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En Turquie, troisième jour de manifestations contre le gouvernement

Des milliers de personnes se sont de nouveau réunies dimanche sur la place Taksim, coeur des manifestations hostiles au gouvernement d'Erdogan. [EPA - Sedat Suna]
Des milliers de personnes se sont de nouveau réunies dimanche sur la place Taksim, coeur des manifestations hostiles au gouvernement d'Erdogan. - [EPA - Sedat Suna]
Des milliers de personnes se sont rassemblées dimanche pour la troisième journée consécutive à Istanbul et à Ankara, pour protester contre le gouvernement Erdogan.

Au troisième jour de leur mouvement, les manifestants turcs ont maintenu dimanche la pression sur le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan en occupant la place Taksim d'Istanbul.

Tout l'après-midi, des milliers de personnes ont envahi l'emblématique place du centre de la ville, désormais vide de toute présence policière après deux jours de violents incidents qui ont fait plusieurs centaines de blessés et provoqué l'arrestation de plus de 1700 manifestants à travers la Turquie. Deux personnes seraient mortes, selon Amnesty International.

Violences à Ankara

Si aucun incident n'a été signalé à Istanbul dans la journée, les forces de l'ordre sont une nouvelle fois intervenues dimanche après-midi à Ankara pour disperser, à grand renfort de gaz lacrymogène et de canons à eau, un millier de personnes qui se dirigeaient vers les bureaux présidentiels.

Dans la capitale Ankara, les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogène pour disperser les protestataires. [EPA - Evrim Aydin]

Dans la nuit de samedi à dimanche déjà, des affrontements très violents avaient opposé policiers et manifestants dans la capitale, causant d'importants dégâts.

Selon le syndicat des médecins d'Ankara, 414 civils avaient été blessés dans ces incidents, dont six souffrant de graves traumatismes à la tête. De son côté, l'agence de presse Anatolie a fait état de 56 blessés au sein des forces de l'ordre.

agences/asch

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Retour sur deux premiers jours de crise

Les manifestants accusent le Premier ministre turc Recep Erdogan de dérive autoritaire et de vouloir "islamiser" la société. Le récent vote d'une loi restreignant la consommation et la vente d'alcool a suscité l'ire des milieux libéraux.

Le mouvement de contestation a débuté à Istanbul vendredi à l'aube, avec l'intervention musclée de la police pour déloger quelques centaines de militants qui occupaient depuis trois jours le parc Gezi, sur la place Taksim. Ces personnes voulaient empêcher le déracinement de 600 arbres pour un projet urbain contesté. Le Premier ministre estimait que la place n'était pas un lieu pour "les extrémistes".

Dès vendredi soir, la contestation s'est propagée à d'autres villes comme Izmir (ouest), Antalya (sud) ou Ankara.

Samedi en milieu de matinée, les affrontements ont repris. La police a fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau. Les manifestants ont riposté par des jets de pierre. Le Premier ministre a alors clamé que la police resterait "encore demain".

Samedi dans la journée, le président Abdullah Gül a appelé au "calme", jugeant le niveau de protestation "inquiétant". Le vice-Premier ministre a quant à lui présenté ses "excuses" pour les tirs de gaz. Les Etats-Unis et le Royaume Uni aussi ont appelé le gouvernement à la retenue.

Face à ces réactions, le Premier ministre a concédé que la police avait agi de façon "extrême" et a ordonné une enquête. En milieu d'après-midi samedi, la police quittait la place Taksim.

Réactions en Turquie et dans le monde

Au sein même du pouvoir, plusieurs voix dissonantes se sont fait entendre pour regretter la brutalité des interventions policières. Le chef de l'Etat Abdullah Gül a jugé "inquiétant" le niveau de la confrontation. Et le vice-Premier ministre Bülent Arinç a prôné le dialogue "plutôt que de tirer du gaz sur des gens".

Des pays alliés occidentaux, comme les Etats-Unis et le Royaume Uni samedi, puis la France dimanche, ont eux aussi appelé le gouvernement turc à la retenue.

Le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a lui-même déploré les dommages causés par ces événements à la "réputation" de son pays qui, a-t-il dit sur son compte Twitter, est "admiré dans la région et dans le monde".

Face à ces réactions, le Premier ministre a reculé et concédé samedi que la police avait agi dans certains cas de façon "extrême". "Il est vrai qu'il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police".