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Les plaintes des soldats russes envoyés sur le front en Ukraine

Vidéo du 18 février 2023 de mobilisés russes de la région d'Omsk qui s'adressent à Vladimir Poutine. [Telegram]
Des soldats russes mobilisés en Ukraine appellent à l'aide / La Matinale / 1 min. / le 15 mars 2023
Les appels à l’aide de soldats russes qui combattent en Ukraine se multiplient. Ces dernières semaines, une quinzaine de vidéos de mobilisés s’adressant à Vladimir Poutine ou au gouverneur de leur région ont été publiées.

Dans ces vidéos, on voit une dizaine ou une vingtaine d'hommes dans un champ ou dans un sous-sol, cagoulés. Ils se plaignent d'être envoyés à l'assaut sans soutien d'artillerie, ni reconnaissance. Ils déclarent avoir été formés pour être à l'arrière mais se retrouver en première ligne, dans des assauts très meurtriers.

Ils disent également avoir été intégrés aux troupes des républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk, un signe, selon les experts, que la mobilisation locale dans ces zones annexées n'est plus suffisante.

D'autres se plaignent de devoir acheter à leurs frais médicaments et nourriture, d'être menacés s'ils se rebellent.

Parfois ce sont les mères ou femmes de soldats qui prennent la parole: "Nos hommes sont prêts à se battre pour la patrie, mais pas sans formation".

Capture d'écran d'un compte Telegram russe où l'on voit des mères et des femmes de soldats russes s'adresser à Vladimir Poutine. Région de Moscou le 11 mars.
Capture d'écran d'un compte Telegram russe où l'on voit des mères et des femmes de soldats russes s'adresser à Vladimir Poutine. Région de Moscou le 11 mars.

Pas de critique directe de la guerre

Le ton reste patriote, ce n'est pas le sens de la guerre en Ukraine qui est remis en question, mais l'absence de moyens, la prise de risque inutille.

Souvent, ces hommes s'adressent directement au président russe Vladimir Poutine, en espérant qu'il corrigera ce qui est perçu comme un dysfonctionnement. De leur côté, les autorités locales promettent des vérifications, sans que l'on sache si elles auront lieu.

Le leader tchéchène, Ramzan Kadyrov, a estimé pour sa part cette semaine, en réaction à l'une de ces vidéos, que les soldats devaient trouver eux-mêmes des solutions plutôt que de se lamenter.

Problème d'approvisionnement connu

Pour Yannick Smaldore, rédacteur en chef adjoint de la revue DefTech, interrogé dans La Matinale de mercredi, il faut relativiser l'impact militaire de ces critiques. "Je ne pense pas que c'est un aveu de défaite. Les Russes ne sont pas prêts à avouer leur défaite. C'est plus un symptôme, un symptôme parmi d'autres. Un symptôme très visible pour les sociétés occidentales, mais ce n'est pas quelque chose qui va changer la donne en terme militaire."

"En terme politique, médiatique, si ces vidéos sont relayées par les médias alternatifs en Russie, si elles trouvent un écho auprès de la population russe, peut-être que cela pourrait changer les choses mais la propagande russe et la mainmise du Kremlin sur les médias russes est telle qu'il y a peu de chances que cela perce", relève l'expert.

De plus, il est compréhensible que les soldats se considèrent comme de la chair à canon, note Yannick Smaldore. "Le problème de matériel et de conditions pour l'armée russe est établi depuis de nombreux mois. Il y a de vrais problèmes d'approvisionnement de munitions, d'équipements même basiques (vivres, vêtements sur certaines zones du front). Pour ces soldats il est justifié de s'adresser directement à Vladimir Poutine d'autant plus qu'on sait qu'en Russie les informations ont du mal à remonter jusqu'au Kremlin. On peut comprendre le ras-le-bol de ces soldats."

Isabelle Cornaz/Anouk Henry/lan

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