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En Afrique, les bébés séropositifs bénéficient enfin d'un traitement adapté

Un nouveau traitement pour soigner les enfants atteints du sida en Afrique?
Un nouveau traitement pour soigner les enfants atteints du sida en Afrique? / La Matinale / 3 min. / le 24 mai 2022
Un médicament anti-sida moins cher et mieux accepté par les jeunes enfants, car sous forme de sirop, a révolutionné la lutte contre le virus dans les pays en développement. Il est distribué dans plusieurs pays d'Afrique, notamment au Kenya.

Nichée au cœur du bidonville du Kibera, le plus grand du Kenya, la clinique Lea Toto assure le traitement de plus de 300 enfants nés séropositifs. Ici, le sida se transmet encore souvent de la mère à l’enfant pendant la grossesse. C’est ce qui s'est produit pour Adélaïde et sa fille Ruth.

Tous les trois mois, la consultation de la clinique est réservée aux patients séropositifs. "Je suis venue avec Ruth pour prendre son traitement. Quand elle avait 4 mois, elle est tombée gravement malade. Les médecins m’ont annoncé qu’elle était positive au VIH. Ça a été très difficile pour moi. Je ne m’y attendais pas, car mes deux autres enfants n'ont pas été contaminés par le sida pendant la grossesse", a témoigné sa mère dans La Matinale de la RTS. "J’avais tellement peur pour Ruth! Je ne pensais pas qu’elle survivrait. Mais grâce à Dieu, elle va bien maintenant."

Ruth a aujourd’hui 5 ans. Sans son traitement, elle n’aurait probablement jamais fêté son deuxième anniversaire, soit l'espérance de vie moyenne pour un enfant qui naît avec le sida.

Comprimés dispersibles

Le traitement de la maladie a heureusement beaucoup évolué en 10 ans, comme l'a constaté Caroline, infirmière à la clinique Lea Toto. "Avant, on devait couper les pilules destinées aux adultes pour les donner aux enfants. Il y a eu ensuite un sirop pédiatrique qu'il fallait donner en grande quantité. Son goût était si amer que les enfants le recrachaient ou même le vomissaient. Mais depuis le dolutegravir, ils aiment prendre leur sirop", observe-t-elle.

Le dolutegravir 10 mg sous forme de comprimés dispersibles (photo) est adapté aux jeunes enfants. [DR - newhivdrugs.org]

Le médicament antirétroviral existe en effet désormais sous forme de comprimés dispersibles. Dissous dans l'eau, ils se transforment en sirop sucré au goût de fraise, mieux accepté par les enfants. Moins cher que d'autres médicaments anti-sida, il est actuellement distribué dans plusieurs pays d'Afrique grâce à l’agence de santé Unitaid.

Cette innovation a constitué une véritable révolution dans le quotidien des enfants séropositifs. Faute de marché et donc de rentabilité pour les groupes pharmaceutiques, il a fallu des années avant la production de ce traitement pédiatrique, qui s'est faite sous l'impulsion de l’agence de santé Unitaid, créée il y a 15 ans.

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Pas de médicament faute d'un marché dans les pays riches

Une molécule de dolutegravir modélisée en 3 dimensions. [AFP - Science Photo Library]

Les nouveaux-nés séropositifs ne sont une réalité que dans certaines régions pauvres, où le traitement du Sida est inadapté, comme par exemple en Afrique. "A cause de cela, les entreprises pharmaceutiques se disent qu'il n'existe pas de marché pour ces traitements en Europe, où on paie beaucoup d'argent pour les médicaments. Et donc, malheureusement, il n'y avait pas de solution pour ces enfants, ici", explique le porte-parole d'Unitaid Hervé Verhoosel.

L'association a alors collaboré avec la pharma pour développer des versions adaptées aux nourrissons. Jusqu'alors, le dolutegravir n'existait que sous forme de comprimés pelliculés qu'il n'était possible de prescrire qu'aux enfants pesant un minimum de 14 kilos.

Diagnostics plus efficaces

Conjugué à des diagnostics plus efficaces, ce traitement adapté sauve désormais la vie de milliers de jeunes enfants. "Le défi était immense pour identifier les enfants séropositifs, car il n'y avait pas de tests ADN. Les enfants étaient donc traités seulement lorsqu'ils développaient des symptômes et que la mère était séropositive. Nous en perdions beaucoup!", se souvient le gestionnaire de programme chez Unitaid Jackson Hungu.

Finalement, des tests ADN ont été créés, ce qui a permis de les diagnostiquer et de les mettre sous traitement plus rapidement. "Aujourd'hui, grâce à ce médicament qui présente moins d'effets secondaires et qui est mieux accepté par les enfants, le traitement est bien plus efficace".

Sujet radio: Charlotte Simonart

Adaptation web: Vincent Cherpillod

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