C'est une petite révolution fromagère, tant professionnelle que gustative, qui pourrait se jouer dans les caves et grottes d'affinage. Ce tissu, breveté depuis l'an dernier dans six pays européens et en voie de l’être au niveau mondial, permet d'emballer les meules de fromage lorsqu'elles sortent de leur bain de sel, juste avant d'entrer en phase de maturation et d'affinage.
Cette nouvelle technique peut être utilisée avec les fromages à pâte dure (Gruyère, Emmental ou Sbrinz, par exemple) et mi-dure (Raclette, Tilsit, Vacherin fribourgeois ou Appenzeller).
Retourner et frotter les meules, du passé?
Sa recette reste évidemment secrète, mais ses bénéfices sont prometteurs. Du côté des fromagers, la maturation est plus rapide et il n'est plus nécessaire de retourner les meules et de les frotter tous les jours. Il suffit de le faire de temps à autre, pour les humidifier et évidemment adjoindre les bactéries et levures spécifiques à chaque variété.
Par ailleurs, le changement climatique rend de plus en plus difficile de maintenir température et taux d’humidité dans les caves. Ce tissu pourrait permettre de compenser ce problème.
>> Voir aussi : Podcast - Nos fromages vont-ils disparaître?
Quant aux fromages eux-mêmes, leur texture sera plus onctueuse et l'arôme plus intense, car le tissu retient l’humidité à l’intérieur de la meule. La couenne (la morge, en langage technique), qui contribue au goût au fromage, se développe à la fois sur le fromage et sur le tissu. Elle sera donc plus fine, ce qui peut constituer un avantage pour certains fromages.
Incompatible avec les AOP?
Selon un article de Terre&Nature, 13 fromageries de tailles diverses ont accepté de tester la méthode. L'emballage se fait pour l'heure manuellement, mais ses inventeurs, confiants dans les avantages de leur trouvaille, travaillent déjà à la mise au point d’une machine à emballer.
Celle-ci pourrait toutefois poser problème, notamment en termes de compatibilité avec les règles actuelles de fabrication des appellations d'origine protégées (AOP). L'interprofession du Gruyère, notamment, la rejette.
Didier Pradervand/jop