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Taux de mortalité aux soins intensifs relativement faible en Suisse romande

Sur 230 patients aux soins intensifs des hôpitaux universitaires romands, 46 sont décédés. Mortalité plutôt basse.
Sur 230 patients aux soins intensifs des hôpitaux universitaires romands, 46 sont décédés. Mortalité plutôt basse. / 19h30 / 2 min. / le 5 mai 2020
Deux mois après le début de l'épidémie de Covid-19 en Suisse, 230 patients ont été admis aux soins intensifs des hôpitaux universitaires romands, dont 46 sont décédés. Une mortalité relativement basse, la surcharge ayant été évitée.

Beaucoup de malades du Covid-19 sont sortis guéris des soins intensifs. Aux Hôpitaux universitaires de Genève, le taux de mortalité observé est de 20% sur les 120 malades admis depuis le 4 mars. Et 90% des patients ont été intubés.

A Lausanne, les soins intensifs du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) ont accueilli 110 malades depuis la même date et 22% d'entre eux sont décédés. Deux tiers des patients admis ont été intubés.

"La cause de l'admission aux soins intensifs est le syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA), l'impossibilité du patient à oxygéner l'organisme. Et aussi l'incapacité à respirer tout seul: l'effort devient insurmontable. Dans ces conditions il est vital d'intuber les patients et de recourir à une respiration artificielle", explique Mauro Oddo, médecin-chef des soins intensifs du CHUV, mardi dans le 19h30.

La cause du décès est une défaillance multiple des organes. Le virus cause une inflammation généralisée et ce syndrome touche aussi d'autres organes. "Cela explique que les patients les plus à risque sont ceux qui ont des maladies préexistantes au plan cardiaque, respiratoire et rénal", précise le médecin du CHUV.

Les SDRA non Covid-19 sont plus mortels

Ces statistiques sont encourageantes, estime le président de la Société suisse de médecine intensive (SSMI) Thierry Fumeaux, car le taux de mortalité est inférieur à celui observé habituellement pour le syndrome de détresse respiratoire aigüe. "La mortalité de la SDRA est de 27% pour les cas légers, de 32% pour les cas modérés et de 45% pour les SDRA sévères. Les données actuelles montrent que la plupart des patients Covid-19 devant être intubés et ventilés ont un SDRA modéré ou sévère", détaille-t-il.

Mauro Oddo confirme un taux de mortalité inférieur chez les patients Covid-19: "En tout cas, cela semble plus faible qu'un SDRA chez un patient avec la grippe."

Comment l'expliquer? "Nous étions préparés, nous n'avons pas eu la grosse vague, grâce au réseau, aux discussions et à l'expérience notamment avec nos collègues italiens. Tous les centres en Suisse étaient préparés", répond le médecin du CHUV.

Thierry Fumeaux appelle toutefois à la prudence, car ces chiffres pourraient encore évoluer ces prochaines semaines: "La durée médiane de séjour aux soins intensifs est longue, jusqu'à 25 jours dans certaines grandes études: il est donc probable que la mortalité du SDRA des patients Covid-19 augmente ces prochains jours, avec le décès des patients admis il y a quelques semaines. C'est un effet classique de l'instant de la mesure sur la valeur statistique."

Mortalité deux fois plus élevée au Royaume-Uni et en Chine

Ailleurs, des données préliminaires sur la mortalité dans d'autres centres de soins intensifs des zones les plus touchées par le Covid-19 montrent une mortalité plus élevée. En Italie, le taux de mortalité chez 1591 patients admis aux soins intensifs en Lombardie est de 26%, selon une étude publiée dans la revue JAMA. Au Royaume-Uni et en Chine, des données préliminaires suggèrent un taux deux fois plus élevé.

Mais la comparaison des chiffres entre zones touchées n'est pas toujours pertinente, selon Mauro Oddo, car il manque le recul nécessaire, ainsi que l'ensemble des informations sur la sévérité de la maladie à l'admission du patient.

Pour le médecin du CHUV, deux éléments ont toutefois permis de faire la différence. Premièrement, des ressources matérielles et humaines à disposition, qui ont permis de conserver le "standard habituel" des soins. Ensuite, les échanges avec les collègues italiens, qui ont fait évoluer la prise en charge semaine après semaine: "Par exemple, nous avons adapté la ventilation à chaque patient pour éviter que le ventilateur n'abîme davantage les poumons. Ce traitement individualisé a fait que la mortalité est plutôt en dessous de ce que l'on a habituellement dans ces syndromes de détresse respiratoire."

Deux cas de figure

Les médecins ont aussi appris à connaître les spécificités de la maladie du Covid-19. "Il y a deux cas de figure par rapport aux poumons du malade. Soit il s'agit d'un problème d'oxygénation - le virus atteint les vaisseaux du poumon et le taux d'oxygène dans le sang est insuffisant. Dans ce cas, on peut apporter de l'oxygène sans intuber et mettre le patient sur le ventre. Soit le poumon est directement atteint et le patient a de la peine à souffler. L'intubation est nécessaire et il ne faut pas la retarder car elle est vitale", détaille Mauro Oddo.

En cas de deuxième vague, le médecin-chef des soins intensifs du CHUV est optimiste. "Je suis confiant par rapport à la structure interne des soins au CHUV, elle est solide. Par contre, nous ne contrôlons pas ce qui se passe à l'extérieur. Chaque citoyen reste responsable du suivi des mesures de prévention et d'hygiène, dans le but d'éviter de mettre sous tension le système de santé."

>> Les précisions du professeur Philippe Eckert dans le 19h30 :

Prof. Philippe Eckert "Les mesures de confinement ont permis d'éviter un pic comme celui qui a été atteint en Italie"
Prof. Philippe Eckert "Les mesures de confinement ont permis d'éviter un pic comme celui qui a été atteint en Italie" / 19h30 / 2 min. / le 5 mai 2020

Aurélie Coulon/fme

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Davantage de décès hors des soins intensifs

La plupart des décès n'ont pas lieu aux soins intensifs, mais dans les autres services des hôpitaux. Au 27 avril 2020, il y avait 164 décès Covid-19 aux HUG et 63 au CHUV.

Ne sont admis aux soins intensifs que les patients avec un syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA) sévère ou modérée, qui peuvent bénéficier des soins de réanimation.