LE MARCHÉ DE L'ASTROLOGIE
D’Elsa Schiaparelli en passant par Coco Chanel ou Christian Dior, les créateurs de mode se sont souvent inspirés des arts divinatoires. Mais l’astrologie ne s’arrête pas au monde de la mode. Les marques ont compris le pouvoir marketing de l’astrologie et n’hésitent pas à s’approprier les codes ésotériques.
"Capicorne, mangez de la salade césar", "Balance, à vous les planches de fromages": en 2020 en Belgique, Deliveroo s’est par exemple lancé dans la Foodstrology, soit une classification des signes du zodiaque selon leurs habitudes alimentaires. Amazon a aussi tenté le coup en 2019: tous les mois, le géant du e-commerce proposait dans sa newsletter américaine un horoscope accompagné de suggestions d’achat. Mais le flop a été retentissant, la communauté astro n’a pas validé.
En 2018, aux Etats-Unis, les Américains ont dépensé 2,2 milliards de dollars dans le marché des produits mystiques (qui comprend astrologie, cartomancie, lecture des lignes de la main…), selon un rapport de la société d’études de marché IBISWorld.
Mais comment en est-on arrivé là? Cette pratique divinatoire remonte à plusieurs millénaires. Son origine est si ancienne que les savants se sont longtemps disputés pour savoir d’où elle venait et de quand elle datait. On la retrouve dans la culture maya, chinoise, indienne, égyptienne, arabe et occidentale.
LES ORIGINES DE L'ASTROLOGIE
Au milieu du 3e millénaire avant J.-C., en Mésopotamie, ses premières formes apparaissent en même temps que l’étude des astres, c’est-à-dire l’astronomie.
Les plus anciens horoscopes proviennent de Babylone et datent de 410 avant notre ère. Pour les historiens, l’intérêt chronologique de ces horoscopes est énorme.
Si on est capable de les dater, on est capable d’établir une chronologie des rois et de leurs successeurs, qu’il s’agisse des Babyloniens ou d’une partie de la noblesse française, jusqu’à Louis XIV.
Au fil des siècles, l’astrologie évolue et s’adapte aux différentes cultures et traditions. Ce savoir ne sera véritablement remis en question qu’en 1666, quand Colbert, ministre de Louis XIV, interdit l’astrologie à l’Université. Conséquence: on diabolise l’astrologie et la relégue au rang de superstition.
L'HOROSCOPE DE PRESSE
L’avènement des médias de masse marque le retour en force de l’astrologie dans la culture populaire. Au Royaume-Uni, en 1930, le Sunday Express cherche une façon originale de couvrir la naissance de la Princesse Margaret, la petite sœur de la reine Elizabeth. Le média fait appel à l’astrologue Richard Naylor pour écrire son thème astral. L’horoscope de presse est lancé.
Radio ou télévision, l’astrologie va s’adapter à tous les nouveaux moyens de communications. De l'astroflash des magasins dans lesquels on retrouve des ordinateurs capables de prédire l’avenir des gens, en passant par l’émission radio de Madame Soleil, ou le premier horoscope télévisé d’Elizabeth Teissier, l’horoscope est partout dès les années 1970.
Dernière invention en date: la télé-réalité sauce astro. Prime Video a sorti en janvier 2023 un programme où quatre candidates cherchent l’amour grâce à leur thème astral, le tout présenté par Nabilla.
L'ASTROLOGIE: EST-CE FÉMININ?
Étant donné sa présence dans la presse féminine, l’astrologie a très longtemps été traitée comme une affaire "de bonne femme". Dans la pop culture, ce sont souvent les héroïnes qui se réfèrent à leur horoscope. Carrie Bradshaw dans Sex and the City, Rachel dans Friends. Plus récemment, Netflix a sorti une série qui s’appelle "guide astrologique des cœurs brisés". La cible sont encore et toujours les femmes. En novembre 2020, 1 femme sur 2 déclarait croire en l’astrologie, selon un sondage Ifop.
Avec le contexte de la quatrième vague féministe et post #metoo, beaucoup de femmes astrologues se présentent comme des "witches", ou sorcières, une figure réhabilitée par une frange mouvement, au même titre que les sciences divinatoires ou occultes, l’astrologie étant perçue comme un instrument d’émancipation du système patriarcal. L’horoscope devient féministe, inclusif, et même écolo.
LES JEUNES ET L’ASTROLOGIE
Les jeunes raffolent d’astrologie. Selon un sondage sorti fin 2022, 49% des jeunes Français (entre 11 et 24 ans) estiment que l’astrologie est une science, contre 43% en 1999. Ce chiffre augmente chez les habitués de TikTok: 53% pour celles et ceux qui vont plusieurs fois par jour sur l’application. Cet essor en faveur de l’astrologie s’inscrit dans une révolution des pratiques informatives. Aujourd’hui, les jeunes se méfient de plus en plus de "l’information verticale issue des autorités". Ce qui profite aux réseaux sociaux.
Hélène Joaquim