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Le rempoissonnement des rivières, une pratique contestée en Valais

La pêche artificielle. [RTS]
Ici la Suisse - La pêche artificielle / Ici la Suisse / 5 min. / le 11 juin 2021
Si le poisson mord à l'hameçon, c'est parce que les sociétés de pêche déversent des kilos de truites dans les lacs et les rivières. En Valais, ce repeuplement artificiel des cours d'eau ne fait pas l'unanimité.

En Suisse, près de 70 millions de truites sont introduites chaque année. En Valais, 28'000 kilos de poissons sont déversés dans les cours d'eau chaque année. Des spécimens assez grands pour être pêchés immédiatement auxquels s'ajoute encore 1 million de plus petits poissons et 500'000 oeufs fécondés artificiellement.

Les premières introductions de poissons sont intervenues dès 1860. Mais ce n'est qu'au XXe siècle que cette pratique est devenue courante. La destruction et la pollution des cours d'eau s'étant intensifiées après la Deuxième Guerre mondiale, un réseau de rempoissonnement a été mis en place pour contrer la diminution des stocks de poissons et maintenir une activité de pêche attractive.

Un travail en pisciculture

Les poissons déversés dans les rivières sont d'abord élevés en pisciculture pendant trois ans et demi. Durant toute cette période, des bénévoles les nourrissent, combattent les maladies et nettoient les bassins.

Grégory Fornay, exploitant de la pisciculture de Vouvry relâche des truites dans la rivière. [RTS - Laurence Bolomey]

Grégory Fornay est le vice-président de la Société des pêcheurs de Monthey. Pour lui, sans un repeuplement artificiel, il n'y aurait plus assez de poissons pour satisfaire l'appétit des pêcheurs amateurs. "A l'ouverture de la pêche, il y a une forte pression sur les cours d'eau et il y a tout ce travail qu'on fait, avec une eau fraîche, de qualité et sans prédateur. Je ne suis pas certain que ça fonctionne de manière naturelle", relève-t-il.

Les effets pervers

La Société des pêcheurs de Sion s'oppose farouchement de son côté au repeuplement artificiel des rivières. Pour elle, cette pratique ne vise qu'à satisfaire le filet du pêcheur.

La Société valaisanne de biologie de la faune dénonce, elle, les effets pervers du rempoissonnement sur les populations sauvages, "que ce soit en termes de survie, de succès reproducteur ou de réduction de la diversité génétique".

Ces associations rappellent que la Confédération préconise de l'utiliser en dernier recours. Elles aimeraient que le canton réaffecte les 700'000 francs que coûte chaque année le repeuplement artificiel à la création d'habitats favorables aux poissons.

Au Grand Conseil, un postulat interpartis en ce sens a récemment été balayé. Le Service de la pêche précise néanmoins qu'à long terme et dans une optique durable, le but est bien de diminuer le repeuplement artificiel.

L'OFEV préconise la prudence

L'Office fédéral de l'environnement estime que des recherches scientifiques doivent être menées car l’introduction de poissons de repeuplement apporte effectivement de nouveaux gènes dans les cours d’eau. Si les poissons immergés sont étrangers et mal adaptés au milieu récepteur, leur matériel génétique peut affaiblir la population indigène en provoquant une diminution de l’adaptation locale.

Les poissons issus du frai naturel présentent de meilleures chances de survie que les autres. Pour l'OFEV, il convient donc de renoncer à tout repeuplement si un bon taux de reproduction naturel est constaté.

Dans son rapport de 2018, l'OFEV estime également que les études menées ne permettent pas d'affirmer que sans repeuplement il n’y aurait quasiment plus de poissons dans la plupart des cours d’eau.

Katia Bitsch / Romain Carrupt

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La pratique du repeuplement des rivières n'est pas la même selon les cantons

La pratique du repeuplement des rivières par canton [OFEV - Service revitalisation et pêche]