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Les monnaies locales romandes se multiplient mais restent peu utilisées

La monnaie locale valaisanne Farinet a été lancée en mai 2017, avec 500'000 billets imprimés. [Keystone - Olivier Maire]
Les monnaies locales romandes se multiplient mais restent peu utilisées / La Matinale / 3 min. / le 18 octobre 2018
Farinet, Léman ou Epi, les projets de monnaies locales destinées à encourager le commerce de proximité ont fleuri ces dernières années en Suisse romande. Celles-ci peinent toutefois à atteindre une masse critique.

Quatre monnaies locales ont vu le jour en Suisse romande ces dernières années: le Léman sur l'arc lémanique et en France voisine en 2015; le Farinet en Valais en 2016 et le 20 Val dans le Val-de-Travers (NE) l'année dernière; enfin l'Epi, qui vient d'être lancé dans le Gros-de-Vaud et au Pied du Jura.

Et d'autres initiatives sont en préparation, avec le Dragon à Fribourg, la Grue dans les régions du Saanenland (BE), du Pays-d'Enhaut (VD) et de la Gruyère (FR), ou dans le canton de Neuchâtel, où le projet est encore flou.

Sensibiliser le public

Toutes ces monnaies locales ont pour finalité de "soutenir les petits commerces indépendants de détail, mais aussi de favoriser en général le commerce de proximité", explique Edouard Perroud, président de l'association Monnaie locale Fribourg.

Selon lui, la monnaie locale peut sensibiliser et inciter le grand public à "aller dans les petites boutiques" ou "acheter chez les producteurs qui font de la vente directe".

>> Pour plus d'informations sur les monnaies locales qui existent en Suisse, leur utilité, les dispositions légales, lire l'éclairage :

Réaction à l'incertitude économique

L'autre point commun des monnaies complémentaires est de résulter, quasiment systématiquement, de bouleversements et de crises économiques.

Ce fut le cas pour le WIR et les chèques REKA dans les années 1930 et 1940, ou avec le Netzbon, créé à Bâle au début des années 2000 dans le sillage de la crise de l'industrie chimique. Aujourd'hui, la multiplication des monnaies locales apparaît comme une réponse à la crise financière de 2007-2008.

Encore confidentielles

Si leur finalité est souvent saluée, dans l'usage ces monnaies locales restent pour l'heure confidentielles. En Valais, avec l'équivalent de 200'000 francs en circulation, le Farinet n'a pas encore atteint un volume significatif.

Les promoteurs de la monnaie valaisanne espèrent que l'entrée dans son giron de la ville de Sion, qui a décidé la semaine dernière d'accepter ces billets à certains de ses guichets, lui permettra de décoller.

Avec respectivement 1335 et 170'000 unités en circulation, le 20 Val et le Léman peinent aussi à atteindre la masse critique. Actuellement, 560 entreprises sont membres de la communauté de paiement du Léman.

"C'est un très bon début, mais ce n'est évidemment pas suffisant pour que toutes les professions et toutes les branches économiques soient représentées", admet Jean Rossiaud, porte-parole et cofondateur de la monnaie alternative lémanique, qui espère que le nombre d'enseignes partenaires aura grimpé à 5000 d'ici trois ou quatre ans.

"Sympathique" sur le principe

Il s'agit là de la principale difficulté des monnaies locales: l'argent ne circule pour l'instant qu'au sein d'un cercle de commerces et d'entreprises trop restreint.

Les acteurs économiques qui jouent le jeu des monnaies locales sont bien sûr convaincus de leur utilité, mais ils déplorent le peu de participation des autres entreprises.

Pour Xavier Martig, patron d'un garage et d'une société de réalisation publicitaire dans le Chablais valaisan, le bilan est "sympathique au niveau du principe", mais il déplore qu'il y ait "très peu d'entrepreneurs ou de commerces dans la région qui profitent et qui utilisent cette monnaie".

Or, faute de véritable élan populaire, les monnaies alternatives courent le risque de disparaître, comme cela est arrivé en juin dernier au Bonobo, à Berne.

Sujet radio: Fabrice Gaudiano

Adaptation web: Pauline Turuban

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