Publié

Les données numériques des femmes, armes de la justice américaine contre l'avortement?

Les disparités en matière d'accès à l'avortement sont de plus en plus flagrantes aux Etats-Unis. [Keystone - AP Photo/Mary Altaffer]
Zoom - Les données numériques utilisées pour criminaliser les femmes aux États-Unis / La Matinale / 3 min. / le 22 juin 2022
La Cour suprême américaine pourrait remettre en cause le droit à l’avortement en laissant les Etats légiférer. Ceux qui interdiraient cet acte pourraient poursuivre des femmes en se basant sur leurs données numériques.

La criminalisation de l'avortement pourrait prendre une tout autre dimension en utilisant les données numériques comme preuves au tribunal. L'achat d'un test de grossesse sur internet, une géolocalisation à proximité d'un centre de Planning familial ou des données de santé provenant d'une application de fitness sont des preuves qui pourraient être utilisées lors d'une action en justice.

En 2017, une jeune Afro-Américaine du Mississippi a été inculpée de meurtre au 2ème degré de son enfant mort-né. L'accusation s'est basée sur une recherche qu'elle avait réalisée en ligne sur une pilule abortive. Même si elle a été relaxée en 2020, ces épisodes risquent de se généraliser.

Des données précieuses pour une publicité ciblée

Les données numériques des recherches effectuées sur Internet sont collectées et exploitées pour proposer de la publicité ciblée ou encore à d'autres fins.

Selon une étude, les applications de suivi du cycle menstruel envoient des informations très personnelles sur la santé et les pratiques sexuelles des femmes directement à Facebook comme l'utilisation de contraceptifs, les dates de leurs règles, les symptômes et les humeurs.

Les annonceurs s'intéressent à l'humeur des personnes car cela les aide à cibler stratégiquement les publicités à des moments où elles sont plus susceptibles d'acheter. Par exemple, les femmes enceintes, ou cherchant à le devenir, sont susceptibles de changer leurs habitudes d'achat.

Pas de protection

Dans un contexte de criminalisation de l'avortement, ces informations pourraient être intéressantes pour les services de police. Notamment aux Etats-Unis où, contrairement à l'Europe, aucune loi ne protège les citoyennes et les citoyens de l'utilisation de ces données numériques par la justice.

En Europe, les données de santé sont considérées comme sensibles. Elles sont donc assujetties à des protections particulières par le Règlement Général de Protection des Données (ou le RGPD).

En Suisse, le droit à l'avortement subit actuellement quelques pressions, sans pour autant être remis en question. Deux initiatives fédérales pour réduire le nombre d’IVG ont été lancées en 2021: "La nuit porte conseil" et "Sauver les bébés viables". La récolte des signatures court jusqu’en juin 2023.

>> A écouter à ce sujet:

Reportage radio: Miruna Coca-Cozma

Adaptation web: Andreia Portinha Saraiva

Publié