Publié

In vitro veritas, ou comment se passer de l'expérimentation animale

L’expérimentation animale soulève de nombreuses questions éthiques.
JacobSt
Depositphotos [JacobSt]
Evolution de l’expérimentation animale dans la recherche en Suisse / La Matinale / 3 min. / le 15 septembre 2021
Pour ne plus utiliser d’animaux comme cobayes pour le test de médicaments, les scientifiques créent de toute pièce de la matière cellulaire similaire à celle de l’organisme humain. En Chine, on fabrique même des poumons miniatures.

Afin de ne plus avoir recours à l’expérimentation animale, les scientifiques doivent respecter la règle dite des "3R", soit "réduire, remplacer et raffiner". Ce dernier mot signifie mieux cibler les expérimentations sur des êtres vivants.

"Quand j’ai commencé en 1997, il n’y avait quasiment pas d’alternative dans les laboratoires. Depuis le début des années 2000, il y a vraiment un boom technologique incroyable", souligne Luc Fournier, président de la Ligue suisse contre la vivisection. "On imprime de la matière vivante. On développe des modèles 3D. Vous pouvez par exemple mettre en culture une tumeur, y adjoindre du tissu sain, ce qui permet de voir les effets lorsque l’on teste un médicament dessus", explique-t-il.

Limites techniques

"On fait des choses extraordinaires depuis 10-15 ans. Mais c'est lent et laborieux", témoigne Luc Fournier. Du côté des militants de la cause animale, on pointe du doigt le manques de moyens et de volonté politique pour bannir l’expérimentation animale. De leur côté, les scientifiques évoquent plutôt des limites systémiques lorsqu'il s'agit d'observer l'organisme dans son ensemble, particulièrement pour le développement de médicaments.

Mais une réelle volonté d'innover existe, surtout chez les jeunes chercheuses et chercheurs. Dernièrement, une équipe de l'Université de Berne annonçait qu'elle avait développé un "zoo in vitro" pour simuler les effets du Covid chez certaines espèces. Il s’agit de cultures de cellules animales soumises au virus, sans recourir à l’infection de vrais animaux.

>> Lire : Un zoo in vitro pour comprendre la transmission du coronavirus

Autre substitut à la pointe: les anticorps recombinants, utilisés pour développer des traitements contre le coronavirus. Les scientifiques de l'Université de Genève travaillent depuis des années sur ces solutions innovantes.

"Traditionnellement, on produit les anticorps avec des animaux", explique Pierre Cosson, responsable de l’implantation du programme 3R à l'Université de Genève. "Maintenant, il existe des stratégies qui permettent de tout faire sans utiliser d’animaux. C'est comme un système immunitaire in vitro. On expose ce système à une protéine, ce qui produit des anticorps."

Poumons artificiels

D'autres exemples vont dans le même sens. Notamment en Chine. Une équipe de recherche y a mis au point des organes humains miniatures, c'est-à-dire des poumons de la taille d'une lentille, destinés à être infectés par le SARS-COV-2, puis traités avec des médicaments expérimentaux.

Un pas supplémentaire est ainsi franchi, parce que ce ne sont plus des cellules animales qui se trouvent dans les éprouvettes, mais des cellules humaines.

Au stade actuel, il n'est toutefois pas possible de mettre en relation ces différents mini-organes pour faire une simulation du corps dans son ensemble. La plupart du temps, il faut toujours utiliser l’organisme entier d'un animal, principalement pour des raisons de sécurité.

Dernier exemple en date: les vaccins contre le Covid qui, avant d'être prescrits à l'ensemble de la population, ont nécessité des tests sur des animaux, puis sur des cobayes humains.

Sujet radio: Sophie Iselin

Adaptation web: Antoine Michel

Publié