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"White Power - Au cœur de l'extrême droite"

White power - Au coeur de l'extrême droite
"White power - Au cœur de l'extrême droite" (disponible jusqu'au 19.11.2024) / Doc à la Une / 80 min. / le 21 août 2024
Allemagne, Belgique, Italie, France, Hongrie... En Europe comme ailleurs, l'extrême droite a le vent en poupe et se banalise. Parmi ses différentes mouvances, le suprémacisme blanc se propage et infiltre toutes les catégories de la population. Le documentaire "White power - Au cœur de l'extrême droite" brosse un portrait inquiétant de ces idéologies qui se rapprochent du pouvoir politique... lorsqu'elles n'y sont pas déjà installées.

Vestes d’aviateurs, bottes militaires et crânes rasés… Il fut un temps où les membres de groupes se réclamant du "white power" - qu’on peut traduire par "suprémacisme blanc" - étaient aisément reconnaissables. Ce n’est plus forcément le cas. De nos jours, la plupart se fondent dans la masse, cachés derrière les traits de monsieur et madame Tout-le-monde, voire derrière ceux de leaders politiques comme l’Allemand Björn Höcke.

Remigration

Le co-président de l’AfD (Alternative für Deutschland) et député du parlement de Thuringe fait partie de cette nouvelle mouvance d’extrême droite radicale et décomplexée. Son programme tient en un mot: "remigration". Ce néologisme issu de l’anglais désigne le renvoi dans leur pays d’origine des immigrés non-européens, y compris les détenteurs d’un passeport allemand s’ils sont jugés "non intégrés". Pour cet ancien professeur d’histoire, il faut rendre à l’Allemagne ses racines européennes et "faire de l’UE une forteresse".

Nous allons construire l'Europe comme une forteresse, regardons la Hongrie

Björn Höcke, co-président du parti AfD

Cette idéologie qui paraît difficile à défendre rencontre pourtant un franc succès outre-Rhin. Un électeur sur cinq en est partisan, un sur trois en ex-Allemagne de l’Est. Comment justifier cet engouement au pays qui a vu naître le nazisme? Le million de réfugiés accueillis par Angela Merkel en 2015 est un bouc émissaire idéal. L’appauvrissement de la population, exploité dans les urnes par l’AfD est en partie attribué à ces nouveaux arrivants. En ex-Allemagne de l’Est, 70% des électeurs pensent que les immigrés ne sont là que pour toucher les aides sociales.

L'extrémisme pour combler un manque

Pour Axel Reitz, qui témoigne dans le documentaire, il existe également d'autres raisons de verser dans l'extrémisme. Ce néo-nazi repenti, surnommé dans les années 2000 le "Hitler de Cologne", affirme qu’on ne devient pas extrémiste à cause d’un discours génial ou d’un pamphlet. A son avis, les membres de ces mouvements ont un manque dans leur vie. Un besoin de pouvoir, d’appartenance ou l’envie de se sentir utile. Mais selon Philip Schlaffer, ancien skinhead, leur point commun à tous et toutes est la paranoïa.

Je n’ai jamais rencontré un extrémiste qui n’était pas paranoïaque

Philip Schlaffer, ancien skinhead

On retrouve ces mêmes préoccupations identitaires en Belgique, deuxième étape du film. Côté wallon (la partie francophone), un "cordon sanitaire" politique et médiatique tient encore l'extrême droite à l'écart des plateaux de la TV publique depuis 1992. Le Front National belge ne représente ainsi plus que 1% de l’électorat. Côté flamand (néerlandophone), c’est une autre paire de manches. Le Vlaams Belang (Intérêt Flamand) fait un carton. En juin 2024, il est arrivé en tête du scrutin européen.

Le parti a, lui aussi, fait de la lutte contre l’immigration l'un de ses principaux fers de lance. Comme d’autres, il a adopté la théorie du "grand remplacement" (voir encadré). Celle-ci affirme qu'il existerait en Europe un processus de substitution volontaire et planifiée des blancs européens par une population non européenne. Fin 2023, le Vlaams Belang a même fait de cette théorie le thème central de son congrès. Le parti affirme que la majorité des étrangers vivant à Bruxelles sont d’origine arabe. Selon un spécialiste de l'analyse de données interviewé dans le film, c’est faux. Les ressortissants européens représentent le premier contingent d’étrangers à Bruxelles, les Français arrivant en tête de ce classement.

Trois mille extrémistes de droite violents en France

Du côté de la France, les services de renseignement estiment le nombre d’extrémistes de droite violents à 3000. La moitié d’entre eux sont fichés S. Selon Europol, le pays recense à lui seul près de la moitié des actes terroristes d’extrême droite commis ou déjoués en Europe. Certains groupuscules français sont opérationnels, ils mènent des actions violentes et ciblées, comme à St-Brévin, en mai 2023. Dans ce village qui s’apprêtait à accueillir un centre d’accueil pour réfugiés, des manifestants d’extrême droite ont incendié la maison du maire.

Pour l’Etat français, punir ces agissements est complexe car il faut pouvoir les relier à des individus ou à des groupes. Or les actions ne sont pas revendiquées. Lorsque la justice passe enfin et qu’un groupuscule est dissous, un autre peut être créé, sous un nom différent mais avec les mêmes idéaux qui, si nécessaire, impliquent le recours à la violence.

Franck Sarfati - RTS Documentaires

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Le grand remplacement

C'est l'écrivain français Renaud Camus qui, dans un ouvrage paru en 2010 ("L'Abécédaire de l'in-nocence"), introduit la notion de "grand remplacement". Sa théorie, très populaire au sein des mouvements identitaires, avance que les Français "de souche" sont progressivement remplacés par des immigrés, majoritairement originaires du Maghreb et d'Afrique subsaharienne.

Ce "changement de civilisation" serait secrètement soutenu par des élites (politiques, intellectuelles et médiatiques, avec souvent un fond d'antisémitisme derrière ces catégories) poursuivant des buts idéologique et économique. Comme c'est souvent le cas avec les théories complotistes, le grand remplacement n'est pas fondé sur des données démographiques.

Renaud Camus
Renaud Camus