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Alzheimer, une maladie très répandue et toujours sans remède

La maladie d'Alzheimer est le plus souvent liée au vieillissement.
AndrewLozovyi
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Les scientifiques s'intéressent à un dépistage plus précoce, moins douloureux et moins contraignant pour Alzheimer / La Matinale / 2 min. / le 21 septembre 2022
Provoquant des pertes de mémoire progressives, la maladie d'Alzheimer, dont c'est mercredi la journée mondiale, touche plus de 30 millions de personnes dans le monde et demeure encore sans traitement curatif.

Décrite pour la première fois en 1906 par le médecin allemand Alois Alzheimer, cette maladie "neurodégénérative" conduit à une détérioration progressive des capacités cognitives jusqu'à aboutir à une perte d'autonomie du la personne malade.

Parmi les symptômes figurent les oublis répétés, les problèmes d'orientation, les troubles des fonctions exécutives – projeter, organiser, ordonner dans le temps, avoir des pensées abstraites – ou encore des troubles du langage.

Rien qu'en Suisse, Alzheimer affecte quelque 150'000 personnes et sont dénombrés pas moins de 32'000 nouveaux cas chaque année.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 55 millions de personnes dans le monde souffrent de démence, un ensemble dont la maladie d'Alzheimer est la forme la plus répandue: cette dernière représente 60 à 70% des cas, soit plus de 30 millions de malades.

Le nombre de personnes atteintes devrait être multiplié par trois d'ici 2050, à cause d'une croissance des cas dans les pays à revenu faible et intermédiaire, selon l'OMS.

>> Lire : Les cas d'Alzheimer pourraient doubler d'ici 2050 et poser un défi de prise en charge

Cette explosion va accroître encore le poids sociétal, déjà lourd de cette maladie, pour les proches et pour les systèmes de santé. Déjà actuellement, Alzheimer et les démences comptent parmi les causes premières de handicap et de dépendance pour les personnes âgées.

>> Ecouter le témoignage de Pascal qui, depuis sept ans, a mis son activité entre parenthèses pour aider au quotidien sa femme :

Les proches aidants doivent souvent mettre leur propre vie entre parenthèses. [Keystone/DPA - Oliver Killig]Keystone/DPA - Oliver Killig
Le témoignage d'un proche aidant une personne atteinte de la maladie d'Alzheimer / La Matinale / 1 min. / le 21 septembre 2022

Causes et mécanismes précis inconnus

La maladie d'Alzheimer a beau être la démence la plus fréquente, on ignore encore largement ses causes et mécanismes précis.

>> Lire : Gilles Allali: "La maladie d'Alzheimer commence ses dégâts 10 à 15 ans avant le diagnostic"

Deux phénomènes se retrouvent systématiquement chez les malades d'Alzheimer. D'une part, la formation de plaques de protéines dites amyloïdes, qui compriment les neurones et les détruisent à terme. D'autre part, un second type de protéines, dites Tau, présentes dans les neurones forment, chez les malades, des amas qui finissent aussi par provoquer la mort des cellules atteintes.

Mais on ne sait pas encore bien comment ces deux phénomènes sont liés. On ignore aussi largement ce qui provoque leur apparition et même à quel point ils expliquent le déroulement de la maladie.

>> Ecouter CQFD avec l'éclairage de Gilles Allali, directeur du Centre Leenards de la mémoire du Centre hospitalier universitaire de Lausanne (CHUV) :

Journée mondiale de la maladie dʹAlzheimer. [depositphotos - AndrewLozovyi]depositphotos - AndrewLozovyi
Journée mondiale de la maladie dʹAlzheimer / CQFD / 11 min. / le 21 septembre 2022

On remet de plus en plus en cause l'hypothèse, longtemps dominante, que la formation de plaques amyloïdes soit systématiquement un facteur déclencheur et non la conséquence d'autres mécanismes.

C'est largement la conséquence des difficultés à trouver les facteurs déclencheurs de cette maladie: malgré des décennies de recherche, aucun traitement ne permet aujourd'hui de guérir ni même d'éviter l'apparition de la maladie (lire encadré).

Principale avancée depuis 20 ans, un traitement du laboratoire américain Biogen, qui cible les protéines amyloïdes, a obtenu quelques résultats et été approuvé pour certains cas par les autorités américaines. Mais ses effets restent limités et son intérêt thérapeutique est discuté.

L'âge et les comorbidités

Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), en France, le principal facteur de risque est l'âge: le risque de survenue de la maladie d'Alzheimer augmente après 65 ans et explose après 80 ans.

Des facteurs de risque cardiovasculaires comme le diabète ou l'hypertension, lorsqu'ils ne sont pas pris en charge à l'âge moyen de la vie, sont également associés à une survenue plus fréquente de la maladie, sans que l'on sache encore par quels mécanismes.

La sédentarité est un autre facteur de risque, ainsi que les microtraumatismes crâniens constatés chez certains sportifs, comme les personnes jouant au rugby ou pratiquant la boxe.

>> Lire : Etre en surpoids favoriserait l'apparition de la maladie d'Alzheimer

A l'inverse, le fait d'avoir fait des études et d'avoir eu une activité professionnelle stimulante ainsi qu'une vie sociale active, semble retarder l'apparition des premiers symptômes et leur sévérité.

Dans ces conditions, le cerveau bénéficierait d'une "réserve cognitive" qui permet de compenser, au moins pour un temps, la fonction des neurones perdus. Cet effet serait lié à la plasticité cérébrale, à savoir la capacité d'adaptation de notre cerveau.

>> Ecouter "La première maison non-médicalisée de Suisse dédiée aux cas précoces d'Alzheimer ouvrira en 2023 à Genève" :

L'aspect génétique de la maladie d'Alzheimer. [depositphotos - lightsource]depositphotos - lightsource
La première maison non-médicalisée de Suisse dédiée aux cas précoces d'Alzheimer ouvrira en 2023 à Genève / La Matinale / 2 min. / le 21 septembre 2022

>> Un lien utile: l'Association Suisse pour la Recherche sur l'Alzheimer (APRA)

>> Lire : Quand on découvre qu'on a une maladie taboue: l'Alzheimer

sjaq et l'afp

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Dépistage et prévention

Outre le traitement, les scientifiques s'intéressent aussi au dépistage de la maladie d'Alzheimer, qu’ils et elles désirent plus précoce, moins douloureux et moins contraignant.

C’est l’un des grands enjeux dans cette lutte, car il est difficile de restaurer une perte neuronale: mieux vaut la prévenir. Le but à long terme est de mettre en place des traitements pour stopper son développement, avant même que les premiers symptômes ne se manifestent.

Aujourd’hui, les malades ne consultent que lorsque les symptômes sont déjà là, typiquement, les pertes de mémoire. S'en suivent des tests neuropsychologiques et une confirmation par une ponction lombaire ou une imagerie cérébrale, qui révèlent la présence des protéines responsables de la dégénérescence des neurones.

>> Lire : Une équipe suisse développe un test sanguin pour diagnostiquer l'Alzheimer

Identifier les biomarqueurs

Pour Claire Chevalier, chercheuse au Laboratoire de neuroimagerie du vieillissement des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), l’avenir passera par des dépistages plus légers: "Beaucoup de recherches sortent sur des biomarqueurs sanguins, grâce à de nouvelles technologies permettant de détecter les protéines de façon très sensibles, même quand elles sont présentes en petites quantités. Tout ce qui est protéine amyloïde, marqueurs de neurodégénérescence ou d’autres protéines plus liées à la neuro-inflammation, qui sont des biomarqueurs très intéressants et qui pourraient être utilisés dans un diagnostic précoce ou même avancé de la maladie", explique-t-elle dans La Matinale de RTSinfo.

>> Ecouter  Giovanni Frisoni, directeur du Centre de la mémoire aux HUG, évoquer la prévention de la maladie d’Alzheimer :

Giovanni Frisoni, directeur du Centre de la mémoire aux HUG. [neurocenter-unige.ch]neurocenter-unige.ch
Giovanni Frisoni évoque la prévention de la maladie d’Alzheimer / Le 12h30 / 3 min. / le 21 septembre 2022

Autre piste évoquée, le lien entre nos intestins et cette affection: "Aux HUG, on a montré ce que d’autres groupes dans le monde ont montré: les patients qui ont la maladie d’Alzheimer ont un microbiote différent de patients sains. L’interaction entre ces microbes et la maladie est tout un monde à découvrir. Cela pourrait permettre, dans le futur, soit de diagnostiquer des personnes qui sont à risque de développer la maladie ou même de mettre en place des techniques de prévention par des probiotiques, ou autres, pour prévenir l’apparition des symptômes".

Mais en attendant ces méthodes de diagnostic et de traitement précoce, expertes et experts misent avant tout sur la prévention de la maladie d’Alzheimer en tant que telle.

hkm/sjaq