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"Décider de la vie des gens sur un critère d'âge, c'est une barbarie"

Jean-Jacques Amyot. [YouTube - Dunod Editions]
Jean-Jacques Amyot, psychosociologue / L'invité de la rédaction / 23 min. / le 1 octobre 2015
A l'occasion de la Journée internationale des personnes âgées, le sociologue Jean-Jacques Amyot regrette que l'on considère la vieillesse comme un "mal" associé uniquement à des coûts, et non aussi à des opportunités.

Alors que la Suisse comptera 26% de personnes de plus de 65 ans en 2045, le vieillissement de la population est souvent dépeint de manière inquiétante dans le débat public, notamment en ce qui concerne les dépenses de santé et le financement des retraites.

Ce pessimisme ambiant se nourrit d'une "vision épidémique de la vieillesse", vue comme un "mal" qui touche un nombre important de personnes, estime Jean-Jacques Amyot, interrogé dans le Journal du matin de La Première.

Comment expliquer la hausse des coûts?

Selon lui, "la dévaluation dans la société commence à la retraite", le moment où une grande partie des gens estiment que l'on cesse d'être utile et que l'on devient une charge pour la collectivité. Or, avec cette considération, "on est plus dans une représentation que dans un calcul rationnel", juge le psychosociologue français.

Le vieillissement de la population ne représente que 2% des augmentations des coûts de la santé, affirme Jean-Jacques Amyot. "Selon l'OMS, entre 30% et 60% de l'augmentation des dépenses sont dues à l'évolution de la technique médicale", note-t-il, prenant l'exemple de la différence de coût entre une radiographie et un scanner.

L'apport économique des personnes âgées

Le spécialiste relève aussi le coût de la surmédication: "on a beaucoup trop de prescriptions de médicaments." La faute aux médecins, mais aussi aux personnes âgées, selon Jean-Jacques Amyot, qui relève le coût prohibitif "non pas des médicaments, mais des conséquences (néfastes) des médicaments". Pour lui, il faut miser davantage de prévention.

Par ailleurs, le sociologue relève que, à l'inverse, les personnes âgées "rapportent" à la société: "Imaginez d'un seul coup qu'on puisse effacer la vieillesse. Combien de millions de personnes cesseraient de travailler? Des infirmières, des médecins, des aides à domicile, des gérants de commerce de proximité, ... De plus, ce sont des emplois souvent non délocalisables."

L'âge ne doit pas être le seul critère

Réagissant aux interventions médicales qui, parfois, ne sont plus effectuées en raison de l'âge des patients, Jean-Jacques Amyot estime que "décider de la vie des gens sur un critère d'âge, c'est une barbarie, comme cela le serait sur un critère de couleur de peau ou de nationalité".

Selon lui, la décision de pratique ou non une greffe ou une opération doit être déterminée sur la base d'un "ensemble de critères" et non seulement en fonction de l'âge. C'est d'ailleurs ce qui est habituellement pratiqué dans le monde hospitalier, où une échelle de qualité de vie évalue la possibilité de survie d'un patient avant une intervention, note l'expert.

>> Sur ce sujet, un médecin éthicien a déclaré vouloir éviter les soins après 75 ans :

Seniors. [Keystone - Gaëtan Bally]Keystone - Gaëtan Bally
Ne plus vivre après 75 ans pour ne pas subir le déclin de l'âge / Le Journal du matin / 2 min. / le 1 octobre 2015

dk

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