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Recyclage des déchets ou nutrition, la Suisse prépare la survie dans l'espace

Vue d’artiste de l'habitat clos qu’ESTEE a désigné. Ce démonstrateur terrestre intégrera des technologies existantes et émergentes liées aux systèmes de support-vie, technologies utiles à la vie en autosuffisance et en milieu confiné pour un équipage de 2 personnes sur des périodes allant de plusieurs semaines à plusieurs mois. Cette plateforme technologique a également pour vocation de permettre des collaborations avec les laboratoires et acteurs de la communauté MELiSSA, en particulier ceux basés en Suisse et en Europe. [ESTEE]
Conquête spatiale : la survie dans l’espace / Tout un monde / 7 min. / le 3 décembre 2020
Une véritable économie circulaire, sans perte de ressources, passe aujourd’hui par la conquête spatiale. Les recherches se multiplient pour créer un système circulaire de survie afin de rendre possible le voyage vers Mars et l’établissement de colonies spatiales.

Une base permanente sur la Lune, un voyage vers Mars et même l’établissement de colonies dans l’espace. A coups de milliards, la conquête spatiale est entrée dans une nouvelle ère. Vivre sur une autre planète n’est plus une utopie.

Pourtant, de grands défis attendent encore les chercheurs. Notamment la survie des voyageurs pendant de longs mois avec très peu de ressources.

Depuis 30 ans, le programme Melissa (Micro-Ecological Life Support System Alternative) cherche à créer un système circulaire de survie dans l’espace. Concrètement, il s’agit de produire de la nourriture, de l’eau, de l’oxygène à partir des déchets d’une mission spatiale.

Transformer l'urine en fertilisant

Dans la campagne zurichoise, à Eschikon, une doctorante de l’école polytechnique de Zurich joue les fermières de l’espace. C’est une astrobiologiste. Grace Crain a recréé les conditions d’une base spatiale dans une pièce minuscule. Elle y fait pousser du soja… grâce à l’urine humaine.

L’urine est collectée, puis soumise à un processus biologique, pour être transformée en un engrais viable pour les plantes. "Le soja est l'une des cultures sélectionnées pour les futures missions spatiales, car il a une teneur élevée en calcium. Il est aussi riche en protéines. Le soja répond à plusieurs besoins nutritionnels d'un astronaute ou d’un habitant d’une base martienne."

Il y a toujours des effets négatifs sur les plantes, notamment à cause du sodium contenu dans notre urine. Et le rendement n’est pas encore suffisant. Les recherches se poursuivent grâce au soutien de la fondation Melissa.

Nourrir les astronautes

Le professeur Emmanuel Frossard supervise l’expérience. Ce spécialiste de la nutrition végétale a vu l’intérêt grandir autour des questions spatiales. "L’idée n'est pas de produire du blé sur Mars pour le consommer sur notre planète. L’objectif est d’alimenter correctement les astronautes pendant une longue période."

"Certains veulent de gros lanceurs pouvant transporter beaucoup de matériel et d’aliments. D’autres estiment qu’il faudra, sur le long terme, pouvoir faire pousser notre nourriture de façon efficace. C’est là-dessus que nous travaillons."

Et ils sont plusieurs en Suisse à travailler sur ce système de survie spatial. A tel point que le Swiss Space Office, le bureau des affaires spatiales, y voit désormais un pôle de compétence pour le pays. La Confédération est donc devenue un des trois plus grands contributeurs du programme Melissa.

Une base en Suisse?

Aujourd’hui, les expériences se multiplient dans toute l’Europe autour de la survie dans l’espace. Mais il y a un manque. Il n’existe pas une base à taille humaine pour tester toutes ces innovations en même temps et en conditions réelles. Ouvrir cet habitat autosuffisant et confiné, c’est le rêve de Théodore Besson, directeur de la start-up vaudoise ESTEE.

"On cherche à développer cette plate-forme dans laquelle notre équipage va pouvoir se promener de compartiment en compartiment pour s’occuper des plantes, des récoltes, de la préparation de la nourriture. L’organisation est optimisée pour que les occupants ne passent pas leur temps à jardiner, mais qu’ils puissent effectuer toutes leurs tâches."

Vue d’artiste de l'habitat clos qu’ESTEE a désigné. Ce démonstrateur terrestre intégrera des technologies existantes et émergentes liées aux systèmes de support-vie, technologies utiles à la vie en autosuffisance et en milieu confiné pour un équipage de 2 personnes sur des périodes allant de plusieurs semaines à plusieurs mois. Cette plateforme technologique a également pour vocation de permettre des collaborations avec les laboratoires et acteurs de la communauté MELiSSA, en particulier ceux basés en Suisse et en Europe. [ESTEE]ESTEE
Conquête spatiale : la survie dans l’espace / Tout un monde / 7 min. / le 3 décembre 2020

Tous les déchets doivent être traités. Les eaux jaunes (urine), grises (laver, préparer les aliments) et noires (matières fécales) doivent être remises dans le circuit pour créer cette vie en autarcie avec un minimum de ressources.

"Cet habitat minimal, c’est le confinement à l’état pur. En développant ces systèmes spatiaux et en faisant leur démonstration sur Terre, nous pouvons également mieux nous préparer au confinement. Pas seulement pour le télétravail, mais aussi par exemple, pour le suivi de la santé."

Une économie vraiment circulaire

Les technologies développées pour la conquête spatiale auraient des débouchées sur Terre. Sur notre planète en recherche de durabilité, c’est un rêve partagé par la plupart des chercheurs, dont le professeur Emmanuel Frossard à Zurich. Le recyclage complet de nos ressources, comme dans l’espace… il y croit !

"C’est un rêve où on ne perd plus de ressources. On n’est pas obligés de dépenser des tonnes de pétrole pour faire de l’engrais azoté ou d’aller chercher du phosphate dans des mines. On boucle les cycles. On respecte les ressources avec lesquelles on travaille. On en tire un maximum d’utilisation. Ce sera parfait. Mais on n’y est pas encore."

En revanche, une présence humaine permanente sur la Lune, c’est pour très bientôt. Le projet Artemis de la Nasa avance une date: 2028. Les Européens devraient suivre, avec le projet Moon Village.

L'astronaute allemand Mathias Maurer s'entraîne à la collecte de spécimens sur les terres désertiques de Lanzarote (îles Canaries, Espagne) [EPA - Elvira Urquijo]

Pascal Wassmer

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De l'espace à Roland Garros

Les douches de l'Open de France de tennis à Paris deviennent comme celles des astronautes, grâce aux technologies développées par l'Agence spatiale européenne (ESA).

La technologie favorise au maximum le recyclage et élimine le gaspillage d'eau et d'énergie. Tout comme ce qui est fait dans la Station spatiale ou dans les bases de l'Antarctique.

"C'est la première fois qu'un système de ce type est installé en France", explique l'ESA. Le système sera également utilisé dans les éditions 2021 et 2022 de Roland-Garros.

Les experts expliquent qu'il s'agit de technologies de recyclage de l'eau développées au cours des 30 dernières années pour des missions spatiales dans le cadre du programme Melissa (Micro-Ecological Life Support System Alternative).

Pour Christophe Lasseur, l'un des superviseurs du programme Melissa, "les technologies de ravitaillement peuvent devenir de moins en moins pratiques à mesure que les explorateurs s'aventurent plus loin dans l'espace". Elles pourraient donc être remplacées par de nouveaux systèmes.

ATS