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Une lutte de pouvoir se profile en Haïti après l'assassinat de son président

L'assassinat du président d'Haïti mercredi a aggravé la crise institutionnelle dans laquelle était déjà plongé ce pays pauvre des Caraïbes depuis des mois. [afp - Valerie Baeriswyl]
Une lutte de pouvoir se profile en Haïti / Le Journal horaire / 34 sec. / le 10 juillet 2021
Un Premier ministre en partance qui déclare l'état de siège, le président du Sénat désigné par huit de ses pairs pour assurer l'intérim: l'assassinat du président haïtien mercredi a aggravé la crise institutionnelle dans laquelle était déjà plongé ce pays pauvre des Caraïbes depuis des mois.

Le pouvoir exécutif haïtien a été brutalement affaibli par le meurtre du chef de l'Etat, entraînant dans sa crise le législatif et le judiciaire. Jovenel Moïse n'ayant pas organisé d'élections depuis son arrivée au pouvoir en 2017, les mandats des parlementaires haïtiens sont arrivés à expiration sans que leurs successeurs soient désignés.

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Haïti ne compte donc plus, depuis janvier 2020 et la fin du mandat des députés et de la majorité des sénateurs, que dix représentants nationaux élus, soit le tiers du Sénat.

Le judiciaire n'est pas beaucoup mieux loti: le gouvernement de Jovenel Moïse n'a pas non plus proposé de juges pour remplacer les membres du conseil supérieur du pouvoir judiciaire, dont les mandats de trois ans arrivaient à leur terme, laissant un conseil aux rangs dégarnis et dont le président est mort du Covid-19 en juin.

"Pour ce qui a trait à la Constitution, il n'y a pas de possibilité de trouver une solution, car Jovenel Moïse et son équipe avaient bien pris le soin de démanteler toutes les institutions. Que l'on se tourne vers le Parlement ou l'appareil judiciaire, il n'y a rien", résume Marie Rosy Auguste Ducena, avocate pour le réseau national de défense des droits fondamentaux.

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Deux Premiers ministres

Quelques heures après l'assassinat, Claude Joseph, Premier ministre depuis avril, a déclaré avoir la charge des affaires courantes. Il a notamment décrété l'état de siège pour 15 jours, une disposition qui renforce les pouvoirs de l'exécutif. "La constitution est claire. Je dois organiser des élections et transmettre le pouvoir à quelqu'un d'autre qui a été élu", a-t-il par ailleurs déclaré dans un entretien diffusé samedi sur la chaîne de télévision américaine CNN.

À Haïti, la constitution prévoit, certes, que le Premier ministre assure l'intérim en cas d'empêchement du président, mais Jovenel Moïse avait nommé deux jours avant sa mort un nouveau chef du gouvernement, Ariel Henry. Cette nomination, enregistrée lundi au Journal officiel, a conduit certains observateurs à remettre en question la légitimité de Claude Joseph.

Dans ce contexte, huit des dix sénateurs encore en fonctions ont signé vendredi soir une résolution offrant au président du Sénat, Joseph Lambert, le titre de président provisoire de la République.

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En Haïti, après l'assassinat du président, les autorités craignent que le pays ne s'enfonce encore plus dans le chaos
En Haïti, après l'assassinat du président, les autorités craignent que le pays ne s'enfonce encore plus dans le chaos / 12h45 / 1 min. / le 10 juillet 2021

ats/fgn

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La veuve du président assassiné veut poursuivre la "bataille" de son mari

La Première dame d'Haïti, Martine Moïse, blessée mercredi par les meurtriers de Jovenel Moïse, a appelé samedi à poursuivre la "bataille" livrée par son mari dans un pays plongé dans le chaos que de nombreux Haïtiens cherchent à fuir.

Elle a accusé des ennemis, sans les identifier, d'avoir organisé l'attaque pour empêcher le changement démocratique. "Vous savez contre qui le président se battait", a-t-elle déclaré dans un enregistrement publié sur Twitter, sans nommer personne.

"Ils ont envoyé des mercenaires pour tuer le président chez lui avec des membres de sa famille à cause des routes, de l'eau, de l'électricité et du référendum ainsi que des élections à la fin de l'année pour qu'il n'y ait pas de transition dans le pays."

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Jovenel Moïse avait parlé de forces obscures à l'oeuvre derrière les années de troubles sous son mandat - des politiciens rivaux et des oligarques en colère contre ce qu'il appelait ses tentatives de nettoyer les contrats gouvernementaux et la politique - et avait proposé un référendum pour changer la constitution d'Haïti.