Publié

Le gouvernement genevois veut des réponses après la mort d'un requérant afghan

Thierry Apotheloz, conseiller d'État charge de la cohésion sociale, s'exprime lors d'une conférence de presse dédiée au nouveau calendrier de versement des rentes AVS-AI par l'OCAS, ce jeudi 11 novembre 2021 a Genève. [KEYSTONE - Martial Trezzini]
Genève va-t-il arrêter de renvoyer les migrants avec un risque suicidaire? Interview de Thierry Apothéloz / La Matinale / 5 min. / le 8 décembre 2022
"Comment se fait-il qu'un certificat médical ne puisse pas compter dans une procédure administrative?", s'est interrogé jeudi dans La Matinale le conseiller d'Etat genevois Thierry Apothéloz après le suicide à Genève d'un requérant d'asile afghan qui venait d'apprendre qu'il ne pourrait pas rester en Suisse.

Des requérants afghans et des associations de défense de l'asile ont manifesté jeudi en fin de journée à Genève. Invité dans La Matinale de la RTS plus tôt dans la journée, le responsable de l'accueil des requérants d'asile dans le canton avait indiqué accepter de rencontrer ces manifestants, promesse qu'il a tenue (lire encadré).

Le Conseil d'Etat genevois entend interpeller les autorités fédérales, notamment le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM), car le gouvernement cantonal a "d'abord besoin de comprendre ce qu'il s'est passé, parce que ce jeune avait un certificat médical attesté indiquant des risques importants de son intégrité".

Selon Thierry Apothéloz, "le SEM ne l'a pas pris en compte", ce qui interpelle. "Comment se fait-il qu'un certificat médical ne puisse pas compter dans une procédure administrative?", s'interroge le ministre. "C'est une question que le Conseil d'Etat a souhaité apporter, ainsi que, dans l'intervalle d'une réponse satisfaisante, nous assurer que l'ensemble des réfugiés mineurs non accompagnés puissent être protégés", a-t-il développé.

"Le système est sous pression"

Toujours selon Thierry Apothéloz, "le Conseil d'Etat genevois a décidé de créer une délégation du Conseil d'Etat à la migration pour étudier les situations qui sont présentées, parce qu'évidemment, il y a des situations humaines qui méritent une attention politique particulière. Au fond, c'est ce que nous faisons depuis plusieurs années avec beaucoup d'attention", relève le conseiller d'Etat.

Il ajoute que la délégation étudie chaque dossier, sans préciser s’il est fréquent que le canton n’effectue pas les renvois. Dans une interview au Courrier, le conseiller d’Etat chargé de l’asile Mauro Poggia estimait qu’il serait illégal pour Genève de ne pas appliquer une expulsion décidée par Berne.

Pour Thierry Apothéloz, le canton de Genève a aussi rempli sa mission d'encadrement psychologique du jeune Alireza. "Il était suivi par un médecin, suivi par un psychologue, il avait une famille relais, il avait une équipe éducative bienveillante, très encadrante à son égard".

Malgré tout, "il faut se rappeler que la situation d'asile en Suisse est extrêmement sous tension, regrette Thierry Apothéloz. Nous accueillons des ressortissants et ressortissantes de l'Ukraine. Nous avons 15% de personnes qui viennent en Suisse qui sont des réfugiés mineurs non accompagnés. Oui, le système est sous pression" conclut-il.

Le conseiller d'Etat a également tenu à démentir le bouclage du foyer de l'Etoile, où résidait Alireza lundi. "Je démens formellement, a déclaré Thierry Apothéloz dans La Matinale. Les jeunes résidant au Foyer de l'Etoile avaient le droit de sortir. Seules les personnes extérieures ont été empêchées d'entrer." Une vingtaine de jeunes de la communauté afghane avaient en effet décidé de s'y rendre lundi matin pour rendre hommage à leur ami. Craignant des débordements, l'Hospice général a donc fermé les grilles du foyer. Contrairement aux déclarations du conseiller d'Etat, nos journalistes sur place ont constaté un bouclage intégral du foyer, où personne ne pouvait ni entrer ni sortir.

Propos recueillis par Valérie Hauert

Sujet radio (manifestation): Anouk Pernet

Adaptation web: Julien Furrer/ami

Publié

Manifestation des jeunes Afghans dans les rues genevoises

Une manifestation a réuni plusieurs centaines de personnes jeudi en fin de journée à Genève, devant l'Hôtel-de-Ville et l'Hospice général. L'action était organisée par des jeunes Afghans, soutenus par les associations de défense de l'asile. Ils ont notamment discuté avec Thierry Apothéloz.

Leurs revendications sont de deux ordres. Les premières concernent le SEM. Les manifestantes et manifestants demandent des explications publiques sur le renvoi d'Alireza. Les secondes concernent le Canton, à qui il est par exemple demandé de créer des foyers aux dimensions plus petites et mieux encadrés.

>> Le reportage du 19h30 :

Le suicide d'un jeune requérant d'asile afghan la semaine dernière a marqué les esprits à Genève
Le suicide d'un jeune requérant d'asile afghan la semaine dernière a marqué les esprits à Genève / 19h30 / 2 min. / le 8 décembre 2022

Un abri PC ouvert pour gérer l'afflux

Le canton de Genève a ouvert un premier abri de protection civile (PC) de 80 places à Lancy destiné à des hommes seuls, les lieux d'hébergement de l’Hospice général étant saturés. Cette décision a été prise en dernier recours pour faire face à l’afflux de requérants d’asile depuis le mois de novembre. L’ouverture d’autres lieux similaires est envisagée si les arrivées se poursuivent au même rythme.

A Genève, le dispositif asile de l’Hospice général (HG) prend en charge aujourd’hui plus de 6500 personnes. S'y ajoutent 3100 réfugiés en provenance d'Ukraine titulaires d'un permis S, relève le canton jeudi dans un communiqué.

Afin de libérer une partie des centres fédéraux d’asile, le Secrétariat d'Etat aux migrations a pris la décision le 27 octobre de transférer dans les cantons les requérants dont la procédure d'asile n'est pas encore achevée. Cela a engendré une accélération des arrivées: plus de 320 demandeurs d’asile ont été accueillis à Genève depuis lors.

En raison de l’accueil des réfugiés ukrainiens, le dispositif d’hébergement genevois était déjà sous forte pression. Le grand nombre d’arrivées survenues depuis l’été est venu peser sur le dispositif d’hébergement, qui atteint aujourd’hui sa capacité maximale, toutes les autres solutions étant également épuisées.