Modifié

Les rebelles syriens continuent leur avancée à Alep et prennent l'aéroport

Les djihadistes et rebelles ont pris la majeure partie de la ville d'Alep, un coup dur pour le pouvoir de Bachar al-Assad
Les djihadistes et rebelles ont pris la majeure partie de la ville d'Alep, un coup dur pour le pouvoir de Bachar al-Assad / 19h30 / 2 min. / samedi à 19:30
Une coalition de groupes rebelles dominée par des islamistes a pris samedi la majeure partie d'Alep, la deuxième ville de Syrie, et son aéroport, lors d'une offensive éclair qui a fait plus de 320 morts. D'autres localités stratégiques dans les provinces voisines d'Idleb et de Hama sont également tombées.

Les rebelles du groupe islamiste Hayat Tahrir al Cham (HTS) ont pris le contrôle d'une grande partie d'Alep, dans le nord-ouest de la Syrie, dans le cadre d'une offensive éclair qui a contraint l'armée syrienne à se redéployer après la perte de plusieurs dizaines de soldats. L'armée syrienne a déclaré qu'elle préparait une contre-offensive pour rétablir l'autorité du régime de Bachar al-Assad dans cette région proche de la frontière avec la Turquie.

Plus de 300 morts

"Le HTS et les factions alliées ont pris la majeure partie de la ville d'Alep, des bâtiments gouvernementaux et des prisons", a précisé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). L'aéroport a également été pris. Célébrant leur entrée dans Alep, djihadistes et rebelles ont défilé dans les rues, installé leur drapeau devant un poste de police et déchiré un portrait de Bachar al-Assad.

L'armée syrienne a confirmé la présence de combattants antirégimes dans de "larges parties" d'Alep et déploré des "dizaines" de morts et de blessés dans l'offensive. Selon un dernier bilan de l'OSDH, 327 personnes ont été tuées depuis mercredi: 183 combattants du HTS et factions rebelles, 100 soldats syriens et membres des forces progouvernementales ainsi que 44 civils.

Bombardements sur la ville

L'état-major syrien a déclaré que les rebelles avaient attaqué sur plusieurs fronts et en nombre, ce qui l'a amené à "mettre en œuvre une opération de redéploiement destinée à renforcer les lignes de défense afin d'enrayer l'offensive, de préserver la vie des civils et des militaires et de préparer une contre-attaque". Il a ajouté que ses bombardements avaient empêché les rebelles de fixer leurs positions.

Samedi après-midi, une frappe aérienne a ciblé des "véhicules civils" dans un secteur d'Alep pris par les rebelles, tuant 16 civils, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), en précisant que le raid avait été "probablement" mené par des avions russes.

Des combattants de l'opposition roulent dans les rues d'Alep, en Syrie, le samedi 30 novembre 2024. [KEYSTONE - GHAITH ALSAYED]
Des combattants de l'opposition roulent dans les rues d'Alep, en Syrie, le samedi 30 novembre 2024. [KEYSTONE - GHAITH ALSAYED]

La ville se referme

"La plupart des civils restent chez eux et les institutions publiques et privées sont quasiment toutes fermées" à Alep, ville de quelque deux millions d'habitants et poumon historique du pays d'avant-guerre, a dit la radio progouvernementale Sham FM. Le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, a déclaré à l'AFP que djihadistes et rebelles avaient rapidement pris de vastes secteurs d'Alep "sans rencontrer de résistance significative".

"Les lignes du régime se sont effondrées à un rythme incroyable qui a pris tout le monde par surprise", estime Dareen Khalifa, experte de l'International Crisis Group. Le chef du "gouvernement" proclamé par le HTS à Idleb (nord-ouest), Mohammad al-Bachir, a affirmé jeudi que l'offensive avait été lancée après que "le régime a massé des forces sur les lignes de front et bombardé les zones civiles".

itg avec les agences

Publié Modifié

Un conflit oublié par l'Occident

Invité de Forum, le rédacteur en chef de la revue militaire suisse Alexandre Vautravers souligne que cette attaque rappelle que la guerre a continué et qu'"on a simplement en Occident oublié que ce conflit n'avait jamais été résolu. On a été dans une phase de léthargie, parce qu'il y avait d'autres priorités, comme l'Ukraine".

Il rappelle également que dans la région se trouvent "au moins six acteurs relativement importants". Mais aucun "n'a la capacité militaire de subjuguer et de vaincre les autres. Cela fait que la situation est indéterminée depuis de nombreuses années".

>> Ecouter l'interview de Forum :

Alexandre Vautravers est rédacteur en chef de la Revue militaire suisse et chercheur associé au Geneva Centre for Security Policy (GCSP).
Le régime de Bachar al-Assad est-il en train de vaciller? Interview d'Alexandre Vautravers / Forum / 3 min. / samedi à 18:07

"Le maillon le plus faible, c'est le régime d'Assad"

Cette offensive intervient maintenant "parce que la Syrie est très affaiblie, car elle dépendait principalement du soutien des Iraniens et des miliciens du Hezbollah sur son territoire. Or, les gens du Hezbollah ont été rapatriés au Liban pour faire face à l'offensive israélienne. Et le régime iranien aujourd'hui est sous contrainte", indique Gilles Kepel, politologue spécialiste du monde arabe, dans le 19h30. Il rappelle que les Israéliens a abondamment bombardé les forces iraniennes en Syrie cette année.

Le Hamas palestinien "était soutenu par la Syrie, soutenu par le Hezbollah, soutenu par l'Iran". Or, "tout ce front qui était lié au Hamas et qui était dirigé par l'Iran, qu'on appelait l'axe de la résistance à Israël, est aujourd'hui très affaibli. Et le maillon le plus faible, c'est le régime d'Assad", développe Gilles Kepel..

"Probablement aussi que les Russes, qui jouaient un rôle très important, notamment dans le ciel, sont occupés aujourd'hui en Ukraine et ont retiré de Syrie un certain nombre de leurs bataillons, de leur aviation et également de leurs troupes au sol", ajoute le politologue.

"Il faut voir si l'offensive peut aller au delà d'Alep (...). Est ce que la route de Damas est ouverte ou non?", s'interroge Gilles Kepel.

>> Ecouter l'interview de Gilles Kepel, politologue spécialiste du monde arabe, dans le 19h30 :

L’analyse de Gilles Kepel, politologue spécialiste du monde arabe, sur la situation actuelle en Syrie
L’analyse de Gilles Kepel, politologue spécialiste du monde arabe, sur la situation actuelle en Syrie / 19h30 / 4 min. / samedi à 19:30

La Russie s'entretient avec la Turquie et l'Iran

La Russie a annoncé samedi avoir évoqué lors d'entretiens séparés avec l'Iran et la Turquie la situation "dangereuse" en Syrie. La Russie et l'Iran sont les principaux alliés du régime de Bachar al-Assad, tandis que la Turquie est un soutien des factions rebelles.

Lors de l'appel téléphonique entre les chefs de la diplomatie russe et turque, Sergueï Lavrov et Hakan Fidan, ils ont exprimé "la nécessité de coordonner une action commune pour stabiliser la situation en Syrie".

Alep, dans le nord de la Syrie