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"Il faut un cadre clair en matière de surveillance des e-mails au travail"

E-mails: les droits de l'employeur
E-mails: les droits de l'employeur / 19h30 / 2 min. / le 22 janvier 2018
En Suisse comme ailleurs, la surveillance des courriers électroniques des collaborateurs par les entreprises qui les emploient fait débat. L'avocat genevois Nicolas Capt plaide pour une information et une législation accrues.

Un employé averti en vaut deux. Forte de cet adage, la Banque Bonhôte le dit tout de go lorsqu'elle engage un employé: les courriers électroniques de ses collaborateurs peuvent être lus. "Nous avons un règlement d'entreprise qui informe des règles en la matière", indique Cyril Lafranchi, responsable de la communication de l'établissement. Tout en précisant que les e-mails peuvent être conservés pendant une durée spécifique et que ce sont des personnes internes à la banque, dûment autorisées, qui peuvent être habilitées à analyser ces données.

Dans le même sens, des institutions comme les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) stipulent dans une charte que "des mécanismes de sauvegarde et d'archivage automatiques sont activés, notamment sur les boîtes de messagerie, sans distinction des types de données".

Carence d'information

Il n'empêche. En Suisse, "les employés ne sont en moyenne pas suffisamment informés" du contrôle potentiel des boîtes de messagerie, souligne l'avocat genevois Nicolas Capt dans le 19h30.

De même, le spécialiste en droit des médias et des technologies constate que les employeurs ne sont pas davantage sensibilisés quant à la "nécessité de mettre en place un règlement interne ou une charte d'utilisation des moyens informatiques, qui prévoit toutes ces questions, et qu'est-ce qui est fait? pourquoi? à quelle fin? comment? Il y a un vrai effort didactique à faire", selon Nicolas Capt.

"La seule confiance ne suffit plus"

L'employeur peut avoir accès en tout temps à toute la messagerie électronique de ses employés. Un collaborateur d'une entreprise roumaine l'avait d'ailleurs appris à ses dépens lorsqu'il a été licencié après que ses e-mails ont été surveillés à son insu. Avant que la Cour européenne des droits de l'homme ne donne tort en septembre dernier à la société pour "violation du droit au respect de la vie privée".

Dans l'administration cantonale genevoise - où l'usage de mails privés est toléré - le personnel est informé qu'un contrôle à des conditions très strictes peut être effectué "en cas d'envoi de fichiers trop lourds ou abusifs". Mais "il faut un dossier en béton et une autorisation au plus haut niveau de l'Etat pour ce faire", assure le directeur de l'Office genevois du personnel de l'Etat, Grégoire Tavernier.

En Suisse, comme ailleurs en Europe où la loi sur la protection des données est en cours de révision, l'employé doit être informé personnellement en cas de surveillance de sa messagerie par l'employeur. "Il y a une vraie nécessité à fixer un cadre, insiste Nicolas Capt. Que chacun sache à quoi s'en tenir, car la seule confiance n'est plus suffisante."

Chloé Steulet/gax

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