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La justice neuchâteloise freine les expulsions de criminels étrangers

Expulsions d’étrangers criminels: disparités entre cantons
Expulsions d’étrangers criminels: disparités entre cantons / 19h30 / 2 min. / le 26 novembre 2017
En vigueur depuis un an, le renvoi automatique des criminels étrangers varie d'un canton à l'autre. A Neuchâtel, plus d'un cas sur deux n'aboutit pas à une expulsion, a appris dimanche la RTS.

Depuis le 1er octobre 2016, un étranger reconnu coupable de certains délits, qui vont de l'escroquerie et du vol par effraction au meurtre, doit être renvoyé après avoir purgé sa peine. Elaborées à la suite de l'initiative UDC votée en 2010, les nouvelles dispositions du code pénal prévoient toutefois une clause de rigueur.

Cette clause permet au juge de renoncer "exceptionnellement" à la procédure d'expulsion, notamment pour les personnes qui ont grandi en Suisse. Elle devait être appliquée avec parcimonie, promettaient les partisans de la loi au Parlement en 2015.

"On a fait un peu de résistance"

Deux ans plus tard, les cantons, plus ou moins enclins à l'utiliser, n'affichent pas la même ligne. A Neuchâtel, l'un des rares cantons à disposer d'une statistique, le Ministère public a indiqué à la RTS avoir renoncé à requérir l'expulsion dans 28 des 49 cas traités (57%) entre le 1er octobre 2016 et le 14 novembre 2017. Cinq renvois ont été prononcés et 16 cas sont encore pendants.

"On a fait un peu de résistance", reconnaît le procureur général neuchâtelois Pierre Aubert, qui assume une application souple de la loi. Il renonce à demander l'expulsion quand elle lui semble disproportionnée pour un étranger qui a toutes ses attaches affectives en Suisse.

"On peut avoir des discussions de cantine très fermes quand on boit une bière et qu'on mange des schubligs (...). Mais quand on est dans une salle d'audience avec des gens en face de soi, on est obligé d'avoir une pensée un peu plus fine", explique Pierre Aubert.

"Ce n'est pas le rôle du procureur d'avoir des scrupules"

Autre canton, autre philosophie. A Bâle-Campagne, le Ministère public, qui a requis entre le 1er octobre 2016 et le 21 novembre dernier 26 expulsions, n'a jamais invoqué la clause de rigueur. Il réclame systématiquement le renvoi, même pour les étrangers nés en Suisse.

"Ce n'est pas le rôle du procureur d'avoir des scrupules. Nous essayons d'appliquer la volonté du législateur, en tout cas tel que nous l'interprétons", indique Angela Weirich, procureure générale de Bâle-Campagne.

Pour l'instant, aucun cas de "secondo" n'a été tranché par les tribunaux de Bâle-Campagne. Mais la procureure Angela Weirich attend avec impatience de savoir s'ils confirmeront la sévérité qu'elle requière pour les étrangers criminels.

Pierre Nebel/vtom

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