont toujours possibles en Suisse. A l'instar de La Liberté, la Neue Zürcher Zeitung estime que la RFFA est "probablement le projet de loi de politique économique le plus important depuis des années" à être accepté.

"Après une législature gâchée, les politiciens prouvent qu'ils sont toujours en mesure de finaliser des réformes susceptibles d'être adoptées par la majorité", ajoute le grand quotidien zurichois.

La presse d'outre Sarine pointe par ailleurs le lien non pertinent entre la fiscalité des entreprises et le financement de l'AVS. Mais "si le temps presse, on est obligé de fermer les yeux", juge le Tages-Anzeiger. Et "le temps pressait après l'échec de deux réformes majeures", abondent les journaux du groupe de presse CH Media. "Un tel marchandage ne doit pas devenir la règle en politique", avertit toutefois Watson.ch.

Comme en Suisse occidentale, les commentateurs alémaniques appellent les cantons à se conformer à la nouvelle loi fiscale et les politiciens à réformer en profondeur l'AVS. Dès 2022, le financement supplémentaire accepté dimanche ne suffira plus à combler le déficit du premier pilier, avertit le Tages-Anzeiger.

Loi sur les armes: "l'émotion au placard"

L'autre objet de votation, l'adaptation de la loi sur les armes à la directive européenne, est aussi passé à la loupe des éditorialistes.

Les Suisses ont rangé leur émotion au placard, juste à côté de leur fusil d'assaut, juge le commentaire commun de La Liberté, du Nouvelliste, d'Arcinfo, de La Côte et du Journal du Jura.

"Félicitons nos diplomates d'avoir su défendre nos traditions - le tir sportif - en obtenant d'importante concessions dans cette directive sur les armes". Puisse cette recette faire école pour débloquer le dossier de l'accord-cadre, plaide le commentaire.

Pour la NZZ: le vote de dimanche était tout simplement un "oui" à la poursuite de la coopération dans le cadre de Schengen et Dublin.

Le Blick est d'un autre avis: ce n'est pas un "oui" à la politique européenne. Nos rapports avec Bruxelles se régleront via l'accord-cadre et via l'initiative de limitation de l'UDC, qui veut abolir la libre-circulation.